Dans beaucoup de nos sociétés, on se rapproche pour mieux être ensemble. En milieu tamasheqs, vous verrez que les tentes sont au contraire éloignées les unes des autres. Mais les populations sont malgré tout très proches (du cœurs), nous apprend le blogueur Yousouf Cissé, issu de cette communauté.
Je vous avais déjà dit dans un billet qu’en milieu tamasheq, c’est la femme qui choisit son mari. Eh bien, apprenez aussi, pour ceux qui ne le savent pas encore, que dans ce même milieu les gens vivent par groupes, éloignés les uns des autres. Une façon de préserver leur intimité familiale, mais aussi de rester à l’abri ou de ne pas s’attirer des regards envieux.
Dans cette communauté, bien connue comme étant nomade, c’est toujours chacun de son côté, dans sa case ou sous sa tente éloignée, mais en ayant un regard attentif de solidarité et de compassion à tout ce qui peut toucher l’autre.
Se rendre visite et prêter l’oreille
En ville, par exemple, je constate que des voisins séparés par un seul mur peuvent passer des semaines sans échanger une poignée de main. Il y a également des communautés qui préfèrent vivent très proches dans les villages par groupes de grande famille. En milieu tamasheq, l’adage dit : « Ce n’est pas la proximité qui fait l’essentiel, mais plutôt le degré d’amour qu’on a pour son prochain. »
Je me rappelle de ces tournées nocturnes ou très matinales que je faisais avec mon père entre différents hameaux. Mais ce que je ne comprenais pas, c’était que mon père était toujours au courant de la moindre nouvelle avant qu’on arrive, même celle concernant le dernier agneau qui était né la nuit précédente. Un jour, je lui ai demandé comment il faisait pour être aussitôt au courant de ce qui se passait ailleurs, bien que nous soyons éloignés des autres. Il m’a simplement dit que les cœurs sont proches et que c’est le plus important. On peut, donc, savoir ce qui se passe ailleurs si on prend la peine de toujours se rendre visite ou si on prête l’oreille.
Le domaine privé est sacré
Mon père m’a dit ensuite de faire attention à ne pas faire à l’autre ce que je ne voudrais pas qu’on me fasse. Une maxime que j’avais déjà entendue. « Pour nous, les relations familiales sont sacrées », m’a-t-il dit. Bien qu’on s’informe du moindre détail chez les autres, il y a des choses qu’on n’essaie pas de savoir tant qu’on n’en est pas informé.
Un « étranger » qui se présente chez un frère ou un ami s’arrête toujours loin de la tente pour faire ses salutations, donner des infos qu’il a et ne s’approche que lorsqu’il est autorisé. Cela prend souvent du temps car pour la plupart des cas, ce sont les femmes qui sont à la maison et elles devront tout arranger avant d’inviter le visiteur à s’approcher. Si l’homme de la maison est présent, il sort pour recevoir l’invité sous un arbre, sur une dune, en attendant que les préparatifs soient faits et qu’ils soient tous deux invités à entrer sous la tente.
L’aspect crucial qui résume cette coutume, selon mon analyse, est la préservation du respect réciproque entre les membres de la communauté afin d’éviter des mésententes. Car lorsqu’on vit comme la langue et les dents, on ne s’entend toujours pas. Celui qui traîne toujours sous tes pieds est susceptible d’être de trop (bagarres, trahison) et ce n’est pas bon pour le cadre familial.