A Goundam, des femmes organisées en groupement féminin s’investissent de plus en plus dans le maraîchage bio. Elles contribuent ainsi à la sécurité alimentaire dans leurs localités respectives, selon le blogueur Almoudou Mahamane Bangou.
Nous sommes à Goundam, à environ 81 km de Tombouctou. Un cercle où s’étendent des lacs connus :Télé, Faguibine, Horo, Fati, etc. Ici, l’agriculture, l’élevage et la pêche sont les activités principales des populations. Les femmes rurales sont partagées entre travaux ménagers et extra-ménagers : entretien de la famille, corvée d’eau, recherche du bois, vente du lait, etc. Celles en milieu urbain s’adonnent à des activités génératrices de revenus : petit commerce, vente d’aliments, restauration, coiffure, aux bénéfices souvent précaires et insuffisants.
A Goundam-ville, je suis ébaubi de découvrir que les femmes sont désormais à pied d’œuvre pour le changement de la donne. Elles décident de se rassembler et s’organiser en groupement : une vie collective, des intérêts communs. Si certaines axent leur groupement sur la caisse d’épargne à travers la tontine, d’autres, par contre, sont constituées en groupement de productrices : des amazones nourricières attachées à la culture de la terre à travers la pratique du maraîchage bio. L’accès des femmes à la terre est désormais une réalité dans notre cercle.
Petits moyens, grandes réalisations
A M’Bouna, une des 16 communes du cercle de Goundam, située à environ 68 km du chef-lieu de cercle, mon attention est attirée par un gigantesque périmètre maraîcher. Les clôtures sont des ramures d’arbres et d’épines, aucun bassin d’eau, aucune motopompe, ni de canaux. Il dispose d’un seul puits sur lequel deux femmes tirent la puisette. Ici, elles tablent sur la force de leurs muscles pour puiser de l’eau et arroser. Tout y est fleurissant.
Pourtant, cette commune n’est plus desservie en eau du lac Faguibine depuis trois décennies à cause de l’obstruction des chenaux d’alimentation. L’accès à l’eau, l’usage des puisettes et les conséquences environnementales de la fuite des substances gazeuses constituent, entre autres, des difficultés auxquelles les maraîchères de M’Bouna sont confrontées. Soumbou Mahamadoune, présidente de l’association Dagaïna de M’Bouna, pratique le maraîchage depuis plus d’une décennie. « Le maraîchage est pour nous source de revenus, a-t-elle confié. C’est pourquoi nous le pratiquons depuis des lustres. Nous y cultivons de l’échalote, des betteraves, des choux, de la laitue, de la pomme ainsi que d’autres cultures vivrières et avec un rendement qualitatif. Le creusement de puits pour nous approvisionner en eau constitue l’une de nos difficultés. Nous vendons nos récoltes ici ou les acheminer vers les contrées voisines. Les revenus sont utilisés pour la réhabilitation du puits.»
Le défi de la transformation
Dans cette zone sahélienne où la mobilité n’est pas facile, les contrées distantes les unes des autres, leurs récoltes ne sont pas écoulées à hauteur de leurs souhaits. Les femmes n’ont pratiquement pas bénéficié de formation adéquate pour la transformation et la conservation des produits maraîchers. A M’Bouna, les maraîchères sont dans le besoin d’infrastructures de base (puisards, bassins d’eau, clôtures en grillage, canalisations, motopompes, produits agricoles, etc.)
Ramata Alkalifa est la présidente de la coopérative Aldjanabangou, regroupant plus de 70 femmes et 5 hommes. Ils exploitent un périmètre maraîcher de plus de 5 hectares. Ils y cultivent diverses variétés de culture vivrière. « A la récolte, on ôte le quota de la coopérative. Après, nous procéderons à la transformation de la tomate, de l’échalote, l’oignon, le chou, la betterave, la carotte dans nos magasins. Nous le vendrons et le revenu est versé dans la caisse. Ensuite, l’autre quota de la récolte revient aux membres », explique la présidente.
Résorber le chômage
Agée d’une soixantaine d’années, Houmé Moussa est aussi membre d’un autre groupement féminin producteur. Pour elle, le maraîchage est un travail de longue haleine, mais une alternative. « Le maraîchage est dur, très dur et demande non seulement des moyens mais aussi de la patience. Grâce au maraîchage, je parviens à subvenir aux besoins de ma famille, de mes enfants et même petits enfants », a-t-elle dit, le sourire aux lèvres.
Je suis impressionné par ces vaillantes femmes dont la plupart sont âgées de 50 à 70 ans et qui, malgré le poids de l’âge, la fraîcheur et le changement climatique, s’adonnent à la pratique du maraîchage, de jour comme de nuit.
Il faudrait que les ONG redoublent d’ardeur pour doter ces groupements féminins d’infrastructures basiques, notamment les clôtures en grillage, puisards maraîchers, motopompes, forages.
Investir dans le maraîchage peut contribuer à lutter contre l’insécurité alimentaire et de résorber le chômage. C’est aussi une façon simple de lutter contre le changement climatique.