Historienne, maîtresse de conférences à la School of Oriental and African Studies (SOAS, Londres), Marie Rodet, qui a longtemps travaillé sur la problématique de l’esclavage par ascendance au Mali, estime que la criminalisation de cette pratique est une condition sine qua none du développement socio-économique.
Depuis octobre 2018, plus de 1000 personnes sont officiellement déplacées dans la région de Kayes, au Mali, du fait de violences liées à l’esclavage par ascendance. Ces déplacements forcés sont largement moins médiatisés que les déplacements tragiques du nord et du centre du Mali, qui concernent plus de 240 000 personnes depuis 2012.
Certes les chiffres de Kayes, en comparaison, sont extrêmement faibles. Mais ces chiffres ne sont, en réalité, que la partie visible de l’Iceberg et cache un exode bien plus important et ancien lié à l’histoire de l’esclavage à Kayes. Cette longue histoire de déplacements forcés depuis le début du vingtième siècle est largement méconnue. La région de Kayes a en effet connu, depuis l’abolition coloniale de l’esclavage en 1905, une série de vague de migrations d’anciens esclaves et de leurs descendants pour échapper au joug de leurs maîtres qui, malgré l’abolition, continuaient de refuser de leur reconnaître le statut d’hommes et de femmes libres à part entière.
Lutte et résistance
A Kayes, ces hommes et ces femmes qui se sont levés contre l’esclavage pour réclamer leur liberté sont connus sous le nom de Diambourou. Mais cette histoire a été progressivement oubliée. Aujourd’hui, les jeunes générations à Kayes ne connaissent malheureusement le terme Diambourou que comme une insulte signifiant « broussards », vagabonds et autres personnes sans attache, ou encore « prostituées » quand il s’agit de filles.
La non-reconnaissance par les gouvernements coloniaux et postcoloniaux successifs des réalités de l’esclavage, à Kayes et dans d’autres régions du Mali, n’a pas permis de transmettre cette histoire importante de lutte et de résistance contre l’esclavage. Si cette histoire était mieux connue, les générations successives auraient les moyens de capitaliser sur ces luttes passées pour assurer la reconnaissance des droits humains de tout un chacun.
Aujourd’hui les personnes désignées comme « descendants d’esclaves » doivent encore lutter contre la discrimination et, dans certains villages, doivent même encore se battre pour ne plus être appelées « esclaves » par les autorités traditionnelles. Le nouveau mouvement Ganbanaaxu et son pendant malien le RMPF Gambana sont issus de cette volonté d’en finir avec l’esclavage chez les Soninké du Mali, de la Mauritanie, du Sénégal et de la Gambie. Mais ce problème est bien plus large que le seul cas des Soninké et les luttes contre l’esclavage ne devraient pas avoir à être menées à nouveau à chaque génération.
Tant que les autorités maliennes resteront dans le déni et refuseront de reconnaître ces atteintes aux droits humains pour ce qu’elles sont, en criminalisant l’esclavage par ascendance, les défenseurs de ce système féodal continueront à prétendre qu’il ne s’agit ici que de coutumes et non d’esclavage, et des personnes continueront à se faire discriminer et marginaliser socialement et économiquement au Mali sans que la loi ne puisse réellement les protéger.
Marginalisation sociale et économique
Du fait de ce manque de protection légale, les populations victimes d’esclave par ascendance n’ont bien souvent pas d’autres choix que d’abandonner le village où elles-mêmes ainsi que leurs ancêtres sont nés. A chaque fois, on retrouve le même mécanisme d’exclusion. Depuis le début du vingtième siècle, nombre de villages dans la région de Kayes ont ainsi été créés : les populations considérées comme « esclaves » décident de se rebeller contre ce statut et la discipline traditionnelle, mais les autorités traditionnelles leur retirent dès lors l’accès aux terres.
Leur seul moyen de survie est donc de partir pour vivre ailleurs. Mais, même dans ces cas, la réinstallation est souvent difficile. Qui peut les accueillir ? Comment peuvent-ils se garantir un accès à la terre ailleurs ? Comment échapper aux représailles et à l’hostilité des autorités traditionnelles quand on n’a pas les moyens de partir loin ? Comment ne pas retomber dans la discrimination et la stigmatisation dans le nouveau lieu de déplacement ?
Ces populations non protégées ou peu protégées par la loi, et leurs descendants, risquent donc, de continuer à être victimes de marginalisation sociale et économique malgré leurs déplacements, surtout quand les tensions pour l’accès aux terres s’accroissent du fait de la dégradation écologique, du changement climatique, et de la spéculation foncière. Si ces populations ne peuvent pas être soutenues, elles risquent donc de continuer à être vulnérables à d’autres formes d’exploitation, en particulier les femmes et les enfants, et de ne jamais réussir à sortir du piège de la pauvreté.
Criminaliser l’esclavage par ascendance au Mali, comme cela a déjà été fait au Niger et en Mauritanie, est donc à la fois une obligation morale et un gage de développement socio-économique pour le Mali.
Les hommes évoluent. Ce se disaient et était accepter il y a cent ou deux cents ans ne le sont pas aujourd’hui. Le mot esclave est gravé originellement. Il porte atteinte à la dignité humaine et à la liberté. Ce qui inadmissible pour un homme. Esclave n’a jamais été caste. Les Esclaves sont issues d’autres castes donc Esclaves ne peut pas constituer une caste. EN UN certain moment de l’histoire certains sont parvenus à dominer d’autres dans des contextes bien pas toujours honorables et honnêtes. On doit accepter aujourd’hui respecter la dignité de chaque être humain en en ne le traitant pas de sous-hommes par des propos ignobles, indignes et irréfléchis qui ne reposent le plus souvent sur aucune réalité de l’histoire