
Les deepfakes, renvoyant à des contenus truqués par l’intelligence artificielle pour imiter la réalité, envahissent la toile. Leur propagation rapide sur les réseaux sociaux amplifie la désinformation et pose de sérieux défis à la vie privée et à la cohésion sociale.
Les deepfakes tirent leur nom de la combinaison de « deep Learning » (apprentissage profond) et « fake » (faux). Grâce à des algorithmes utilisés dans le domaine de l’Intelligence Artificielle, ils permettent de superposer des images ou des voix sur des séquences vidéo ou audio existantes, créant ainsi des contenus falsifiés. Si cette technologie peut servir des causes positives, ses dérives sont préoccupantes, notamment dans des contextes sensibles comme celui du Mali.
Une arme de désinformation massive
La capacité des deepfakes à brouiller la frontière entre vérité et mensonge les rend particulièrement dangereux pour l’intégrité de l’information. Par exemple, une vidéo truquée montrant un leader politique proférant des propos incendiaires pourrait déclencher des troubles sociaux avant même que la véracité du contenu ne soit remise en question. D’autres cas incluent des deepfakes utilisés pour fabriquer des déclarations controversées de personnalités publiques, altérer des événements historiques, ou encore créer de fausses vidéos compromettantes pour nuire à la réputation de personnes ou organisations.
Dans des contextes fragiles comme celui du Mali, où les réseaux sociaux jouent un rôle clé dans la diffusion de l’information, ces outils risquent d’aggraver les crises existantes. Les tensions politiques et sociales, déjà alimentées par des discours polarisants en ligne, pourraient être intensifiées par des deepfakes créés dans le but de manipuler l’opinion publique ou de discréditer des adversaires. Surtout que la majorité des internautes ne sont pas conscients de ce qu’est un deepfake. Une enquête menée en 2022 auprès de 16 000 personnes dans huit pays (États-Unis, Canada, Mexique, Allemagne, Italie, Espagne, Royaume-Uni et Australie) a révélé que 71 % des répondants ignoraient ce qu’est un deepfake.
Une menace qui nous concerne tous
La lutte contre les deepfakes au Mali exige une mobilisation concertée de tous les acteurs. Il est crucial de sensibiliser les internautes aux dangers de ces contenus manipulés tout en leur apprenant à détecter les signes de falsification. Des campagnes éducatives doivent mettre en avant l’importance de vérifier les sources avant de partager des informations, afin de limiter la propagation de la désinformation.
Sur le plan légal, le Mali dispose de sanctions claires contre ces pratiques. Amadou Coulibaly, procureur au pôle de lutte contre la cybercriminalité, encourage les victimes à porter plainte. Il précise :
« En réalité, il s’agit d’une usurpation d’identité. Les personnes reconnues coupables risquent des peines allant de quelques mois à plusieurs années d’emprisonnement, voire des peines criminelles telle que la perpétuité, selon la gravité des faits. Les amendes, quant à elles, varient de 500 000 à 10 millions de francs CFA. Cela dit, c’est une lutte permanente : les cybercriminels développent constamment de nouvelles techniques, rendant difficile la mise en place d’outils capables d’éradiquer définitivement ces pratiques. »
Les médias jouent également un rôle fondamental. En adoptant des pratiques rigoureuses de vérification des contenus et en sensibilisant le public aux dangers des deepfakes, ils contribuent à renforcer la vigilance citoyenne. Un journalisme responsable et engagé est un rempart essentiel pour protéger la population contre ces formes modernes de manipulation numérique.
Les deepfakes représentent une menace majeure en manipulant l’information et en exacerbant les tensions sociales et politiques. L’éducation aux médias, accompagnée de sanctions contre la diffusion de contenus malveillants, est essentielle pour protéger la société. Une large sensibilisation de la population permettra de renforcer la vigilance et d’éviter la propagation des deepfakes.