Ces derniers temps, les initiatives pour venir à bout de l’esclavage par ascendance dans la région de Kayes se multiplient. Même si ces démarches sont à encourager, l’application des engagements pris pour éradiquer ce phénomène tarde à voir le jour.
Après le forum sur l’esclavage organisé par les autorités récemment, un autre a eu lieu du 27 au 28 octobre 2021 à Kayes. Celui-ci a été organisé par l’Association Donko Sira, à travers le projet EMIFO, avec l’appui des autorités administratives. Les discutions menées lors de cette rencontre donnent une lueur d’espoir.
Il y a quelques années, parler de l’esclavage par ascendance était considéré comme un péché ou même un sabotage dans certains milieux. Aujourd’hui, cette question est de plus en plus abordée, preuve, s’il en est, d’une petite avancée dans la lutte contre cette pratique qui viole les droits humains. Mais, rien n’est encore gagné.
A l’issue du forum, 16 recommandations ont été faites par les participants. Parmi celles-ci, une demande d’application immédiate de la Charte de cohabitation issue du forum régional d’entente sociale du 18 août à Kayes, en exhortant les autorités et les élus à prendre des arrêtés municipaux, préfectoraux et ministériels. « Si les autorités mettent réellement en pratique toutes les recommandations faites dans les différentes rencontres sur la question de l’esclavage par ascendance, cette pratique ne sera qu’un souvenir », explique Ramata Sissoko, une des responsables des organisations féminines de la ville de Kayes.
Des signes d’espoir
Les partisans du jonya maintiennent leur position. Ils défendent cette pratique qu’ils considèrent comme culturelle, alors que de plus en plus de voix s’élèvent pour demander sa fin. Parmi ces voix, les organisations de la société civile et religieuses ainsi que les griots de Kayes.
Pour Mamadou Coulibaly, président des organisations de la société civile de Kayes, « le Haut conseil islamique doit mener des campagnes de sensibilisation auprès des communautés afin de mettre fin à la pratique de l’esclavage par ascendance au Mali », plaide-t-il.
Cet avis est partagé par l’imam Tidiane Diakité, l’un des membres du Haut conseil islamique de Kayes. Il appelle, pour sa part, à ne pas exclure des villages, notamment ceux qui refusent d’assumer le statut « d’esclave ».
Intensifier les campagnes de sensibilisation
La question de l’esclavage agace de plus en plus les autorités et les populations. Les actions de développement que menait la diaspora en faveur de certains villages ont pris un coup drastique à cause de profondes divergences entre les expatriés, les acteurs clés de ce développement pour leurs communautés.
Pour empêcher l’exacerbation de ce conflit, il urge de multiplier les campagnes de sensibilisation dans toutes les contrées de la région.
Cette démarche doit être entreprise par les leaders religieux en menant des discussions franches et ouvertes avec toutes les parties prenantes au conflit. Aussi, cela doit-il commencer dans les lieux de culte en condamnant publiquement cette pratique qui menace dangereusement la paix et le vivre-ensemble entre les communautés.
Préserver à tout prix la cohésion
Les défis sécuritaires auxquels notre pays en confronté, depuis 2012, ne laissent personne indifférente au Mali. D’ailleurs, le conflit lié à l’esclavage par ascendance a aussi occasionné plus de 3000 déplacés, qui ont fui les persécutions dans leur village pour avoir refusé d’assumer un statut « d’esclave ».
Face à cette situation, chaque habitant de la région de Kayes doit œuvrer à promouvoir la paix et la cohésion sociale pour éviter le chaos en privilégiant le dialogue. Dans cette mission, toutes les couches de la société doivent être associées pour mener à bien cette mission avant qu’il ne soit trop tard.