La précarité menstruelle est une réalité au Mali. Elle touche précisément les filles et femmes en situation de vulnérabilité : extrême pauvreté, dans les zones de conflit, en situation de handicap physique, visuel et mental.
Sali est une adolescente de 15 ans, non-voyante et vivant dans une famille très modeste. Quand les règles surviennent, elle est obligée d’utiliser des vieux tissus comme protection menstruelle, car n’ayant pas les moyens de s’offrir des serviettes hygiéniques. Pendant cinq jours, elle angoisse d’avoir une fuite à tel point qu’elle manque l’école parfois.
Comme Sali, des millions de femmes et de jeunes filles dans le monde n’ont pas accès aux produits menstruels adéquats. Un état de fait qui a des répercussions sur leur santé, leur éducation et leur bien-être social. Les produits menstruels, tels que les tampons, les serviettes et les coupes menstruelles, sont essentiels pour garantir une bonne hygiène menstruelle. Cependant, plus de 500 millions de femmes et de filles à travers le monde n’y ont pas accès, selon le Fonds des Nations unies pour la protection de l’enfance (Unicef).
Obstacles multiples
Les obstacles à l’accès aux produits menstruels sont multiples. Le coup élevé de ces produits en est un. « C’est difficile pour bon nombre de femmes de pouvoir s’offrir des serviettes hygiéniques chaque mois, témoigne Mariam Dembélé, secrétaire chargée à la promotion des femmes de l’Union malienne des aveugles et vice-présidente du collectif des handicapés diplômés et non-diplômés. Et celles qui sont réutilisables sont trop chers. Alors, ce n’est pas chose aisée, surtout pour celles en situation de handicap en raison de la capacité limitée de certaines à travailler. J’ai utilisé des morceaux de tissus pendant plusieurs années, car je n’avais pas le choix. »
Le manque d’accès aux produits menstruels adéquats peut entraîner de graves conséquences sur la santé. « Au début, j’utilisais des morceaux de tissus comme protection pour mes règles. C’était très difficile pour moi, car je manquais d’expérience et la menstruation était un sujet trop tabou. On devait garder les produits hygiéniques à l’abri des regards extérieurs à tout prix. Du coup, je mettais mes serviettes traditionnelles à sécher sous des matelas ou d’autres endroits très isolés. Ainsi, j’ai contracté des infections vraiment pénibles plusieurs fois », raconte Mariam Dembélé.
Les conséquences du manque d’accès aux produits menstruels ne se limitent pas à la santé physique. Les impacts psychologiques et sociaux sont tout aussi préoccupants. Les absences répétées à l’école, liées aux menstruations, peuvent entraîner un décrochage scolaire. Ce qui réduit les perspectives d’avenir des filles et maintient le cycle de la pauvreté. « Les filles manquent souvent l’école pendant leurs règles, parce qu’elles n’ont pas le moyen de gérer leur menstruation de manière hygiénique et discrète. Cela affecte gravement leur éducation et leur avenir », explique Medou Mallé, enseignant à l’école fondamentale de Marela, dans le cercle de Bla. « L’éducation des filles est cruciale pour le développement économique et social. En négligeant leurs besoins menstruels, nous mettons en danger leur éducation et leurs potentiels. », ajoute-t-il.
Initiatives prometteuses
Malgré ces défis, des initiatives prometteuses émergent. Les innovations dans les produits menstruels offrent des solutions durables. Les serviettes lavables, par exemple, sont des alternatives économiques et écologiques. « Nous sommes spécialisés dans la confection et la distribution de serviettes hygiéniques lavables et réutilisables. N’terini est une solution innovante, économique, écologique et durable. Elle vient en alternative aux protections jetables qui, en plus d’être inaccessibles, ne sont pas eco-friendly », souligne Aminata Simpara, promotrice de N’terini.
Des ONG (UNFPA, ASDAP, UNICEF et UNESCO notamment) ou encore des organisations de la société civile, jouent également un grand rôle dans la lutte contre la précarité menstruelle. Ceci à travers des campagnes de sensibilisation, des causeries éducatives et des distributions de kits menstruels. « En dehors des activités commerciales, nous sensibilisons et offrons des serviettes gratuitement dans les zones défavorisées (les écoles, les camps des déplacés internes, les zones rurales et d’autres sites accueillant des femmes physiquement et mentalement vulnérables). C’est notre association, créée à cet effet, qui assure ce volet social. », poursuit Mme Simpara.
La précarité menstruelle est une question de santé publique et de justice sociale. Il est crucial de continuer à sensibiliser, à éduquer et à soutenir les initiatives qui permettent de briser les tabous et de garantir que toutes les femmes et les filles puissent gérer leurs menstruations de manière sûre et digne. En s’engageant collectivement, nous pouvons faire une différence significative dans la vie de millions de femmes et de filles à travers le monde.