Mme Sy Tenin Camara, mère de six enfants, dont cinq garçons et une fille, a fait face à de nombreuses difficultés en raison de son handicap visuel. Son mari est également en situation de handicap moteur.
« J’ai été confrontée à des problèmes, du centre de référence jusqu’au CHU. Heureusement que je me défends en tant que personne en situation de handicap », confie-t-elle, reflétant la force intérieure qui la guide malgré les obstacles. Le récit de Mme Sy révèle des épisodes d’injustice flagrante.
En 2010, lors de sa troisième maternité, elle se trouve confrontée à des frais médicaux exorbitants et à un traitement qu’elle trouve discriminatoire : « J’ai été étonnée en me demandant si c’est parce que je suis non voyante pour qu’on me traite de la sorte. La sage-femme m’a fait savoir que les frais des suivis mensuels de ma grossesse coûtent 2000 FCFA par séance et celui de l’accouchement s’élève à 20 000 FCFA, plus 3 pagnes. »
« J’ai accouché par terre »
En 2015, lors d’un autre accouchement, Mme Sy est confrontée à ce qu’elle considère comme étant de l’indifférence de la part du personnel de santé. Malgré ses efforts pour accéder aux soins, elle se retrouve à accoucher par terre.
« Arrivée au centre de santé, accompagnée par mon mari qui est également en situation de handicap, nous avons eu du mal à réveiller le personnel. J’ai accouché par terre. C’est ma belle-sœur qui s’est occupée de l’enfant pour qu’elle n’aspire pas le sang de la couche », témoigne Mme Sy. « Quand l’agent de santé est revenu, il m’a crié dessus, m’accusant de toutes sortes de choses. Par la suite, je me suis plainte auprès du médecin-chef pour qu’il dise à ses personnels de bien exercer leur fonction », ajoute-t-elle.
« Mon quatrième garçon a eu un choc au niveau de son crâne à l’âge de 2 ans. Étant un couple en situation de handicap, nous nous faisons toujours accompagner par notre premier garçon pour nous faciliter les tâches », poursuit Mme Sy Tenin Camara.
Même dans ces moments de détresse, la discrimination persiste : « Quand nous sommes arrivés au CHU avec l’enfant accidenté, on nous a refusé l’accès à trois. Le personnel a insisté qu’un seul d’entre nous pouvait entrer. Il a fallu une grande dispute pour entrer. Un mois plus tard, le même enfant s’est fait brûler par de l’eau chaude. Et le même scénario s’est reproduit au même hôpital. Les agents de santé ne se sont pas occupés du petit garçon jusqu’au crépuscule, alors que nous étions arrivés depuis 11h. »
Hôpital pour les personnes en situation de handicap
Mme Sy élève sa voix pour plaider en faveur d’un changement nécessaire. « Je demande aux décideurs de songer à construire un hôpital pour les personnes en situation de handicap, comme ils l’ont fait pour les militaires, ou de créer des centres de santé, voire même des sections spécialisées, pour bien accueillir les personnes en situation de handicap », plaide-Mme Sy Tenin Camara.
Son histoire met en lumière l’importance cruciale de garantir l’accès aux soins de santé pour tous, indépendamment du handicap. Des solutions doivent être mises en place pour garantir que personne ne soit laissée pour compte dans la quête de soins médicaux dignes, surtout pour la santé reproductive.
Dans un monde où l’empathie et la compassion devraient guider chaque interaction, le plaidoyer de Mme Sy résonne comme un appel à l’action. Il est temps que les décideurs prennent des mesures concrètes pour améliorer l’accès aux soins de santé et mettre fin à la discrimination envers les personnes en situation de handicap. Mme Sy – et d’autres comme elle – méritent respect, dignité et des soins de santé de qualité.