Les chrétiens, considérés comme minoritaires au Mali, tiennent à faire entendre leur voix sur la laïcité. C’est pour cette raison qu’a été créé en 2020 le Collectif des intellectuels chrétiens pour la cohésion sociale, la paix et la bonne gouvernance.
Lors d’une conférence de presse, animée le 25 septembre sur la « colline du savoir » à Badalabougou, les membres de ce Collectif qui revendique plus de 500 membres ont tenu à exprimer leur attachement à la laïcité.
« Dans un contexte national où les défiances envers les institutions et les valeurs républicaines sont grandissantes, le Collectif des intellectuels chrétiens appelle à manifester un attachement fondamental à la laïcité, cet état idéal d’une société fraternelle, où peuvent vivre ensemble librement, s’exprimer, s’épanouir dans l’égalité des chances, toutes les différences humaines », dit le professeur N’Tji Jacques Dembélé, président dudit Collectif.
Une laïcité menacée
Au Mali, musulmans et chrétiens ont toujours cohabité avec harmonie. Mais avec la montée en puissance des groupes dits djihadistes dans le nord et le centre du Mali, et la victoire des talibans en Afghanistan qui risque de donner des idées aux partisans d’une République islamique, les inquiétudes ne manquent pas. « La laïcité est déjà consacré dans notre Constitution, mais nous voyons que dans la pratique, d’année en année, elle est en train d’être menacée », explique Thera Awa Keita, chargée des relations extérieures du Collectif. « Nous qui sommes minoritaires, nous avons aussi des droits. Nous avons besoin de bien définir cette laïcité. Nous avons besoin que chaque Malien puisse comprendre cette laïcité. Si on demande à plusieurs personnes, chacun va donner sa propre définition. Mais nous, nous comptons également demander à l’État de bien expliquer aux populations dans les différentes langues ce que veut dire la laïcité », ajoute Thera Awa Keita, également juriste de formation.
Même si le Collectif a été créé il y a près d’un an, il a commencé à faire entendre sa voix après le 12 août 2021, lorsque le ministre des Affaires religieuses et du Culte, Mahamadou Koné, avait qualifié le Mali de « République islamique » pendant une réunion publique. Le Collectif avait condamné « avec la dernière énergie » les propos du ministre. Son chargé de la communication, Yuhan Coulibaly, avait déclaré sur RFI qu’« une telle déclaration met clairement en cause le caractère laïc de notre pays inscrit clairement dans sa Constitution ».
Le Mali n’est pas une « République islamique »
Depuis, le ministère des Affaires religieuses a essayé d’arrondir les angles en qualifiant d’« erreur de langage » les propos du ministre et a rappelé que « le Mali est et demeure un pays laïc ».
Les membres du Collectif, qui sont issus de toutes les dénominations catholique et protestante, rappellent qu’ils sont prêts à travailler avec tous ceux qui partagent l’idéal d’une société inclusive, qu’ils soient chrétiens, musulmans, animistes ou athées. En plus de défendre la laïcité, ils entendent aussi défendre les droits humains, la citoyenneté, le patriotisme, la paix et la bonne gouvernance, conformément à l’éthique chrétienne.