Rejetées par leurs familles et abandonnées par leurs conjoints, des femmes victimes de fistules obstétricales luttent pour survivre dans l’ombre. Certaines trouvent la force de se relever, parfois avec un soutien inattendu.
« J’ai eu une fistule obstétricienne lors de ma deuxième maternité. Deux mois après, mon mari m’a abandonnée pour se remarier. Aujourd’hui, je fais la lessive pour subvenir à mes besoins, seule ». Ces mots d’Assitan, 32 ans, traduisent une réalité trop souvent vécue par les femmes au Mali. Vivant sur la colline du Point-G, elle décrit un quotidien marqué par l’isolement et l’indifférence. « Ni mon mari, ni ses parents ne viennent me voir. C’est comme si je n’existais plus pour eux », regrette Assitan.
La fistule obstétricale, cette lésion causée par un travail prolongé sans soins adéquats, affecte non seulement le corps mais aussi l’âme. Elle entraîne des fuites urinaires ou fécales incontrôlées, rendant les femmes vulnérables au rejet et à la stigmatisation. Pour Assitan, la douleur physique est presque secondaire face à l’abandon et au mépris qu’elle endure.
Quand le soutien conjugal fait la différence
Pourtant, l’histoire d’Assitan n’est pas celle de toutes les femmes. Certaines bénéficient d’un soutien inestimable de leurs conjoints. Moussa, 35 ans, est venu du village pour s’occuper de sa femme. Il raconte pourquoi il est resté aux côtés de son épouse malgré la pression sociale : « Quand elle a eu la fistule après son accouchement, ma famille me disait de la quitter. Mais je savais que ce n’était pas de sa faute. Nous avons affronté cela ensemble », témoigne Moussa.
Grâce à son appui, son épouse a pu se faire opérer et retrouver une vie normale. « Je n’ai jamais vu cette maladie comme une malédiction. C’est notre amour et notre dialogue qui nous ont permis de surmonter cette épreuve », confie-t-il. Ces récits de solidarité rappellent qu’un soutien conjugal peut transformer une tragédie en une histoire de résilience.
La fistule obstétricale est souvent le résultat de plusieurs facteurs, notamment l’accès limité aux soins de santé pendant la grossesse et l’accouchement. Dans de nombreuses communautés au Mali, le manque d’éducation sur la santé reproductive et les normes culturelles liées à la maternité exacerbent ce problème. Les femmes sont souvent confrontées à des grossesses précoces et à des accouchements sans assistance médicale adéquate, augmentant ainsi le risque de complications comme la fistule obstétricale.
Le combat contre la fistule va bien au-delà de la guérison médicale. Selon le Fonds des Nations unies pour la population (UNFPA) au Mali, plus de 1 500 femmes ont été opérées entre 2018 et 2023 grâce à l’appui de partenaires comme Cordaid. Cependant, l’accès aux soins reste difficile pour beaucoup.
Perspectives d’avenir
En effet, les organisations non gouvernementales jouent un rôle clé en sensibilisant les communautés et en aidant les femmes à retrouver leur autonomie. Des programmes de réinsertion économique offrent des perspectives d’avenir. « Si j’avais les moyens, je pourrais me reconstruire. Mais seule, c’est presque impossible », confie Assitan.
La fistule obstétricale n’est pas seulement une question de santé, c’est un enjeu de dignité humaine. Les témoignages, comme celui d’Assitan ou le soutien de Moussa, nous rappellent l’importance de la solidarité sociale. Chaque femme mérite d’être soutenue, soignée et respectée. Ce combat est celui de tous, car derrière chaque statistique, il y a des vies brisées, mais aussi des histoires de courage et de résilience qui méritent d’être entendues.
Pour lutter efficacement contre la fistule obstétricale, il est essentiel de renforcer l’éducation à la santé reproductive dans les communautés, d’améliorer l’accès aux soins et de promouvoir des campagnes de sensibilisation. Les gouvernements, les ONG et la société civile doivent unir leurs efforts pour créer un environnement où chaque femme peut accoucher en toute sécurité.