À Sakna, un village perdu dans l’immensité désertique, le chef de la tribu vote pour tous les membres du village, donnant les voix au candidat le plus offrant. À travers l’histoire de ce village fictif, le blogueur Dramane Traoré raconte comment le bourrage des urnes se passe dans les zones les plus reculées des régions du Nord.
Cheikh, le haut chef de fraction âgé de 60 ans, s’y connaît en matière d’organisation d’élections. Si ailleurs, les bureaux de vote ne ferment qu’aux environs de 18 heures, à Sakna, chez les Baidanes, le processus de vote dure à peine une heure.
Il n’y a en réalité pas grand-chose à faire. Ayant sous la main les cartes d’électeur de tous les membres âgés de 18 ans ou plus, le chef fait voter les quelques membres présents de sa famille. Il vote lui-même en lieu et place de tous les autres. Cela s’appelle sous d’autres cieux le bourrage des urnes mais ici, c’est comme ça que ça se passe. Le chef y impose sa loi.
Les voix sont partagées entre les différents candidats, faisant la part belle à celui dont le représentant a fait la meilleure offre en argent liquide. Ceux parmi les agents électoraux qui refusent le deal subiront des intimidations. On leur refusera l’eau, la nourriture, etc. Ils feront même l’objet de menace de mort. Ceux qui acceptent de collaborer seront généreusement récompensés en billets de banque et en bétail.
« Bureau de vote mobile »
Il arrive même que des jeunes de la zone s’attaquent aux convois qui transportent les urnes pour les enlever en vue de procéder à leur bourrage, loin des bureaux de vote désignés par les autorités. L’expression consacrée à ce phénomène par les spécialistes est le « bureau de vote mobile ».
C’est de cette manière que les élections sont organisées dans les zones les plus reculées des régions du Nord.
Sakna est un lieu fictif. Toute ressemblance avec des lieux ou des personnages existants ou ayant existé est purement fortuite.
Triste realite.
En tout cas, il nous faut changer tout cela.