« Cousu main » : le calvaire des victimes de viol de guerre sur les planches
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« Cousu main » : le calvaire des victimes de viol de guerre sur les planches

La pièce de théâtre de Jeanne Diama, Cousu main, est un véritable cri du cœur. Un court métrage de 35 minutes qui met à nu les souffrances extérieures et intérieures des femmes victimes de viol de guerre.

Cousu main été jouée à deux reprises à la 3e édition du festival Les Praticables, en décembre 2019. La pièce y a saisi l’attention de plus d’un spectateur de par le thème qu’elle aborde : le viol de guerre.  La trame de la pièce reste un sujet très sensible. « Cousu main peut être traduite comme des personnes qui ont la vie complètement détruite et qui doivent la recoudre avec leurs mains. Ou encore comme les coups que les  humains portent les uns aux autres », explique  Jeanne Diama, jeune auteure, comédienne et metteure en scène.

Elle dit s’être inspirée de plusieurs histoires réelles pour écrire cette pièce qui met en exergue la souffrance des femmes victimes de viols de guerre. Un phénomène dont cértaines victimes meurent à petit feu.

Cousu main met en scène deux femmes (mère et fille),  victimes de viol de guerre, « complètement détruites» et cherchant un sens à leur existence bafouée. Elles sont dévorées par la colère et le désespoir, la honte, l’envie de tout abandonner.  La jeune fille, tombée enceinte après son viol, est de surcroit le fruit de viols qu’a subis sa mère dans le passé. Face à ce sort, elle souhaite quitter la famille parentale, fuir la société et la honte. Elle veut laisser ce cauchemar derrière elle dans l’espoir de trouver un avenir meilleur. Mais, elle sera confrontée au refus protecteur de sa mère, qui tentera de la convaincre  que « partir n’est point la solution ».  La fougue qui accompagne cette vive discussion peut témoigner de la douleur de ces femmes.

Dans les échanges entre elles, les deux victimes déversent toute leur colère. Elles font accéder au spectateur leur intimité en décrivant, sans tabou, les scènes douloureuses et épouvantables de viols de guerre. «Dans cette pièce, nous voyons que les victimes de viols sont coincées dans l’horreur. Quand on a vécu de tels traumatismes, on en porte les sequelles pour toujours, quoi qu’il arrive », lance une spectatrice.

Victimes collatérales

A travers cette pièce, nous apprenons également que les conséquences de ces viols ne pèsent pas que sur les victimes directes : leurs proches sont également touchés. Pour preuve, le chef de famille, poussé par la honte, abandonnera sa femme et ses enfants. Il n’arrivait pas à se réconcilier avec sa conscience pour n’avoir pu protéger sa femme et sa fille de leurs agresseurs armés.

Un autre aspect sur lequel Jeanne Diama met l’accent dans cette pièce, au-delà des souffrances des victimes, est l’usage du viol en période de conflits comme une arme de guerre. Les ennemis s’en servent pour détruire un équilibre familial, social. Les femmes sont donc utilisées comme une « arme » pour  déstructurer les fondements d’une société. « Car la femme  est justement l’équilibre de la famille, de la société.», fait remarquer Jeanne Diama.

Donner la parole aux victimes 

Ces femmes vivent avec des séquelles du viol durant toute leur vie. Elles sont dans presque toutes les contrées du monde ayant connu des conflits armés. Ces victimes manquent d’accompagnement digne de ce nom. Ce sont des femmes qui meurent à petit feu sans un regard de la société. L’objectif de cette pièce, pour Jeanne Diama, est de donner la parole à ces femmes victimes afin qu’on entende,  pour une fois, les souffrances qu’elles vivent. « Aucune femme ne doit avoir de peur de sortir, de marcher, de se marier, de faire des enfants, de vivre », estime-t-elle

Pour soulager les victimes de ce lourd  fardeau et leur donner une chance de suivre pleinement et de s’épanouir, l’auteure propose à l’État et aux organisations des  droits humains, comme l’Association malienne des droits de l’homme, d’être à leur écoute. « L’État doit écouter le nombre alarmant de victimes de violences basées sur le genre. Il doit écouter les femmes violées, battues, marginalisées, sexualisées», ajoute-elle.

Écouter les victimes oui, mais il faut aussi punir, comme cela se doit, les bourreaux.  Ce combat contre les viols de guerre et toutes autres violences basées sur le genre ne peut être gagné aujourd’hui sans l’implication des acteurs des réseaux sociaux, qui peuvent atteindre et sensibiliser un grand nombre de personnes dans le monde.

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