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Le mendiant, entre dérangement et utilité

Les mendiants sont un peu partout dans les grandes villes. Nous les rencontrons devant nos maisons, dans la rue, dans les quartiers. Parfois, leur présence dérange à cause de leur nombre et aussi l’insistance de certains à quémander. Par contre, il nous arrive de les rechercher afin de leur faire des offrandes nécessaires à la résolution de nos problèmes.

Les mendiants sont considérés comme étant de la couche sociale des nécessiteux. Ils sont des indigents, c’est-à-dire qu’ils ne disposent pas de moyens suffisants pour se nourrir, se loger et se soigner en cas de maladie. Au Mali, il est difficile de trouver des statistiques sur la population mendiante.

Si autrefois la mendicité était pratiquée par les talibés ou les personnes invalides et handicapées, de nos jours elle est devenue une pratique valable pour tous. Les jeunes, les vieilles personnes et les mères de jumeaux (mendicité gémellaire) s’y adonnent. Avant, elle était pratiquée uniquement dans les quartiers. Les mendiants venaient s’arrêter devant les concessions, surtout aux heures de repas, dans le but d’obtenir à manger. Certains s’installaient devant les lieux de culte attendant la sortie des fidèles après les prières.

Aujourd’hui, les mendiants se multiplient sur les grandes artères et circulent entre les voitures dès que celles-ci s’arrêtent, notamment aux feux tricolores. Le petit Hamadi Bah, qui n’a que 7 ans, est un talibé que j’ai rencontré une fois dans la circulation. Il raconte que lui et beaucoup d’autres enfants ont été confiés à un marabout afin d’apprendre le Coran. Ce dernier, n’ayant pas les moyens de les nourrir, les a envoyés mendier. Outre le fait qu’ils doivent trouver manger, il est exigé des talibés q’ils rentrent avec une certaine somme. Lorsque je lui ai demandé le montant en question, il a refusé de le dire.

Sanctions prévues par la loi

Selon M. Touré, assistant de recherche à la Faculté de droit de Bamako, le phénomène de la mendicité devient de plus en plus inquiétant dans notre pays malgré des sanctions prévues par la loi.  Le code pénal, dans son article 193, précise en effet que « toute personne valide et majeure qui se permettrait de mendier sur la voie publique sera punie de quinze jours à six mois d’emprisonnement ».

Il ajoute que seront punies des mêmes peines les personnes invalides qui, pendant la durée de leur séjour dans les formations hospitalières ou charitables, auront été trouvées mendiant dans les lieux publics.

Quel que soit le cas, l’incitation à la mendicité est interdite. L’enseignant soutient que si la personne incitée à la mendicité est un enfant mineur, le coupable sera puni de trois mois à un an d’emprisonnement. Par ailleurs, l’article 183 du code pénal met en garde les mendiants invalides de certains comportements : « Tout mendiant, même invalide, qui aura usé de menaces ou injures ou qui entre sans permission et contre le gré du propriétaire ou des occupants de la maison, dans une habitation, dans un enclos en dépendant, sera puni d’un emprisonnement de quinze jours à six mois ».

Rares sont les citoyens qui sont au courant de ces dispositions de la loi malienne. Les quelques-uns qui sont informés se demandent comment ce phénomène se répand aussi rapidement sans qu’aucune disposition ne soit prise par les autorités.

Actions contre la mendicité

Un cadre du ministère de la Solidarité et des Personnes âgées raconte que dans le passé, des dispositions avaient été prises afin de les chasser des grandes avenues. Les actions entreprises n’ont pas été maintenues et les mendiants sont revenus s’installer aussitôt que possible.

Un usager de la route se plaint de leur nombre qui devient encombrant. Selon ce dernier, dès que vous vous arrêtez aux feux tricolores, les mendiants ne font que circuler sans arrêt jusqu’à votre départ. Ils ne font que se suivre devant la vitre de votre véhicule. A chaque fois, vous êtes obligés de faire le même geste : secouer le doigt et la tête en signe de négation. Il vous arrive de vous lasser et de les ignorer.

Même lorsque vous êtes à la maison, il y a des jours où les mendiants se succèdent devant votre maison. Si les plus vieux se contentent de dire « dâ la garibou » (« un mendiant est à la porte »), les plus jeunes se mettent à chanter à haute voix de sorte que vous êtes obligés de leur donner quelque chose afin qu’ils s’en aillent.

A la recherche des mendiants

Malgré leur présence souvent dérangeante, il arrive des fois que certains aillent à la recherche des mendiants cependant. L‘absence des mendiants empêche d’agir ceux qui désirent s’acquitter de leurs sacrifices ou qui croient aux vertus de la charité envers les démunis.

Tounkara, un homme d’affaires, raconte qu’il a prévu un budget de 2000 F CFA par jour pour les mendiants. Selon lui, cela le protège des mauvais sorts qui peuvent réduire ses chances d’obtenir plus de contrats. Il ajoute que son marabout lui recommande de toujours faire l’aumône, afin de se mettre à l’abri des évènements malheureux tels que les accidents, les vols et même les maladies graves. Aussi, beaucoup de personnes ont pris le pli d’aller, chaque vendredi matin, prier sur la tombe de leur défunt et distribuer par la suite des aumônes aux mendiants. C’est ce qui explique la présence d’un nombre élevé de mendiants devant les cimetières les vendredis matin.

Ces cas montrent à quel point les mendiants peuvent avoir une « utilité » à certains moments. Mais il reste que l’objectif ultime de toute société doit être de permettre à tous les hommes et femmes qui y vivent d’être à l’abri du besoin.

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Les commentaires récents (2)

  1. Benbere est une meilleure plateforme , il la fallait vraiment la créer car elle permet à la jeunesse de s’exprimer sur tous les sujets sans tabou et de connaître les cultures du Mali.
    Bonne continuation !

  2. Article interessant, notamment par le fait qu’il montre que la mendicite n’est pas autorisee par la loi. Cependant, il serait interessant d’examiner aussi si la pratique est autorisee par la religion musulmane, auquel cas le verset du Coran ou le hadith qui l’autorise. Ensuite voir dans la charia, la legislation islamique, comment la mendicite doit se pratiquer. Dans tous les pays du monde, il y a la mendicite, mais au Mali, il semble que le phenomene est exagere. Est ce parce que nous pensons que nous somnes plus musulmans que les autres, ou c’est une meconnaissance de la religion musulmane?