La période caniculaire bat son plein et l’affronter n’est pas une mince affaire. Le blogueur Michel Yao, qui réside à Kayes, nous parle de l’enfer que vivent les habitants de cette ville à chaque période de chaleur. Pour lui, le climatiseur doit être à la portée de tous : loin d’être un luxe, il est une nécessité plutôt.
A Bamako, la blague est connue de tous ou presque : la chaleur est si intense à Kayes qu’en mai le margouillat ne traverse pas la rue en pleine journée, craignant de voir son ventre s’éclater sous l’effet de la chaleur du sol. D’avril à juin, c’est en effet la période la plus chaude à Kayes, première région administrative du Mali. Le vent chaud et sec qui souffle est difficile à supporter. Le seul moyen de se mettre à l’aise est l’acquisition d’un climatiseur. Mais le problème est que tout le monde n’a pas les moyens de supporter le coût de l’électricité pour l’avoir chez soi à la maison. Beaucoup de Kayesiens aisés financièrement choisissent ce moment pour prendre des vacances ailleurs : Dakar, Paris, Abidjan …
D’autres habitants trouvent leur salut dans des partie de baignade dans le fleuve Sénégal, qui traverse la ville. Dans certaines localités du Mali, il fait certes chaud dans la journée, mais la température au coucher du soleil est clémente, contrairement à Kayes où elle est épouvantable de jour comme de nuit.
Sous-sol riche et coupe abusive du bois
Certaines voix affirment que cette chaleur, en partie, est due au fait que le sous-sol kayesien abrite d’importants gisements (or, fer etc.). L’autre aspect est la coupe abusive du bois, qui fait place à la déforestation. « Il y a quelques années, on voyait un peu de verdure à proximité de la ville, mais elle a disparu à cause d’un manque de vision pour la sauvegarde de notre écosystème », reconnaît un ex-élu local, qui parle d’une destruction massive des forêts sans en mesurer les conséquences.
La canicule a des répercussions négatives sur notre santé. Chez les enfants, il y a des anomalies qui apparaissent sur le corps, selon Dr. Diallo Mamadou, médecin chef à l’Institut national de prévoyance sociale de Kayes. Une température élevée peut entraîner des pertes de connaissance lorsque la déshydratation a atteint un certain niveau chez certaines personnes. Dans nos rapports sociaux, les mauvaises humeurs sont fréquentes.
En dehors de l’aspect sanitaire, il y a aussi un manque à gagner sur le plan professionnel. Les travailleurs s’épuisent vite et cela peut agir sur le rendement.
La glace devient un trésor à tel point qu’elle se vend souvent chère en fonction de la localité. L’unité peut être vendue à un prix qui varie entre 50 et 500 FCFA. La demande est forte et devient du coup un business fleurissant pour les revendeurs qui les chargent sur des grosses motos et partent les revendre à des endroits beaucoup plus rentables comme sur les sites d’orpaillages traditionnels.
Les vieillards et les enfants plus exposés
Avec tout cela, peut –on vraiment dire que le climatiseur est un luxe ? Je dirais non, c’est plutôt une nécessité pour tous les habitants de ma ville. Dans d’autres villes aussi, c’est important pour tout le monde mais je parle principalement de Kayes car la chaleur, ici, ce n’est pas du jeu.
Quand cette saison arrive, les personnes âgées et les enfants, à cause de la déshydratation et leur fragilité sont les plus exposés. Il n’est pas rare de voir que les vieilles personnes meurent facilement si une certaine commodité n’est pas à leur portée. Boire régulièrement de l’eau ou des boissons non alcoolisées est fortement recommandé par les médecins. Je pense qu’à l’hôpital, les médecins devraient recommander aussi le climatiseur à chaque habitant. Pour ceux qui connaissent la chaleur de Kayes, c’est une nécessité et non un luxe. Et l’État aussi pourrait faire en sorte de subventionner le climatiseur pour que le prix soit abordable pour les populations.