Au Mali, la création d’un Observatoire des frontières est l’une des recommandations des Assises nationales de la refondation (ANR). Pour le directeur de la police des frontières Youssouf Koné, il permettra « de [mieux] réfléchir sur la question des frontières et de leur gestion ».
Le Mali traverse l’une des pires crises sécuritaires de son histoire depuis 2012. Outre les frustrations provoquées par l’injustice, la corruption, les abus de pouvoir et les velléités indépendantistes, aujourd’hui les attaques qualifiées de terroristes contribuent à détériorer davantage la situation sécuritaire.
Dans l’optique de renforcer la sécurité, sur le plan national, il a été recommandé, lors Assises nationales de la refondation (ANR), la création d’un Observatoire des frontières.
Réfléchir sur la questions des frontières et de leur gestion
Le contrôleur général de police Youssouf Koné est le directeur de la police des frontières. Son département s’occupe de toutes les entrées et sorties du territoire malien. Pour lui, un Observatoire des frontières « est une entité mise sur pied pour réfléchir sur les questions de frontière et de leur gestion ». « Qui dit gestion des frontières parle de l’ensemble des mesures prises par rapport à la gestion intégrée des lignes frontières », ajoute-il.
La mise en place de cet Observatoire, selon lui, permettra de trouver des solutions aux problèmes qui troublent la vie des Maliens aujourd’hui. Il s’agit de « la crise sécuritaire aiguë » marquée par le « terrorisme » et la criminalité transfrontalière organisée.
« L’Observatoire permettra d’analyser les risques liés au déplacement des populations étrangères à nos frontières pouvant engendrer un conflit et de surveiller et collecter des renseignements sur les mouvements de personnes pouvant être des terroristes », soutient Oumar M. C. Koné, chef de la Mission d’appui à la refondation de l’État (Mare), l’organe chargé de l’application des recommandations des ANR. Quant au général Minkoro Kané, président de la Commission défense et protection civile du Conseil national de transition (CNT), il insiste sur le fait que cet Observatoire, comme l’Observatoire de la défense et de la sécurité, permet d’assurer une veille sur les menaces extérieures, alerter et proposer des solutions.
Moderniser le système
Comme tous les secteurs de la vie de la nation, la police aux frontières fait face à nombre de difficultés pour accomplir sa mission. Le premier défi, selon M. Koné, contrôleur général de police, demeure « la porosité » des frontières. A cela, s’ajoute la très grande étendue des lignes frontalières – le Mali étant un pays continental avec une superficie de 1 242 300 km2 entouré par sept pays – et les attaques qualifiées de terroristes perpétrées contre les postes de police, particulièrement au niveau des frontières. Mais aussi les conflits entre les communautés vivant le long des lignes frontières pour certaines ressources (points d’eau, champs).
Le Mali dispose officiellement de 19 postes de police frontières d’entrée, insuffisants pour couvrir le pays. « Pour combler ce déficit, il faut en créer plus. Le besoin estimé est d’au moins 60 postes de police d’entrée officielle équipés et interconnectés », soutient M. Koné.
Au niveau des postes de police frontières du Mali, les agents opèrent toujours de manière rudimentaire. A chaque passage, les données des voyageurs sont manuscrites dans un registre par les agents. « Aujourd’hui, huit postes sont équipés de kits Midas [système d’information et d’analyse des données sur la migration] qui ont la capacité de collecter, de stocker et d’analyser les informations sur les voyageurs en temps réel et sur l’ensemble d’un réseau frontalier », assure toujours le contrôleur général de police.
Le Midas est un système d’information sur la gestion des frontières (BMIS) convivial et personnalisable. Il permet aux États de surveiller plus efficacement ceux qui entrent et sortent de leur territoire, tout en fournissant une base statistique solide pour la planification liée à la politique migratoire.
Par ailleurs, pour rendre plus efficace l’Observatoire des frontières, Youssouf Koné invite les communautés aux frontières à alerter les autorités de tout mouvement suspect.