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La dépigmentation volontaire, un problème de santé publique

Avoir un teint plus clair, c’est le désir de millions de femmes partout à travers le monde. Comme toutes les femmes au monde, les Maliennes sont devenues prisonnières des critères de beauté imposées par les magazines de mode et la télévision, écrit le blogueur Kibaru (pseudo).

La peau claire est souvent assimilée à la beauté, la  sensualité, mais aussi l’appartenance à une certaine catégorie sociale. La peau noire, elle, représente tout ce qui est lié à l’assujettissement. Ainsi, beaucoup de femmes noires sont frustrées et cherchent à s’éclaircir par tous les moyens.

Ce n’est pas de la peau noire dont elles veulent se débarrasser mais les connotations négatives qu’elle véhicule. Au Mali, la dépigmentation a pris une telle importance qu’elle a trouvé un mot dans la langue locale : « Tchacho ».

Quand le rêve tourne au cauchemar

« J’ai commencé à m’éclaircir la peau à 17 ans par la suite d’influence de mes copines. À l’époque, j’avais un teint noir assez foncé sujet à des railleries. Dans notre groupe, les autres filles étaient l’objet d’intérêts et d’attentions de la part de la gent masculine, parce qu’elles avaient le teint clair. Alors je m’y suis mise aussi pour attirer les faveurs des hommes», témoigne Fifi Jolie.

Au début, les produits qu’utilisait Fifi ont donné l’effet escompté, mais après un certain temps les choses ont changé. « Au début, j’étais très contente parce que j’affichai un teint uniformément éclairci. Les difficultés ont surgi par des séries de taches noires disgracieuses, de l’acné, puis ont suivi des irritations et des allergies un peu partout sur tout l’ensemble du corps. Je me suis retrouvé défigurée après 3 ans, malgré un traitement dermatologique assez coûteux », ajoute Fifi, le visage recouvert d’un foulard.

Un combat difficile mais nécessaire

La dangerosité des produits éclaircissants est bien connue. Isabelle Mananga-Ossey, une française d’origine gabonaise, a créé l’ONG Label Beauté Noire en 2004 pour lutter contre ces produits. Elle témoigne de la difficulté de ce combat :

« D’un côté, on fait de la prévention, de l’éducation pour faire évoluer les mentalités. Et de l’autre, on a le marché noir. On a des produits cosmétiques qu’on nous vend comme des médicaments et qui, en définitive, ne le sont pas. Il faudra vraiment tirer tout cela au clair. Faire un état des lieux de ce qu’il y a et par rapport aux pratiques, voir comment cela évolue par pays. Parce qu’il y a des personnes qui mélangent elles-mêmes leurs crèmes, elles mélangent leurs produits à de l’eau de javel ou autres. Il ne s’agit donc pas de produits cosmétiques, mais de pratiques culturelles ».

Au Mali, le grand marché de Bamako Suguba est devenu le centre de trafic illégal de produits dépigmentant. Introduits en contrebande du Nigeria, d’Italie ou d’Espagne en passant par le Sénégal, ces crèmes sont écoulées sur ce marché. Il y en a pour toutes les bourses.

Le gouvernement malien doit s’approprier la remarque d’Isabelle, inventorier, communiquer et sensibiliser la population sur les produits dangereux. La dépigmentation volontaire doit être considérée comme un problème de santé publique. Il faut garder à l’esprit que la dépigmentation n’est plus seulement un problème des femmes, puisque les hommes s’y mettent aussi.

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