Publier des données personnelles sur les réseaux : ce que vous risquez en justice
« Aw ya partager » : le journalisme citoyen entre quête de scoop et désinformation
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L’info ne passe plus forcément par les JT du soir. Smartphone en main, chacun filme, commente, partage. Le journalisme citoyen explose, porté par la rapidité du réseau et l’envie de témoigner en temps réel. Mais jamais la toile n’a été autant inondée de fausses informations.

« Ne détestez pas les médias, devenez les médias. Le journalisme citoyen est vital pour l’avenir de la civilisation. », lançait Elon Musk sur X en 2023. À travers le monde, le journalisme citoyen s’impose comme une alternative rapide et directe aux médias classiques. Au Mali, la poussée du journalisme citoyen s’appuie sur une connectivité grandissante. En janvier 2024, le pays comptait 8,72 millions d’internautes, selon DataReportal.

Même dans le Mali profond, des citoyens diffusent les informations à travers des directs sur les médias sociaux.  Dans un contexte d’insécurité, de fragilité des rédactions et d’absence de cadre légal clair pour la presse en ligne, ce journalisme spontané remplit un vide. Il transforme les téléphones en micros, les grins en rédactions numériques, les témoins en sentinelles. Mais entre alerte utile et intox virale, la frontière est fine.

23 millions de journalistes

Le rôle du citoyen témoin s’est considérablement amplifié avec l’émergence du journalisme participatif : chaque individu muni d’un smartphone devient potentiellement un relais d’information — voire une arme informationnelle. L’étude « Aren’t we all journalists? » menée en 2025 décrit comment, en période de tensions au Mali, vidéos amateurs et posts sur X ou WhatsApp deviennent à la fois des « réseaux de vigilance » et des vecteurs d’influence. La frontière est mince entre témoin civique et propagandiste : selon le contexte, un même contenu peut alerter, manipuler ou désinformer.

Dans le contexte malien, le journalisme citoyen permet d’alerter en temps réel, de documenter des abus et de donner la parole aux communautés souvent invisibilisées. Mais il peut aussi semer la panique, comme des fausses attaques massivement partagées avant d’être démenties.

Publier du faux n’est pas sans conséquence. L’article 22 de la loi n° 2019-056 sur la cybercriminalité punit de 10 ans de prison et 50 millions FCFA d’amende toute diffusion d’informations haineuses ou mensongères. Pourtant, la désinformation involontaire reste fréquente. Dans un pays où l’éducation aux médias est limitée, des citoyens partagent des vidéos ou des images sans vérifier leur source, souvent poussés par l’émotion ou l’urgence.

Être citoyen numérique responsable

Les réseaux sociaux ont donné du pouvoir à chacun. Informer, témoigner, alerter, montrer ce que les médias oublient : tout cela est désormais possible, et c’est une force. Mais sans repères, ce pouvoir devient dangereux. Car quand tout le monde informe sans méthode, c’est la confusion qui l’emporte.

Avoir un smartphone ne fait pas de nous un journaliste. Informer, ce n’est pas juste partager une vidéo ou un message sur WhatsApp. C’est aussi vérifier les faits, comprendre les enjeux, mesurer les conséquences. Une image détournée, un audio sans source, une rumeur mal relayée suffit pour semer la peur, la haine, ou la violence. Il ne s’agit pas de faire taire les voix citoyennes. Il s’agit de les accompagner, de les former, de les responsabiliser. Il faut apprendre aux jeunes à bien utiliser les réseaux, intégrer l’éducation aux médias dans les écoles et renforcer les plateformes de vérification des faits.

Le journalisme citoyen a sa place. Il doit continuer, mais avec conscience. Parce qu’informer, ce n’est pas neutre. Informer, c’est agir. Et mal informer, c’est trahir ceux qui nous suivent.

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