Santé sexuelle et reproductive : au Bénin, accès mitigé aux informations
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Santé sexuelle et reproductive : au Bénin, accès mitigé aux informations

Au 21e siècle et à l’ère du numérique, l’accès des jeunes à l’éducation sexuelle reste un défi au Bénin. La tendance dans les zones urbaines laisse penser que les adolescents sont mieux informés qu’hier. Mais le contraste est frappant.

Dans la plupart des régions du Bénin, l’accès aux informations liées à la santé de la reproduction est mitigé. En effet, la plupart du temps, ces informations sont réservées aux personnes adultes. Il y a d’importantes disparités entre les usagers des villes et des campagnes. Les citadins ont plus d’accès aux services de planification familiale, compte tenu du contexte socioculturel favorable à la contraception En milieu rural, le contexte est moins favorable.

Selon le rapport Les droits des mineures en matière de santé reproductive au Bénin, produit par le Centre pour le droit et les politiques en matière de santé reproductive (CRLP), basé à New York (États-Unis), en collaboration avec l’Association des femmes juristes du Bénin, « les mineures ne bénéficient pas dans les zones rurales et à faibles revenus du même accès aux services de santé à cause du problème de couverture et d’accessibilité financière. Cette couverture est insuffisante en qualité et en quantité, et les quelques services existants sont et demeurent des services destinés aux adultes ».

Le pari n’est pas gagné

En zone urbaine, où les populations profitent davantage des avancées de la technologie, aborder le sujet de la santé de la reproduction des adolescents et jeunes est plus facile. Les parents et autres éducateurs se voient contraints d’en parler au risque que les jeunes ne le découvrent par expérience. Mais le pari n’est pas encore gagné. Beaucoup ne sont pas réceptifs aux campagnes de sensibilisation et de plaidoyer des organisations nationales et internationales.

Dans les hameaux et régions reculées du pays, il n’est pas aisé d’avoir des informations sur la santé de la reproduction, en tant qu’adolescent.e ou jeune. Tout ce qui se rapporte à la sexualité est couvert par le manteau de la pudeur. Alors que de nombreux jeunes sont actifs sexuellement.

« La sexualité est considérée dans la cellule familiale en général comme une question tabou que parents et adolescents ne sauraient guère aborder dans le sens d’une préparation judicieuse à la vie sexuelle. Le manque de communication entre les parents et les enfants pousse ces derniers à la clandestinité », souligne le rapport du CRLP.

Briser le tabou

A Ouèdèmè, un village de la commune de Lokossa dans le sud du Bénin, de jeunes collégiens que nous avons interrogés assurent avoir déjà eu des rapports sexuels. Cependant, bon nombre d’entre eux n’ont pas une réelle connaissance sur la santé de la reproduction. A la question de savoir s’ils ont accès à des méthodes contraceptives, ces adolescent.e.s, dans la tranche d’âge de 15-17 ans, répondent qu’il n’est pas aisé d’aborder ce sujet en raison de restrictions socioculturelles et  le tabou qui entourent la sexualité.

Plusieurs organisations s’efforcent de mettre en place des outils auprès des institutions scolaires dans le but de faciliter l’accès à l’information aux plus jeunes. C’est le cas de l’Association béninoise du marketing social (ABMS), qui a installé des centres d’informations dans plusieurs écoles publiques à travers le pays. Ces efforts semblent freinés par les réalités sociales défavorables. Et les autorités ont du mal à changer la perception de la population sur la question.

Renforcer la sensibilisation

La sensibilisation devrait donc repartir à la base, c’est-à-dire vers les personnes adultes afin qu’elles puissent évoquer elles-mêmes ces sujets, ne serait-ce qu’en partie avec la jeune génération. Et éviter que les adolescent.e.s et jeunes s’exposent à des risques d’une sexualité précoce et irresponsable. Entre 2016 et 2020, plus de 9 000 cas de grossesses ont été recensés dans les établissements scolaires publics et privés du Bénin, suscitant l’émoi dans l’opinion publique.

Depuis 2003, le Bénin s’est doté d’une loi relative à la santé de la reproduction. Mais, force est de constater qu’elle est moins vulgarisée. L’article 5 de la loi No 2003-04 du 03 mars 2003, relative à la santé sexuelle et à la reproduction au Bénin, stipule : « Tout individu a le droit à l’information complète sur les avantages, les inconvénients et l’efficacité des services de santé sexuelle et reproductive, ainsi que sur les méthodes de planification familiale afin de faire un choix éclairé en toute connaissance de cause ».

Outre cette loi, l’Etat a mis en place plusieurs outils légaux pour faciliter l’accès à l’information. Il y a donc lieu de faire en sorte que cet accès soit coordonné et atteigne une cible qui en a véritablement besoin. La société rurale du Bénin est encore très conservatrice sur le sujet. Des obstacles perdurent dans la communication entre parent et enfant sur la santé de la reproduction.

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