Ben Moulaye Haïdara : « L'insécurité constitue un frein majeur à l'accès aux soins pour des femmes enceintes »
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Ben Moulaye Haïdara : « L’insécurité constitue un frein majeur à l’accès aux soins pour des femmes enceintes »

La santé maternelle et infantile est un enjeu capital au Mali, un pays de 23 millions d’habitants. Dans une interview, Dr Ben Moulaye Haidara, directeur dénéral de l’Office national de la santé de la reproduction (ONASR), nous éclaire sur la situation actuelle et les efforts déployés pour réduire la mortalité maternelle.

Quelle est la situation actuelle de la santé maternelle au Mali ?

Le Mali est un grand pays de 23 millions d’habitants et nous avons majoritairement des femmes. Chaque trois heures, une femme enceinte perd la vie au Mali. Toutes les quatre minutes, un enfant décède. Environ 5 % des enfants ne fêteront jamais leur cinquième anniversaire. L’insécurité constitue un frein majeur à l’accès aux soins, forçant de nombreuses femmes à accoucher à domicile. En réalité, nous avons un taux d’accouchement à domicile très élevé. De plus, nous avons un manque de personnel qualifié avec seulement six agents de santé qualifiés pour 10 000 habitants, alors que les normes internationales en recommandent 23 pour 10 000 habitants.

Quels sont les principaux défis à relever ?

En termes de défis, trois qui sont majeurs. D’abord le manque d’information. Beaucoup de femmes ne connaissent pas l’importance des consultations prénatales et des soins post-accouchement, souvent en raison d’un taux élevé d’analphabétisme au sein de ces communautés. Ensuite, nous avons les difficultés de transport dans les zones rurales. L’absence de moyens de transport complique énormément l’accès aux centres de santé. Et pour finir, le manque d’infrastructures et de personnel. Plus de la moitié des 1 686 centres de santé communautaires existants au Mali ne disposent pas de personnel qualifié.

Quelles sont les initiatives mises en place pour améliorer la situation ?

Au niveau de l’ONASR, nous avons développé plusieurs stratégies. La promotion de la planification familiale. Nous voulons faire passer le taux de prévalence contraceptive de 22 % à 40 % dans les dix prochaines années. Nous avons procédé au renforcement des infrastructures en équipant près de 200 centres de santé et visons 600 dans les jours à venir. Nous procédons à la mise en place de maisons d’attente destinées aux femmes enceintes à risque, qui vivent loin des centres de santé afin de leur assurer un suivi prénatal. Donc, nous travaillons sur ces 600 à travers une convention que nous avons avec la Fédération nationale des santés communautaires (FENASCOM). Nous travaillons sur l’équipement, le personnel pour répondre aux besoins.

Nous sommes en train de développer plusieurs plans dans le cadre de la lutte contre la mortalité maternelle. Sur le plan de l’hémorragie du poste partum, nous faisons la promotion du ballonnet intra-utérin pour diminuer l’hémorragie du poste partum qui est la première cause de décès maternel. Nous avons également mis en place des formations en ligne et en langues officielles pour, entre autres, améliorer la qualification du personnel.

Quel est le rôle du gouvernement et des partenaires dans cette lutte ?

Le ministère de l’Économie et des finances fait des efforts énormes, mais il reste beaucoup à faire. Par exemple, le gouvernement a augmenté le budget de la césarienne de 800 millions à 1,5 milliard de francs CFA, ce qui est un signal fort. En outre, nous avons mis en place la radiothérapie à l’Hôpital du Mali pour améliorer la prise en charge des cancers féminins.

Quels sont vos espoirs pour l’avenir de la santé maternelle au Mali ?

Nous devons continuer à mobiliser toutes les parties prenantes pour garantir à chaque femme malienne un accès à des soins de qualité. C’est un droit fondamental, et il est crucial que les médias participent à la sensibilisation et à l’éducation des populations. L’ONASR poursuit son combat pour réduire la mortalité maternelle et infantile, en espérant que d’ici quelques années, accoucher au Mali ne soit plus un danger de mort.

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