Le gouvernement malien a misé sur le respect des mesures barrières dans les différents établissements scolaires, à travers la distribution des masques, gels, kits de lavage des mains et la mise en place des comités de veille. Ces mesures sont respectées dans certaines écoles, mais pas dans d’autres.
Cet article a d’abord été publié, en avril 2021, par le journal L’Annonceur.
Dans le cadre de la réouverture des classes, le ministre de l’Éducation nationale, professeur Doulaye Konaté [il a été remplacé par Sidibé Dedeou Traoré] a décidé de la mise en place d’un comité de veille au niveau de chaque école. L’objectif pour lui était de veiller au respect des mesures barrières dans des établissements scolaires. Si ces comités existent dans nombre d’établissements scolaires du district de Bamako, les mesures barrières ne sont pas observées partout. Les raisons varient d’une école à autre.
A l’école fondamentale de Bozola (groupe scolaire Sega Diallo), sur la rive gauche, il n’y a qu’un seul kit de lavage des mains, pas de savon, encore moins d’eau. Interrogé, le directeur coordinateur du groupe, Aly Sidéye Touré, avance dans une classe de 9 année et appelle les « policiers », des membres du comité de veille au respect des mesures barrières. Avec leurs masques, 5 élèves répondent à l’appel. Mahamadou Cissé, l’un d’eux, explique : « Ici, dans chaque classe, il y a 5 policiers et tous sont volontaires pour rappeler aux autres élèves l’importance du respect des mesures barrières. Et même souvent aux professeurs qui entrent sans masque. Dès fois, il arrive que l’on mette certains dehors ».
Comités de veille plus ou moins motivés
Mais qu’est ce qui explique la présence d’un seul kit non équipé dans la cour du second cycle ? Le directeur coordinateur répond : « A la rentrée, nous avons été dotés de kits de lavage des mains, gels, masques par le CAP [Centre d’animation pédagogique] de Bozola. Depuis, plus rien. Au fil du temps, les gels et les savons sont finis. Nous avons continué à nous équiper avec nos propres moyens et l’appui des particuliers. C’est en voyant certains élèves emporter le savon et le manque de ressources que les kits ont été délaissés. Seuls les masques sont portés. »
Plus loin, sur la même rive, à l’école privée secondaire Bamakan Damba, à Hamdallaye ACI, dans la cour il n’y a aucun kit de lavage des mains. Mieux, des élèves ne portent pas de masque. Yacouba Keita, enseignant, confie qu’un comité de veille a été mis en place à la rentrée, et qui fonctionne. Mais, avec le temps, des objets (masques, savon, gels) distribués ont commencé à manquer. C’était difficile de vouloir imposer le respect des mesures barrières. « Néanmoins, nos salles sont grandes, la distanciation est un peu maintenue et des leçons font le rappel », dit-il. Aussi, faut-il relever que dans nombre d’établissements scolaires de cette rive, le constat est presque le même. Des comités de veille existent avec des membres plus ou moins motivés.
Raisons diverses
Au groupe scolaire de Sogoniko (groupe II), devant chaque classe, est posé un kit de lavage des mains. Aucun ne dispose de savons. Selon Bourama Mariko, directeur du second cycle du groupe III, l’école avait reçu des masques, gels, des kits et du savon. Les gels ont pu tenir un mois, de même que des savons. Certaines mesures ont été un peu délaissées, ce qui n’empêche pas jusque-là les enseignants de faire le rappel de temps en temps.
« L’école est à l’image de la société. D’une manière générale, il y a un relâchement du respect des mesures barrières au sein même de la population, ce qui pourrait expliquer l’augmentation du taux de contamination au virus. Au début de la maladie, les gens portaient des masques même dans les voitures. Mais c’est le contraire actuellement », déplore Modibo Camara, proviseur du lycée privé Tigana-Daliba, à la Cité Unicef. Dans son école, existe le comité de veille dont sont membres d’office tous ceux de l’administration. Certains enseignants du lot ne portent plus de masque. Donc, pour M. Camara, difficile pour les élèves de se soumettre.
« Une fois le comité mise en place, des kits reçus du CAP de Faladié, tous ont veillé au respect des mesures par les élèves. Des élèves étaient mis dehors pour absence de masque. Un second masque était offert à ceux qui en avaient un. Les renvois d’élèves ont fini par agacer des parents d’élèves qui ont haussé le ton. C’est pourquoi, actuellement, on se limite au rappel. Ce qui fait que les enfants ne portent plus de masque », ajoute Boubacar Coulibaly, surveillant général du même lycée.
Qu’est-ce qui empêche les élèves de respecter les mesures barrières ? Les raisons sont diverses. Les plus courantes sont, entre autres, que les kits de lavage n’ont plus de savon, les masques étouffent, plus précisément ceux distribués en classe.
Suivi des comités de veille des écoles
« Sur l’instruction du département de l‘éducation, nous avons ordonné à tous les directeurs de centre d’animation pédagogique, les chefs d’établissements, de mettre en place des comités de veille pour respecter les mesures barrières, plus particulièrement le port du masque », explique Youssouf Konaté, directeur adjoint de l’académie d’enseignement de la rive droite de Bamako. Au niveau fondamental, ce sont les CAP qui doivent veiller au bon fonctionnement des comités. Les missions de l’académie s’occupent du niveau secondaire public ou privé. Selon les dernières informations, la plupart des écoles font de leur mieux.
Youssouf Konaté ajoute : « En mettant en place des comités de veille, l’État a mis à notre disposition des masques que nous avons entièrement distribués entre les écoles. Au niveau fondamental, 434 000 masques ont été répartis entre les 7 centres d’animation pédagogique (CAP). Pour les établissements secondaires publics, c’est 14 000 masques, les secondaires privés ont reçu 200 sacs de 2000 masques, soit un total de 400 000. En gros, c’était 848 000 masques. » En ce qui concerne la qualité des masques, Youssouf Konaté précise que l’académie n’a pas effectué la commande, elle a juste distribué.
Par ailleurs, nos recherches restent vaines pour savoir s’il y aura, dans les jours à venir, d’autres distributions de masques, kits de lavage des mains, savons, gels de la part du ministère de l’Éducation nationale.
Du côté du ministre de la Santé et du Développement social, le chargé de communication, Markatié Daou, dira que son département a déjà distribué des kits à desination des écoles sans pour autant spécifier s’il y en aura d’autres.
Le moins que l’on puisse dire est qu’il est du devoir des membres des comités de veille des écoles de montrer l’exemple aux apprenants. Cela, en portant simplement leurs masques tout en rappelant constamment aux autres le respect des mesures barrières. Sinon au Mali, en plus des marchés, ce sont les écoles qui drainent le plus de monde et un relâchement à ce niveau ne pourra qu’empirer la situation épidémiologique du pays.
« Ce reportage est publié avec le soutien de JDH/JHR- Journalistes pour les Droits Humains et Affaires Mondiales Canada ».