Mali-Mètre : comment s’annonce la météo politique en 2024 ?
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Mali-Mètre : comment s’annonce la météo politique en 2024 ?

La météo politique annonce-t-il un ciel dégagé ou nuageux ? Un vent faible ou un orage violent ? Mamadou Sokona nous donne quelques éléments à la lumière du dernier Mali-Mètre de la Friedrich-Ebert-Stiftung (FES Mali). 

Le thermomètre s’est vraiment affolé ces derniers jours dans le district de Bamako et dans les régions, avec des températures qui affichaient entre 40 et 46°C, selon l’agence Mali-Météo. Au regard des décès enregistrés dans les hôpitaux, les Maliens restent inquiets quant aux prévisions météorologiques des prochaines semaines.

Ce tableau alarmant contraste avec l’optimisme affiché des Maliens globalement sur la marche de la transition, comme il ressort dans l’édition Mali-Mètre de 2024 dont les résultats ont été rendus publics le 22 mars dernier. Depuis, la température politique reste élevée car cette édition de Mali-Mètre a été très commentée. Ces résultats interviennent également dans un contexte politique fortement polarisé et marqué par un débat vif autour de la fin de la transition.

Comme à chaque présentation de Mali-Mètre, le débat est sans cesse orienté sur la méthodologie de la mesure de l’opinion avec des prises de position en faveur ou en critique des résultats de l’enquête. Or, le Mali-Mètre « Qu’en pensent les maliens ? », que le bureau Mali de la Friedrich-Ebert-Stiftung (FES Mali) réalise depuis 2012, « n’est qu’une cartographie des perceptions des populations maliennes à un moment déterminé, notamment celui de la collecte des données. Dans ce sens, les résultats ne sauraient être considérés comme des vérités absolues. »

Pourquoi les acteurs politiques et publics, fortement interpellés par les résultats, se mettent-ils à chercher une vérité là où il leur est demandé de prendre la mesure des préoccupations et des souhaits des Maliens ? Comment expliquer le satisfecit des Maliens quand, en même temps, leurs demandes prioritaires ne sont pas totalement prises en charge ?

Entre optimisme et réalisme

Les résultats de Mali-Mètre 2024 peuvent paraitre contradictoires, mais ils confirment également des tendances dégagées depuis le début de la transition. Le sentiment de rejet des acteurs politiques, en particulier des partis politiques, reste élevé tout comme l’adhésion à une transition dirigée par un militaire.

« Pour quatre Malien(ne)s sur cinq (81 %), la situation générale du pays s’est améliorée au cours des douze derniers mois », en particulier la situation sécuritaire pour 65% à travers la reprise de Kidal, le départ de la MINUSMA ou encore le partenariat avec la Russie. Toutefois, 61 % ont identifié la lutte contre l’insécurité/criminalité comme une priorité. L’optimisme reflète moins l’absence de défis que la confiance placée dans les autorités de la transition. En cela, le narratif sécuritaire cadre bien avec le profil des acteurs de la transition. Or, après le temps des armes, est venu le moment du dialogue pour, comme le recommande l’International Crisis Group dans son rapport de février 2024, trouver une « solution politique » afin de « consolider leurs récents gains militaires et améliorer leurs chances d’atteindre une stabilité politique durable au Mali. Elles [les autorités de la transition] remporteraient un succès historique en rassemblant et en réconciliant durablement les Maliens entre eux. »

Adhésion à la démocratie

La démocratie n’a pas bonne presse, elle est fondamentalement incomprise et certains activistes veulent faire de son rejet, sinon de sa critique, une ligne de clivage politique en lieu et place d’un projet de société. Or, les autorités de la transition se sont inscrites dans la refondation de la démocratie.

Pourtant, les Maliens ne sont pas pressés d’aller aux élections : « Quant à la tenue effective des élections en 2024, sept Malien(ne)s sur dix pensent cela improbable (32 % peu probable et 40 % pas du tout probable). » Et s’ils sont appelés à voter, ils y vont timidement comme au référendum de juin 2023 avec un taux de participation de 39%. Le défi reste énorme pour les partis politiques qui sont fortement interpellés, dans la mesure où 80% des Maliens sont insatisfaits de ces formations politiques : « 27 % plutôt insatisfaits et 53 % très insatisfaits », indique le rapport.

A l’opposé, « Parmi les acteurs de la transition, c’est le président de la transition qui a le plus la confiance des personnes interrogées. 86 % des personnes interrogées lui accordent la plus grande confiance parmi les acteurs de la transition. Seulement 6 % des Malien(ne)s font confiance au gouvernement de la transition et 1 % au Conseil national de transition. » La transition repose donc sur les épaules du président de la transition dont la popularité déséquilibre les relations avec les pouvoirs législatifs et judiciaires.

La météo politique annonce-t-il un ciel dégagé ou nuageux ? Un vent faible ou un orage violent ? « Les souhaits des Malien(ne)s sont relatifs au retour de la paix et de la sécurité (74 %) ; à l’emploi pour les jeunes (52 %) ; à de bonnes récoltes et la sécurité alimentaire dans le pays (45 %) ainsi qu’à la relance de l’économie (27 %). » Pour autant, ils ne perdent pas de vue les élections et dressent même le profil du président : « la confiance et la crédibilité du candidat (68 %) ; un patriote (44 %) ; le programme de développement proposé par le candidat (25 %). »

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