Au marché de « Sougouni Ba », les usagers se plaignent des mesures préventives édictées dans le cadre de la lutte contre la Covid-19. Ils sont partagés entre doutes et angoisse quant à l’existence de la maladie. Les prix des produits alimentaires ont augmenté et certains commerçants sont sous le coup d’une menace de rupture d’approvisionnement.
À Mopti, il est 9 heures. C’est l’heure à laquelle la plupart des ménagères vont au marché pour s’approvisionner en condiments. Comme chaque jour, Oumou se prépare minutieusement sans oublier son masque. « Dieu seul sait qui est porteur du virus », lance-t-elle avant d’ordonner à sa fille de ménage de ne laisser personne rentrer chez elle en son absence.
La menace de la Covid-19 est passée par là. Le Mali a enregistré ses premier cas le 25 mars dernier et a atteint, à ce jour, la barre des 1000 cas positifs. Depuis la confirmation de cas positifs dans la région de Mopti, les habitants sont anxieux. Certains sont gagnés par la peur d’être contaminés, alors que d’autres craignent les conséquences sur leurs activités. Le risque d’une rapide contamination est très élevé dans la ville de Mopti, car rares sont les gens qui respectent les mesures barrières.
Temps d’incertitude
À Mopti, les populations sont partagées entre doutes et angoisse. Au marché «Sakarawel», communément appelé «Sougouni Ba», l’affluence est importante ce matin. Surtout un jeudi, jour de foire hebdomadaire de la ville. Situé en plein cœur de la ville, au quartier de Gangal, les étals se forment autour d’un bâtiment d’un étage. Ici, c’est le marché des femmes et on y vend toutes sortes de condiments.
L’actualité semble dominer par les cas positifs au sein de la ville. Pourtant, les comportements demeurent les mêmes. Le respect des gestes barrières fait défaut et les usagers ne cessent de se plaindre de cette situation : « Je ne nie pas que ce virus est chez nous, mais son existence me cause trop de problèmes. Maintenant que les frontières sont fermées, mon huile ne peut plus quitter la Mauritanie pour venir. Donc, il me faut vendre mon stock très cher pour pouvoir tenir avec ma famille en ces temps d’incertitude. Et si cela ne prend pas fin, bientôt je risque d’être au chômage », explique Oumar, un commerçant.
Oumar n’est pas seul dans cette situation. La plupart des vendeurs d’huile du marché sont confrontés à un risque de rupture d’approvisionnement. Korotoumou est une commerçante : « Il est évident qu’on ne peut pas baisser les prix, mes marchandises me sont envoyées depuis des pays frontaliers comme l’Algérie, la Mauritanie et autres, explique-t-elle. Maintenant qu’on n’a plus accès à ces pays, il nous faut vendre cher pour s’en sortir. Sinon, en réalité, je ne crois même pas à cette maladie. C’est juste de la politique et rien d’autre. »
« Pour le malheur de tous »
Les clients ne l’entendent pas de cette oreille. Ils demandent la baisse des prix des produits : « Je ne suis pas d’accord que les prix prennent l’ascenseur. Pour moi, c’est un abus », témoigne une femme habituée du marché de « Sougouni Ba ».
Le secteur informel est largement affecté à l’image des usagers du marché « Sougouni Ba » qui s’interrogent toujours sur la pertinence des mesures prises et la gestion de la crise sanitaire par les autorités publiques. Les vendeurs de poissons fumés se plaignent aussi, car pour eux « ce virus est là seulement pour le malheur de tous ». Mamadou, l’un des plus grands commerçants de poissons fumés, confie : « Les temps sont durs maintenant, car nos livreurs sont coincés dans leurs zones. Et pour survivre, ils empruntent les routes de trafic, courent des dangers énormes juste pour gagner leur vie. Et cela n’est pas facile, donc je prie l’État de revoir les choses et de prendre des décisions qui aident tout le monde sinon nous serons tous condamnés ».
Merci Haoussa pour ce bel article…