Mali : l’impérative réinvention des partis politiques
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Mali : l’impérative réinvention des partis politiques

Depuis l’avènement de l’ère démocratique en 1991, les partis politiques n’ont pas su combler les espérances et les attentes démocratiques portées par les Maliens. C’est l’un des principaux constats dressés par ce panel intitulé « Rôle des partis politiques dans la consolidation démocratique ». Pour survivre, la réinvention s’impose.

L’évènement a attiré un public important, composé des produits de la première promotion des écoles politique et démocratique créées l’Institut néerlandais pour la démocratie multipartite (NIMD), des acteurs politiques et de la société civile, des journalistes, des universitaires et d’autres personnes ressources. Le panel était animé par l’ancien premier ministre Moussa Mara, Nouhoum Sarr, président de parti politique et membre du Conseil national de transition (CNT) et Abdourahamane Ben Mamata Touré, avocat à la cour.

Pour ce premier café politique, il était question de dresser en partie un diagnostic des partis politiques au Mali. Depuis l’avènement de l’ère démocratique en 1991, les partis politiques n’ont pas su combler les espérances et les attentes démocratiques portées par les maliens. C’est l’un des principaux constats dressés par ce panel.

Prédation

Pour l’ancien premier ministre Mara, la critique essentielle à l’endroit des partis politiques au Mali trouve peut-être son origine dans la Constitution elle-même. Parce que, dit-il, à ce niveau déjà « la définition des partis politiques est ‘’conquête du pouvoir’’, parce qu’ils sont définis comme des organisations qui concourent à l’expression du suffrage ».

Ce qui fait que les partis politiques se sont réduits essentiellement à une existence en période électorale. « Après les périodes électorales, on a une vie politique qui dévient atone et on ne voit pas les partis politiques s’illustrer sur des segments de l’approfondissement de la démocratie ou simplement être utiles à la collectivité », dira-t-il.

S’agissant de la multiplicité des partis politiques, M. Mara pense que cet état de fait a sans doute contribué à brouiller l’image des partis, parce que « au même moment où on a une floraison de partis politiques, les essences même de la démocratie dans notre pays n’ont pas vraiment évolué : le taux de participation aux différentes élections, sauf quelques exceptions qui peuvent s’expliquer et se comprendre ; la culture politique de nos compatriotes ; leur connaissance de l’organisation politique, publique, institutionnelle de notre pays ». Autant de choses que nos partis politiques devaient normalement concourir à vulgariser et à expliquer, mais qui sont restées à un niveau assez rudimentaire.

Sur la même question, Nouhoum Sarr explique qu’au lendemain de l’avènement de la démocratie multipartite intégrale au Mali, il s’est installé dans notre pays une prédation : « Les partis politiques sont devenus des instruments de prédation. On va conquérir le pouvoir non pas pour mettre en application une vision, un projet politique, mais plutôt pour contrôler les ressources : créer des commerçants, octroyer des marchés, prendre des postes dans la douane, dans les impôts, etc. ». Résultat, selon lui, il existe de nombreux partis politiques qui se battent pour être aux affaires juste pour jouir des ressources de l’État.

Me Abdourahamane Touré dira, pour sa part, que les partis politiques sont des acteurs très importants et incontournables dans la démocratie et il serait « très hasardeux et même un contre-sens que de dire qu’on n’a pas besoin de parti politique. On ne peut pas avoir de démocratie sans parti politique ». Toute la question est, pour lui, de savoir de quel type de parti politique nous avons besoin dans notre pays.

Travailler sur les critères

Pour nos panélistes, le Mali a fait l’option du multipartisme intégral. La multiplicité des partis politiques n’est pas la question essentielle du débat, « parce que c’est la Constitution elle-même qui a ouvert la possibilité à tout citoyen de pouvoir créer et animer un parti politique », estime Moussa Mara. Il s’agit plutôt, pour lui, de travailler sur les critères : « Il n’y a pas de critères véritablement contraignants, efficaces qui feraient que les partis puissent, tout en concourant à la recherche du suffrage des populations, participer à la formation politique de ces mêmes populations, être utiles et contribuer à l’approfondissement de la démocratie ».

Me Touré a suggéré de travailler sur les critères pour amener les partis politiques à concourir davantage au suffrage, à être beaucoup plus représentatifs et proches des populations.

Ce débat a été l’occasion de mettre le doigt, encore une fois de plus, sur l’état des partis politiques au Mali. L’occasion pour Me Touré, également vice-président de la Commission d’organisation des assises nationales de la refondation (ANR), d’inviter les partis politiques à participer à cet espace afin de mieux approfondir et offrir des pistes de solutions à cette problématique.

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