Parmi les candidats au 1er tour des législatives, tenues le 29 mars dernier, un grand nombre était des jeunes. Anthropologue et chercheur, Boukary Sangaré, 33 ans, était candidat à Kadiolo, dans la région de Sikasso. Quelques jours avant le lancement de la campagne, il avait expliqué sur sa page Facebook pourquoi il s’engageait en politique. Cette interview a été faite avant le scrutin.
Benbere: Anthropologue et chercheur reconnu, pourquoi avez-vous décidé de passer dans « l’autre camp », celui de la politique ?
Boukary Sangaré : J’ai fait ce choix pour plusieurs raisons. J’ai beaucoup écrit sur les questions de sécurité et de gouvernance. Ces travaux de recherches sont faits et remis aux décideurs pour être appliqués et améliorer les conditions de vie des populations. Mais, le constat est que les décideurs ne les mettent pas en pratique. Ils les gardent dans les tiroirs et les choses ne changent pas. J’ai donc décidé être parmi les décideurs pour mettre au service du bien-être commun toute mon expérience. Une fois à l’Assemblée nationale, je pourrais beaucoup servir le Mali dans la Commission sécurité et défense.
Pour cette élection, beaucoup de jeunes sont candidats et vous en faites partie. Quelle lecture en faites-vous ?
Il faut avoir confiance aux jeunes. Les jeunes doivent avoir confiance aux candidats jeunes. Nous sommes l’avenir et avons l’habitude de le répéter. Mais nous sommes le présent aussi. Les jeunes constituent plus de 65 % de la population du Mali, il n’est pas possible de les mettre à l’écart de la gestion des affaires publiques. Un jeune au pouvoir prépare son propre avenir en travaillant pour le pays. Les jeunes n’ont pas d’argent, ils font valoir leurs idées contrairement à leurs concurrents.
Quelles sont les difficultés que rencontrent les candidatures jeunes ?
Récemment, l’Institut néerlandais pour la démocratie multipartite (NIMD) a commandité une étude qui a montré toute l’importance de la place qu’occupe l’argent dans la politique au Mali. Cette place de l’argent dans la politique est un lourd fardeau pour les candidats jeunes que nous sommes. Les grands partis politiques ont beaucoup de moyens. Ils mobilisent des fonds pour acheter les électeurs. Et jusqu’à présent, les électeurs se laissent acheter durant la campagne. La prise de conscience contre ces pratiques ne se fait surtout sentir que dans les grandes villes. D’ailleurs, j’invite les associations et organisations qui interviennent dans la sensibilisation contre ces pratiques à sortir des grandes villes et à occuper les campagnes. Au Mali, les gens votent surtout dans les campagnes. Bien que le Code électoral, qui est l’émanation des partis politiques et de la société civile, interdise aux candidats d’offrir des marmites, des T-shirts, mais les grands partis, dont je ne citerai pas les noms, violent ces dispositions dans la campagne.
Quel message avez-vous à lancer aux candidats, surtout jeunes ?
D’abord, j’invite les uns et les autres au respect du Code électoral. Son respect est l’une des conditions importantes pour la tenue du scrutin dans un climat apaisé. Aux jeunes candidats de croire en leur chance, de faire valoir leurs idées. Aux électeurs, je demande de privilégier les idées des candidats à la place de l’argent. C’est dans les zones de brousse qu’on peut voter jusqu’à 98%. Alors qu’ils soient conscients de leur choix le jour du scrutin.