Au Mali, les élections sont toujours entachées d’irrégularités. A peine les opérations de vote sont bouclées que des plaintes surgissent. Ne serait-il donc pas temps qu’on pense à mieux garantir la transparence dans les lieux de vote à travers l’installation de caméras de surveillance ?
Pendant les élections, tout un arsenal humain est mobilisé pour assurer la transparence lors des élections. D’abordles agents des forces de sécurité pour dissuader ou sévir contre de potentiels coupables d’actes de fraude dans les bureaux de vote. Puis il y a les organes de gestion des élections, comme la Commission électorale nationale indépendante (Ceni) ou la Cour constitutionnelle. Les partis politiques bénéficient par ailleurs du droit d’envoyer des délégués dans des centres de vote pour observer la bonne tenue des opérations de vote. A tout ce monde, s’ajoutent les hommes de médias qui assurent la couverture.
Toujours est-il que les élections dans notre pays suscitent de moins en moins de confiance aussi bien pour des citoyens que pour la communauté internationale. Les contestations post-électorales ne finissent pas. Des accusations d’achats de voix ou de tripatouillage de suffrages persistent et se font de plus en plus entendre.
Faillite du mécanisme humain
Avec l’utilisation en masse des nouvelles technologies de l’information et de la communication, il est devenu si fréquent de retrouver des images faisant voir des personnes qui achètent des voix d’électeurs. Pire, des images de bulletins de vote se retrouvent dans la nature avant le jour des élections. Quid de ces urnes remplis de bulletins de vote que l’on vient à retrouver dans des bureaux d’agents de l’État ! Tout cela prouve que les irrégularités tant décriées lors de nos élections sont bien réelles et entachent véritablement leur crédibilité.
Il n y a qu’à se pencher sur les plaintes de différents partis politiques recensées auprès de la Cour constitutionnelle pour comprendre qu’il existe de sérieux problèmes dans le déroulement des opérations de vote. Le mécanisme humain semble avoir failli. D’où la nécessité pour notre pays de révolutionner la façon de faire en s’appuyant sur des outils technologiques modernes.
Il serait pertinent de solliciter l’installation des caméras de surveillance dans nos bureaux de vote. Pouvant se faire progressivement dans un pays aux moyens financiers limités comme le nôtre, tant que la volonté politique demeure, on peut bien mettre de telles initiatives en place d’abord dans les villes. Mieux encore, on pourrait commencer par les localités où les cas de fraude sont généralement recensés. Avec des caméras de surveillance, les scènes sont facilement filmées pour pouvoir en tirer les conséquences. Les coupables sont plus traçables.
D’ailleurs, le système d’installation des caméras de surveillance dans les bureaux de vote a été expérimenté dans certains pays tels que la Russie ou l’Israël. On se souvient qu’en 2011, à l’époque premier ministre, l’actuel président de la Russie, Vladimir Poutine, avait ordonné l’installation de webcaméras de surveillance dans tous les bureaux de vote pour la présidentielle à laquelle il était lui-même candidat pour éviter des fraudes électorales.
Meilleures solutions
Il est vrai que malgré ce dispositif, des cas de fraude ont été signalés dans certaines parties du pays. Cependant, des caméras de surveillance ont pu filmer de nombreuses scènes. Et les autorités en charge des élections avaient rassuré que les responsables de ces actes seraient mis aux arrêts. Il y a eu des zones où les caméras ont failli, mais pour une première expérience, c’était normal de faire face à de telles difficultés.
En 2019, lors des élections parlementaires israéliennes, la police avait décelé de nombreuses caméras cachées directement sur certains observateurs électoraux ou dans des bureaux de vote. Cela n’a pas manqué de susciter un tollé dans le pays, car jugeant une telle mesure de surveillance illégale. C’est d’ailleurs tout le souci de cet électeur malien, Samba Traoré, pour qui il faut veiller à protéger le secret du vote si on appliquait une telle mesure : « Je trouve que c’est une très bonne idée d’installer des caméras de surveillance dans des bureaux de vote. Mais il faut cependant veiller à épargner l’isoloir pour préserver le secret du vote ». Il précise que ce n’est d’ailleurs pas au sein de l’isoloir qu’on fraude.
Barou Sidibé, cet autre électeur malien pense qu’il ne faut surtout pas faire savoir d’avance aux électeurs qu’ils seront filmés : « Il faut les filmer en toute discrétion mais veiller cependant à ce que les images filmées ne se retrouvent pas sur la place publique. Les forces de sécurité peuvent mettre les coupables aux arrêts en toute intelligence. »
La forte présence de caméras de surveillance dans les lieux de vote aura en tout état de cause l’effet de dissuader les potentiels « malfaiteurs » ou de faciliter leur interpellation. C’est bien l’une des meilleures solutions que l’on pourrait imaginer pour veiller sur la transparence