Plusieurs artisans maliens ont été sollicités par l’Assemblée permanente des chambres de métiers du Mali (APCMM) pour la confection d’un million cinq cent mille masques. Le retard dans le payement a provoqué la colère chez certains artisans. Les malentendus n’ont pas manqué.
Vendredi 10 avril 2020, le président malien Ibrahim Boubacar Keita, lors d’une adresse à la nation, annonçait l’opération « un Malien, un masque » dans le cadre de la lutte contre la pandémie de Covid-19. Le Mali a enregistré ses premiers cas le 25 mars 2020. L’Assemblée permanente des chambres de métiers du Mali (APCMM), qui avait déjà un projet de confection de masques lavables, a sollicité plusieurs artisans.
La structures a rapidement lancé un appel à candidatures dans la dernière décade du mois d’avril 2020. « Après l’appel à candidatures, il a fallu déterminer quelques critères de choix. Il s’agissait de prioriser les artisans professionnels et les ouvriers qualifiés », explique Baba Djittèye, vice-président de l’APCMM.
Impatience des artisans
Les artisans bénéficiaires, qui n’ont pas encore reçu leur argent, continuent de dénoncer ce retard. Le samedi 13 juin 2020, Moussa Fané, couturier au grand marché de Bamako, est resté devant la comptabilité de l’APCMM pendant 4 heures, avec plusieurs autres collègues : « J’ai eu le contrat de confection de 3 000 masques au début du mois de ramadan. Mais jusqu’à présent, je n’ai pas encore été payé. Nous n’avons aucune information, c’est pourquoi je suis là aujourd’hui encore, comme chaque jour. »
« Chaque fois, ils nous disent qu’ils vont nous appeler, et personne ne reçoit d’appel de leur part. C’est ce qui nous oblige à venir chaque jour. Si un ouvrier gagne un tel marché, il s’endette pour pouvoir trouver les matières premières, et il est obligé de mentir chaque jour aux créanciers avant que la situation ne soit réglée », indique Ibrahim, un autre tailleur.
Pour le vice-président de l’APCMM, les artisans n’ont pas été patients en fonction des termes du contrat. « Si tu dis à un “assoiffé“ de patienter, il finira par perdre patience. Un nombre fixe de production n’a été imposé à aucun bénéficiaire, ni par région, ni par artisan. Ce sont eux qui se sont prononcés, chacun, sur le nombre de masque qu’ils peuvent produire dans un délai de trois jours », explique Baba Djittèye.
Délai non respecté
Le prix unitaire pour la confection des cache-nez est de 500 francs CFA, dont 450 francs CFA pour l’ouvrier et le reste va à l’APCMM. Les conditions de payement étaient définies dans le contrat : « L’artisan sera payé par l’APCMM après livraison (…) », stipule l’article 6 du contrat. Le virement n’a pas été fait sur le compte de la chambre des métiers dans le délai indiqué, selon M. Djittèye. Ce qui a causé un retard dans le payement. « L’État a des exigences financières pour les marchés publics qui prennent souvent un peu de temps. Il n’était pas possible de payer les artisans au même moment où la livraison a été faite », ajoute M. Djittèye.
Selon l’APCMM, avec la pression des bénéficiaires à la veille de la fête de la rupture du jeûne, les responsables ont jugé nécessaire de payer 25% pour l’ensemble des fournisseurs. Ceux dont le montant ne dépassait pas 650 000 francs CFA ont reçu la totalité. Oumar Camara, un couturier à Sénou, fait partie de ce lot : « Je m’étais engagé à produire 1000 masques, ce qui fait 450 000 francs CFA. J’ai été payé deux jours après la livraison », témoigne Oumar.
Cependant, sur 1 500 000 masques confectionnés, il reste seulement la facture des 500 000 masques à régler, selon Djittèye. Les payements se poursuivent au niveau de la comptabilité, ajoute-t-il. Dans le cadre du contrat qui lie l’APCMM aux artisans, la communication a fait défaut. Ce qui a donné lieu à des malentendus. Pour de futurs projets, il est salutaire d’organiser un atelier, en amont, pour bien expliquer aux artisans l’opération dans ses moindres détails.