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#MaliSansEsclaves : à Kayes, persécutés au nom de la coutume

Depuis 2017, dans certaines localités du Mali, en particulier la région de Kayes, ceux qui refusent d’assumer le statut de « jon » sont persécutés.

Au Mali, la pratique de l’esclavage est officiellement abolie. Pourtant, des populations continuent à subir l’esclavage. Ceux qui refusent de se soumettre sont persécutés. Les chiffres des victimes de cette pratique au Mali s’élève à cinq mille personnes.

La région de Kayes à elle seule totalise quatre mille huit cent personnes touchées par « la pratique esclavagiste », selon les estimations du Rassemblement malien pour la fraternité et le progrès (RMFP). Ce mouvement, qui entend lutter contre l’esclavage, a été créé le 05 avril 2017 avec pour slogan « Gambana » (soyons tous égaux).

« Une coutume à respecter »

Ceux qui prétendent être les maîtres accusent les anti-esclavagistes de bafouer la coutume instaurée par leurs aïeux depuis des siècles. « Lors des fêtes, ils demandent que nous abattions leurs animaux. Nous travaillions dans leurs champs pendant l’hivernage. Ayant décidé de mettre fin à toutes ces formes d’esclavage, nous sommes systématiquement exclus de la société. Dites-moi, si c’est une coutume ? », s’interroge Djaguili Maro Kanouté, ancien maire de la commune de Goumera, située à 26 km de Kayes. Ce dernier est aussi président du Rassemblement malien pour la fraternité et le progrès (RMFP) pour la région.

Dans une société conservatrice, comme la nôtre, certaines anciennes pratiques comme l’esclavage constituent une réalité. De nombreuses personnes considérées comme « jon » ont quitté leur domicile contre les représailles des nobles pour trouver refuge ailleurs.

Subterfuges

Les pro-esclavagistes ont une méthode particulière pour ne pas éveiller les soupçons : ils sont financièrement puissants et détiennent les droits fonciers coutumiers du village. Avec leur fortune, ils arrivent à maintenir ceux qu’ils considèrent comme leurs « esclaves » sous leur joug. Ce sont eux qui ont la chefferie traditionnelle en main.

Les moyens de transport et les grands commerces sont leur chasse gardée. Tous ces moyens sont des instruments de pression pour dissuader ceux qui s’opposent à leurs règles. Jusque-là, ils ont réussi à échapper aux autorités, à la loi en mettant en avant les us et coutumes.

Un lourd supplice

L’embargo, l’exclusion de toutes les affaires sociales de la société, les coups et blessures, l’expropriation des terres cultivables sont, entre autres, les conséquences directes, qui frappent les anti-esclavagistes ayant décidé de s’affranchir de ce joug defendu au nom de la tradition.  Les autorités sont pointées du doigt par les victimes.

« Les autorités ne font pas assez d’efforts pour mettre fin à l’esclavage dans certaines régions du Mali, car la plupart des victimes vivent dans la peur et sont parfois conduites en prison », estime un membre de l’association Gambana, qui ajoute que « les condamnations des auteurs de tels actes sont minimes au regard du nombre de plaintes ».

Sensibilisation, loi et sanctions

Plusieurs pistes peuvent être dégagées par nos autorités pour mettre fin à cette pratique esclavagiste en élargissant les niveaux d’enquêtes pour situer les responsabilités de chaque acteur. Elles doivent s’impliquer en menant de vastes campagnes de sensibilisation dans les localités concernées. L’État malien doit envisager un forum régional ou national, avec toutes les couches de la société, sur l’esclavage.

Malgré mon alerte lancée en 2018 pour attirer l’attention des autorités sur la question, le sujet est toujours d’actualité et le nombre de victimes augmente chaque jour. Si rien n’est fait pour stopper l’hémorragie, la situation risque d’être dramatique et peut conduire à des violences communautaires.

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