Covid-19 : les consultations prénatales mises à rude épreuve
Photo : IWARIA
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Covid-19 : les consultations prénatales mises à rude épreuve

La pandémie de Covid-19 à mis à rude épreuve la fréquence des consultations prénatales. Pourtant, la médicalisation de la grossesse, par des consultations prénatales de qualité, permet le recul de la mortalité et morbidité materno-fœtale, selon les spécialistes de la santé.

Cet article a d’abord été publié sur le site www.maliweb.net.

« Les premiers mois de ma grossesse ont coïncidé avec l’apparition de la maladie. Et sans vous mentir, avec tout ce qui se disait sur la maladie, franchement j’ai eu peur de me rendre à l’hôpital. Je me disais que j’allais me faire inutilement contaminer. Ma peur était d’autant plus grande qu’on associait systématiquement le coronavirus à la mort », témoigne Fatim Diarra, une jeune hôtelière tenant dans ses bras une petite fille de moins d’un an.

Des propos qu’il est fréquent d’entendre d’autres jeunes mères et femmes enceintes. Ces dernières étaient anxieuses rien qu’à l’idée de devoir se rendre aux visites prénatales par crainte de contracter le virus du coronavirus. Il en a résulté une faible affluence des femmes enceintes et nouvelles mères dans les services de santé publics et privés. Une tendance très vite inversée, selon le chef du service d’obstétrique au CHU Gabriel Touré, le professeur Mounkoro Niani, gynécologue obstétricien.

Il estime que l’anxiété des patientes était surtout due à la désinformation liée à la Covid-19. Aussi, le Pr Mounkoro affirme-t-il que, grâce aux différentes communications diffusées par les médias et les sensibilisations menées, les consultations ont vite retrouvé leur affluence.

Le choix des services privés

Si la pandémie avait poussé beaucoup de personnes à craindre les services de santé publics, les cliniques, quant à elles, étaient préférées, à en croire Dr Mandjou Keïta, promoteur d’une clinique privée à Hamdallaye-ACI 2000. « Bien sûr, les gens avaient peur de se rendre dans les centres de santé pour ne pas se faire contaminer. Mais comme elles devaient quand même consulter des spécialistes de la santé, beaucoup ont préféré les services privés aux centres publics », explique Dr Keïta.

Pourtant, les dispositions sanitaires étaient prises pour prévenir la maladie même dans les services publics. Le professeur Mounkoro Niani assure que dès l’annonce de la pandémie, au CHU Gabriel Touré des mesures de prévention avaient été mises en place. « Lors des consultations, nous distribuions des masques aux patientes. Les températures sont vérifiées à l’entrée de l’hôpital et le dispositif de lavage des mains se trouvent également à l’entrée en plus du gel qu’on met à la disposition des malades », soutient le chef du service de gynécologie de l’hôpital Gabriel Touré.

« C’est aller s’acheter d’autres maladies » 

Selon le rapport publié par Save The Children en 2021, au Mali la mortalité maternelle et néonatale reste élevée avec 325 décès maternels pour 100 000 naissances vivantes et 33 décès néonataux pour 1000 naissances vivantes. Et les spécialistes de la santé, à l’instar du Pr Mounkoro Niani, affirment que ces décès peuvent être évités si la grossesse est vite médicalisée et prise en charge par un spécialiste de la santé. D’où l’importance des consultations prénatales et postnatales. Qui, d’ailleurs, sont un droit reconnu par la loi 044 relative à la santé de reproduction dont l’article 7 dit que les femmes doivent pouvoir accéder aux soins prénataux, périnataux postnataux, y compris la promotion de l’allaitement au sein.

Pour Samaké Fatoumata Traoré, juriste experte en genre et développement, en plus de cette loi relative à la santé de la reproduction, la Constitution du Mali garantit le droit à la santé pour tous. Cependant, contrairement à ce que dit la loi, l’accès aux services n’est pas facile, comme le témoigne Kadiatou Coulibaly : « Déjà que l’accès aux services de santé n’est pas facile pour nous personnes vivant avec un handicap, avec l’arrivée de la Covid-19, la situation s’est empirée. Souvent, pour accéder aux locaux des hôpitaux ou atteindre la table de consultation, il faut supporter des situations gênantes sans oublier qu’il nous arrive des fois d’être confrontées au regard discriminatoire de certains personnels de santé. Certains vont jusqu’à dire ‘toi aussi, tu es enceinte ?’ », déplore Kadiatou, personne de petite taille, membre de l’Association des femmes écrivaines du Mali.

« Je suis membre de l’association de personnes de petites tailles, et j’avoue que beaucoup de mes camarades ont préféré éviter les centres de santé. Déjà que les infrastructures ne sont adaptées pas à nos besoins, imaginez que vous allez ramper là-bas, c’est aller s’acheter d’autres maladies », ajoute-t-elle.

Campagnes de sensibilisation

La pandémie de Covid-19 a conduit beaucoup de personnes à reléguer au second plan les examens médicaux. Une négligence qui n’est pas sans conséquence pour une bonne santé maternelle. C’est dans ce cadre que certaines associations de la société civile ont entrepris des campagnes d’information et de sensibilisation auprès des populations. La Fédération nationale des collectifs d’organisations féminines du Mali (Fenacof-Mali), selon Aïssata Bocoum, assistante de présidente, a effectué de nombreuses activités de sensibilisation pour encourager les populations à exécuter leur examen médical en dépit de la pandémie et les rumeurs qui l’entourent. La structure a sensibilisé les populations sur la disponibilité des services de soins de santé et les One Stop Center.


« Cet article est publié avec le soutien de JDH – Journalistes pour les Droits Humains et Affaires Mondiales Canada »

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