#SiraKura : carte nationale d’identité biométrique sécurisée, risques calculés ?
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#SiraKura : carte nationale d’identité biométrique sécurisée, risques calculés ?

Les autorités maliennes viennent d’engager un pas important dans l’institution de la nouvelle carte nationale d’identité. Mais cette initiative n’est pas sans risques dans notre contexte.

D’une simple carte en papier, avec une photo d’identité collée, les autorités maliennes optent désormais pour une carte d’identité biométrique sécurisée fabriquée à partir d’une matière plastique en polycarbonate, conformément aux normes techniques de la Communauté économique des États de l’Afrique de l’Ouest (Cedeao). À la lecture du décret du 3 novembre 2022, on constate que la nouvelle carte d’identité aura l’avantage de comporter des données biométriques (empreintes digitales ; photos d’identité numérisées) et de présenter des informations supplémentaires, notamment le numéro d’identification nationale (NINA).

Dans le contexte sécuritaire de notre pays, l’identification des citoyens dans une base de données accessible et sécurisée constitue un grand atout pour les services étatiques. Elle permet de connaître chacun et faciliter ainsi les procédures d’enquêtes sécuritaires sur les individus. L’institution d’une carte d’identité biométrique se présente, alors, comme une opportunité d’embarquer notre pays dans le train de l’évolution numérique avec ses possibilités nouvelles.

Problématique du Nina

Cela dit, elle comporte de grands risques dans un pays où l’administration publique souffre viscéralement de défaillances techniques et trouve les moyens, sur chaque petite faille, de tirer gain d’un système de corruption opportunément installé.

Depuis l’avènement du Ravec (Recensement à vocation d’état civil), les Maliens souffrent sans répit du problème d’erreurs portées sur les renseignements Nina. D’aucuns ont, d’emblée, perdu ou manqué des opportunités en s’épuisant dans les inaboutissables procédures de correction ; d’autres ont dû passer par le système pratiquement obligatoire des « à-côtés » en offrant quelques billets d’argent par-ci par-là ou en exploitant des relations de proximité familiale, professionnelle ou politique pour corriger les leurs.

Ce sont bien ces mêmes renseignements erronés qui seront sollicités pour être portés sur la nouvelle carte d’identité. À moins qu’il y ait une volonté manifeste de préserver le système de corruption (se prêter à offrir des billets d’argent à des agents publics pour passer outre ces erreurs), l’opérationnalisation de la carte d’identité biométrique ne doit aucunement se faire sans, au préalable, une vaste opération réussie de correction d’erreurs sur les renseignements NINA.

Un système de paiement en amont ?

Pour pallier les risques de détournement, a-t-on pensé à un système de paiement en amont ? Il serait juste à propos de s’inspirer du système actuel d’établissement des passeports : payer les frais dans une banque et présenter le reçu fourni aux services d’établissement de la carte, en l’occurrence les commissariats de police, les brigades de gendarmerie et les sous-préfectures. Cela évitera certainement une perte de fonds ainsi que les actes de surenchère malicieusement organisés.

Notre administration publique est connue pour les failles techniques sur les outils informatiques : toujours en panne ! Comment pouvoir alors, dans le besoin, se faire établir sa carte biométrique en cas de panne informatique ? Sachant que la résolution des pannes dure des semaines et des mois dans ce pays !

Aussi, l’une des difficultés jadis liée à l’obtention des cartes NINA était due à la quasi impossibilité de se procurer une nouvelle, en cas de perte ou de brisure. Ni possibilité de se faire établir une nouvelle, ni possibilité d’obtenir un document en tenant lieu. Un risque se situe bien à ce niveau. Pour les cartes nationales d’identité biométriques, il faudrait assurer la mise en place d’un système efficace de remplacement et/ou de renouvellement.

En considérant tous ces aspects, il faudrait, dès lors, pour l’institution des nouvelles cartes nationales d’identité, tirer les leçons et enseignements des expériences passées pour enfin offrir aux Maliens une pièce d’identité fiable, sécurisée et accessible.

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