A la suite de l’interdiction de la consommation et la commercialisation de la chica au Mali, le blogueur Oumar Togo estime que cette décision du gouvernement devrait être élargie à d’autres produits aussi dangereux pour la santé.
Le gouvernement malien a pris la décision d’interdire, avec effet immédiat, ce lundi 15 août 2022, la consommation de la chicha et un délai de six mois a été donné pour mettre fin à sa commercialisation.
Une décision appréciée diversement : d’un côté ceux qui soutiennent que ce produit est en train de faire des ravages au sein de la jeunesse, et de l’autre ceux qui estiment qu’il n’y a pas que la chicha qui est nocive pour la santé au Mali.
Une question de santé publique
Aucun argument justifiant cette interdiction n’a été donné. « Je n’ai pas compris l’argument, à part un petit reflexe conditionné d’y voir les prémisses d’une opération de séduction des religieux et de légitimation du pouvoir en montrant qu’on sait répondre à ce qui alimente les paniques morales », estime un jeune bamakois, qui a requis l’anonymat. L’argument le plus récurent est celui des méfaits de la chicha sur la santé des consommateurs, qui est indéniable. Et selon l’Organisation mondiale de la santé (OMS), « le tabac pour pipe à eau présente une teneur en nicotine nettement supérieure à celle des cigarettes. Un foyer de tabac non aromatisé contient l’équivalent en nicotine de 70 cigarettes ».
Il est important de préciser que celui consommé au Mali est aromatisé. Et qu’il est sur le marché depuis peu, contrairement au premier tabac industriel : la cigarette. La nicotine n’est pas seulement dans la cigarette ou dans la chicha.
En 2001, le rapport préliminaire de l’enquête nationale tabac chez les adolescents en milieu scolaire au Mali relevait « que plus d’un tiers des élèves consommaient du tabac sous une forme ou une autre, 28% s’adonnaient à la cigarette et 11% à un autre produit du tabac ». Qu’en-est il de cette statistique au niveau de la cigarette seulement, bien avant l’avènement de la chicha ?
Si la santé publique se trouve être le fondement de cette décision, qu’en est-il des boissons dites énergisantes, différentes de celles qui sont énergétiques et qui inondent, depuis un certain temps, le Mali avec plus d’une vingtaine de marques ? Consommées à excès, elles peuvent entraîner une hypertension artérielle, le diabète, des soucis neurologiques ou cardiovasculaires, même des cas de décès…Ou encore de la boisson alcoolisée qui, selon l’OMS, « tue chaque année plus de 3 millions de personnes ».
Deux poids, deux mesures
La chicha est un produit très récent au Mali, contrairement à la cigarette produite par la Société nationale de tabac et allumettes du Mali (Sonatam). Et la réalité commerciale montre que même les fumeurs de cigarette s’adonnent à la chicha.
Et cela est loin d’arranger le géant du tabac au Mali qui, malgré la mention « Le tabac nuit gravement à la santé » sur ses paquets de cigarettes, ne semble point inquiété de la décision qui frappe aujourd’hui la chicha. Il y a deux poids, deux mesures.
Et puis le communiqué donne 6 mois pour les revendeurs pour se conformer à la réglementation.
Cela peut supposer que ce délai est donné pour permettre d’écouler le stock existant.
Maintenant à quoi sert ce délai si l’usage lui-même est interdit par le même communiqué ?
— Dou Niangado 🗯 (@DouNiangado) August 16, 2022
Ce tweet de Dou Niangadou décrit mieux l’ambiguïté face à laquelle on se trouve. Contrôler le marché afin d’éviter une économie parallèle comme celle de la drogue aurait été plus louable qu’une interdiction.
La commercialisation de la chicha a permis à plus d’un de se construire et/ou de se reconstruire. Nombreux sont ces jeunes qui ont pu avoir un emploi stable grâce à cela. Que leur propose en retour l’État, qui est garant de l’emploi pour tout citoyen ?
Rien que la santé