Mali : la crise de légitimité des élus, véritable plaie de la démocratie
article comment count is: 0

Mali : la crise de légitimité des élus, véritable plaie de la démocratie

La crise de légitimité des élus est à l’origine de l’instabilité politique que vit régulièrement le Mali depuis l’ouverture démocratique. Il faut des réformes courageuses pour soigner cette plaie.

Sans légitimité, un élu devient soit autoritaire, soit minoritaire – dans les deux cas sa survie est comptée. La crise de légitimité est incontestablement à l’origine du renversement de l’ancien président Ibrahim Boubacar Kéïta par des militaires, le 18 août 2020, après plusieurs mois de contestation populaire menée par le Mouvement du 5 juin–Rassemblement des forces patriotiques (M5-RFP).

Cet énième coup de force était celui de trop pour une jeune démocratie longtemps présentée comme modèle sur le continent. Mais il a prouvé à suffisance que l’idée qui voudrait qu’à chaque rupture de la légalité, le personnel politique et militaire, qui régentent les sphères de décisions au niveau local et central se partagent le pouvoir au nom d’un « consensus national », frise la dérision politique.

Marche à reculons

Tel est l’état des choses au Mali. C’est aussi cette même logique qui guide les stratégies de repositionnement des acteurs politiques et militaires qui, chacun, voit en cette situation d’exception un moyen de s’accorder un morceau d’autorité sans la légitimité que cela nécessite en démocratie pour être durable et répondre aux aspirations des populations.

Si les fins tacticiens politiques appréhendent la transition comme un moyen d’arriver au pouvoir sans nécessairement en avoir la légitimité, c’est vite oublier que les mêmes causes produisent toujours les mêmes effets. Et que le déficit de légitimité se paie cash, quels que soient les habits qu’arborent les détenteurs d’autorité : grand boubou ou kaki.

Ceci étant, comment rompre avec cette interminable marche à reculons et remettre définitivement le pays sur les rails de la démocratie ? Ce ne sont pas les pistes qui manquent, mais bien la volonté de redistribuer les cartes politiques sur des bases saines et inclusives, en prenant en compte les expériences endogènes en matière de gouvernance.

Replacer les citoyens au cœur de la refondation

A l’origine, le processus de décentralisation visait à mieux asseoir la légitimité des animateurs des instances de décision au niveau local et central. Le projet de refondation de la gouvernance devrait s’inspirer des bonnes pratiques endogènes de gouvernance partagée pour replacer les citoyens au cœur des dynamiques de refondation de l’appareil d’État sur la base d’un nouveau « contrat social » renforçant la gouvernance locale.

Cela passe par la redynamisation et le renforcement des instances communales, régionales et nationales de contrôle démocratique et de redevabilité des élus. Cela suppose aussi également le renforcement de l’éducation civique à tous les échelons. Cette éducation ne devrait plus être du ressort des partis politiques, mais envisagée comme une pièce maitresse de la reconstruction nationale et du redressement de la démocratie.

Ce travail pédagogique est indispensable pour reconnecter les populations, en particulier les jeunes, à la chose politique. Le déficit d’éducation politique et l’évanescence des idéologies dans les formations politiques sont à l’origine de la désaffection des citoyens vis-à-vis des partis politiques et globalement de la chose publique.

Est-ce que vous avez trouvé cet article utile?

Partagez-nous votre opinion