Les contrôles policiers sur les routes, censés assurer la sécurité des usagers de la circulation, finissent par tourner au cauchemar et provoquer des accidents.
Le mercredi, 22 juillet 2021, un contrôle de sécurité effectué par une patrouille de la police à Lafiabougou, en commune IV du district de Bamako, tourne au vinaigre. Un communiqué de presse établi par la direction générale de la police relate ainsi les faits : les policiers ont repéré une voiture au comportement suspect et ont intimé l’ordre au chauffeur de s’arrêter. Malgré les injonctions, celui-ci a préféré prendre la fuite. Lors de cette fuite, le véhicule mis en cause a fini par heurter plusieurs jeunes, causant quatre blessés parmi eux.
Par la suite, une foule en colère a décidé de s’attaquer à ladite patrouille. Pour se dégager, les policiers ont fait usage de leur arme de service. Malheureusement, au cours de l’opération, il y eut mort d’homme. Nulle part dans le communiqué, la police n’affirme avoir entamé une course-poursuite contre le véhicule suspect. Toute chose réfutée par les témoins de la scène.
La chose la mieux partagée
Comme un aveu, le lendemain, à travers une note de service, le directeur général de la police rappelle à toutes les unités de police chargées d’interventions sur la voie publique, que toute course-poursuite est proscrite lors d’un contrôle routier ou d’identité.
Lundi soir, 27 février 2023. Un contrôle policier à l’autogare de Sogoniko, en commune VI du district de Bamako, entraine un accident de la route. Selon des témoignages reçus, après que l’agent de police eut juste sifflé le conducteur de mototaxi en cause, celui-ci a dévié de son chemin et a pris un sens interdit. Dans cette fuite, il a trouvé la mort après être entré en collision avec un autre motocycliste. Pour d’autres, l’agent de police s’est lancé à la poursuite du conducteur de mototaxi qui a refusé d’obtempérer au coup de sifflet, entraînant ainsi sa fuite et l’accident. Dans l’une ou l’autre version, le problème demeure le même : les contrôles policiers aboutissent souvent à des accidents de la circulation.
L’incivisme sur la route semble la chose la mieux partagée. Parmi les usagers de la circulation, peu conduisent dans la stricte observance des règles du code de la route et disposent de tous les papiers nécessaires. Ainsi, lors de contrôles policiers de routine, il devient plus simple de corrompre, de changer de voie ou de prendre la fuite en refusant d’obtempérer à une injonction.
Une question de sécurité publique
Les relations entre les policiers et les usagers de la route, au lieu d’être empreintes de courtoisie et de collaboration, sont marquées plutôt par la peur, les menaces, les rackets, les solutions à l’amiable corruptives. Fuir ainsi face à un contrôle policier lorsqu’on n’est pas en règle et que l’on ne veut pas subir les conséquences qui en découlent constitue une solution plus facile pour certains usagers de la circulation. Mais elle est dangereuse, pour leurs vies et celles des autres usagers, exposant à tous les risques d’accidents possibles.
Cela dit, de l’autre côté, la réalité aussi est que des agents de la police se lancent à la poursuite des usagers de la circulation qui refusent d’obtempérer à leurs injonctions. « En tant que policier, comment savoir d’emblée qu’un tel conducteur qui cherche à prendre la fuite en nous voyant venir à lui ou en refusant d’obtempérer à nos injonctions n’est pas un voleur ou un criminel qui cherche à nuire ? », s’interroge cet agent sous le couvert de l’anonymat. Les policiers se voient bien souvent dans un dilemme : comment assurer la sécurité de la population sans nuire à celle-ci en même temps, ajoute notre interlocuteur ?
S’il est important de sensibiliser nos concitoyens à se mettre en règle et se soumettre volontiers aux contrôles policiers, preuve de civisme et de bonne foi sur la route, il est tout aussi important que les agents de la police se gardent d’engager toute action pouvant entraîner des accidents de la route, à l’occasion des contrôles. C’est aussi une question de sécurité publique.