#MaliSansEsclaves : renouveler l’éducation des communautés sur les statuts
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#MaliSansEsclaves : renouveler l’éducation des communautés sur les statuts

Au Mali, l’école et les agents de l’enseignement traditionnel pourraient être des alliés essentiels dans la bataille contre la pratique de l’esclavage par ascendance. En renouvelant l’éducation des communautés sur les statuts surtout.

Les migrations punitives ou tactiques, sous le vernis de « villages de liberté », n’ont pas permis d’altérer la mémoire de l’esclavage. C’est la preuve que tout procédé autre que celui prenant en compte la dimension pédagogique de la problématique ne fera que déplacer le problème sans jamais le résoudre. Il faut renouveler l’éducation de la communauté, à travers les agents sociaux traditionnels, à travers les contes et les légendes pour jeter les bases d’une société égalitaire, comme le suggère l’écrivain et éditeur Ismaila Samba Traoré.

Beaucoup, aujourd’hui, se cramponnent à tel ou tel autre statut en en ignorant totalement les ressorts historiques. Les statuts ont beaucoup bougé dans le temps et dans l’espace, nous rappelle Ismaïla Samba Traoré, directeur des éditions La Sahélienne et longtemps chercheur à l’Institut des sciences humaines (ISH), à Bamako. Dans un long entretien qu’il nous accordé en janvier 2020, il proposait de revisiter le « roman national », d’intégrer cette histoire revue dans nos manuels scolaires pour construire une société égalitaire, fondée sur des valeurs mutuelles de respect et de fraternité.

Réécrire le « roman national » 

Lors du Symposium du mouvement Malivaleurs, en décembre 2018, le sociologue malien Bréma Ely Dicko avait proposé de réécrire le « roman national » pour construire un « ensemble national » dans lequel tous les Maliens se reconnaitraient. Cela permettrait de faire émerger d’autres récits, tout aussi glorieux, à côté des récits des dominateurs qui ont réduit les autres « mémoires » au silence par les structures sociales et idéologiques qu’ils ont imposées.

Il est temps de sortir des ghettos ethnique, clanique et tribal pour converger véritablement vers une nation au sein de laquelle chacun se reconnaitra désormais libre et fier. Donner à chacun la place qu’il mérite selon ses aptitudes humaines et non selon des prédispositions à la naissance.

Chaque malien infériorisé, réduit à l’état de « bête de somme », à l’état servile, est un obstacle à l’essor du pays, au progrès de l’humanité. Qui sait si le prochain Einstein tant souhaité ne viendrait pas de ceux qui, aujourd’hui, sont maintenus sous gage, faits esclaves et objets de désirs sexuels ? En ce moment, pourrons-nous nous revendiquer fièrement de lui ?

L’histoire confinée dans les « grandes cours »

Ce toilettage de notre passé est indispensable afin d’opérer le tri de nos valeurs, et nous départir de leur côté pervers. La pratique de l’esclavage perdure encore par ce que nous avons muselé l’histoire et refusé d’écouter les sources contradictoires. Comme cela est visible dans nos programmes scolaires, qui ne consacrent qu’à peine trois trimestres à notre histoire millénaire et tout le reste du temps à nous divertir avec des contre-vérités qui servent très peu dans la construction des citoyens qu’il nous faut véritablement. 

Tant que notre histoire commune restera confinée dans les « grandes cours », la chasse gardée de quelques privilégiés, il sera difficile de rompre les liens de l’asservissement. 

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