Depuis la fermeture des écoles en raison de la Covid-19, c’est la galère pour les enseignants du secteur privé. Pour les plus précaires, la situation est intenable.
Ibrahim D. a vingt-cinq ans. Après son admission au bac en 2014, il quitte sa ville natale de Nioro du Sahel, dans la région de Kayes, afin de poursuivre des études en philosophie à Bamako. Après trois ans d’études, il obtient en 2017 une licence en philosophie générale. En raison de sa situation familiale, il décide de ne pas poursuivre ses études. Il opte pour l’enseignement dans un lycée privé de Badalabougou.
Marié en mars 2019, il fait venir sa femme dans la galère bamakoise. Depuis la fermeture des écoles, il traverse une situation difficile comme bon nombre de ses collègues évoluant dans le secteur privé.
Salaire insuffisant
À Badalabougou, un quartier populaire sur la rive droite du fleuve Djoliba, il loue une chambre unique à 15 000 francs CFA. C’est là qu’il vit avec sa petite famille. Il donne mille francs au quotidien comme prix de condiments, alors qu’il n’a pas de salaire fixe : « Le salaire varie selon le nombre d’heures effectuées. Nous n’avons pas de salaire fixe. Il y a toujours des imprévus qui font que le salaire n’est pas constant », précise-t-il.
Le jeune enseignant pouvait gagner, en moyenne, 25 000 francs CFA par mois. Mais, avec la survenue de la pandémie de Covid-19 et la fermeture des écoles, il se retrouve sans source de revenu. Cette somme lui permettait au moins d’assurer les charges de sa petite famille. Aujourd’hui, c’est à travers les dettes et les aides de personnes de bonne volonté que le jeune enseignant entretient sa petite famille.
Sa femme a abandonné l’école après avoir contracté sa première grossesse. Elle était en classe de 9e année à l’époque. Aujourd’hui, elle n’exerce aucune activité génératrice de revenus. Les charges familières reposent sur les épaules, frêles, de son mari.
Le salut par un deuxième métier
Si Ibrahim D. n’évolue que dans l’enseignement privé, qui ne dépend que de la subvention de l’État, ce n’est pas le cas pour certains de ses collègues. Son ami, Seydou S., enseigne lui aussi la philosophie dans un établissement privé. Mais, il ne se limite point à cette seule occupation. Il évolue aussi dans le domaine de la location de véhicules et est rédacteur pour un journal de la place. La crise sanitaire a eu moins d’effet sur lui. Il paie soixante-quinze mille francs pour la maison qu’il loue, sans compter les frais d’électricité et d’eau, entre autres charges.
Avec cette réouverture partielle des écoles, on espère qu’elle profitera davantage à nombre d’enseignants vacataires des établissements du secteur privé pour sortir de cette situation déplorable. En attendant, certains ne voient même pas la queue du diable, à plus forte raison la tirer.