Ségou : le planning familial à l’épreuve des rumeurs et du manque d’information
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Ségou : le planning familial à l’épreuve des rumeurs et du manque d’information

L’accès au planning familial, à Ségou dans le centre du Mali, reste confronté aux rumeurs et au manque d’information.

A Ségou, Kolotomo est une localité située à 25 kilomètres au nord de la ville. L’animation est à son comble ce jeudi, jour de marché, et les forains s’activent entre achats et ventes. Après plusieurs mois d’absence à la suite de complications post-partum, Habibatou jeune commerçante mariée depuis cinq ans, occupe de nouveau sa place à l’entrée du marché. Elle vend des légumes et des fruits.

Mère de quatre enfants, Habibatou et son mari ont opté pour une méthode contraceptive moderne de longue durée, malgré l’opposition de ses beaux-parents. Elle raconte que ses quatre grossesses étaient espacées d’à peine trois mois après chaque accouchement. « J’ai accouché quatre fois en cinq ans, et mes premières années de mariage ont été un calvaire entre tâches domestiques et soins aux enfants », confie-t-elle.

Ses beaux-parents, fervents musulmans, désapprouvent le planning familial, le considérant comme un frein à la reproduction et un facteur favorisant l’infidélité des femmes. Confronté aux dépenses médicales élevées et à l’épuisement de son épouse, Aly a décidé d’amener sa femme dans un centre de santé où ils ont tous les deux bénéficié de counseling. Depuis qu’elle a opté pour une méthode de planning, elle n’a plus connu de grossesse imprévue, ce qui lui permet de mieux gérer son commerce et d’allaiter son dernier enfant jusqu’à six mois.

Un changement

Avant cette prise de conscience, Aly Diarra pensait que la contraception pouvait rendre sa femme stérile et qu’elle allait à l’encontre des préceptes religieux. Aujourd’hui, il admet que ce sont des rumeurs et n’avoir pas cherché à avoir à l’époque la bonne information : « La sage-femme qui nous a conseillés vient d’une famille religieuse respectée. Elle m’a rassuré que la religion ne l’interdit pas et qu’aucune maladie ne découlerait d’une contraception bien encadrée. » Depuis, il observe un changement : « Grâce au planning familial, je peux économiser. Avant, tout mon argent passait dans les médicaments pour ma femme et mes enfants qui étaient souvent malades. »

Au Mali, la faible utilisation des services de santé reproductive entraîne de nombreux décès maternels et infantiles. Selon l’Enquête démographique et de santé (EDSM-VI), le nombre moyen d’enfants par femme est de 6,3. Les besoins non satisfaits en planification familiale atteignent 23,9 %, en raison du manque de communication conjugale, des mariages précoces, de l’insuffisance d’éducation sexuelle et des pesanteurs socioculturelles et religieuses.

Disponibilité des soins et des services 

La santé sexuelle et reproductive est un droit fondamental permettant aux couples de décider librement d’avoir ou non des enfants, rappelle Aissata Guindo, responsable de la planification familiale à l’Association de soutien au développement des activités de population (ASDAP). Elle souligne que ces méthodes améliorent le bien-être des femmes et des enfants, réduisent les dépenses médicales et favorisent l’autonomie économique des femmes.

Guindo rappelle, par ailleurs, que la loi malienne 02-044 du 24 juin 2002 garantit à chaque individu le droit de choisir librement une méthode contraceptive sans contrainte ni autorisation préalable. Cependant, de nombreuses femmes peinent à y accéder à cause des rumeurs et du manque d’information. Elle insiste sur l’importance de la sensibilisation, notamment auprès des jeunes couples et de leurs familles.

De son côté, Madame Sogoba savoure sa nouvelle sérénité : « Désormais, je peux éviter les grossesses rapprochées et leurs conséquences. » Elle encourage les couples à adopter la planification familiale pour un meilleur équilibre de vie.

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