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Le fonds culturel de Tombouctou mis à mal

La ville de Tombouctou regorge de richesses matérielles très diversifiées dont les maisons en terres cuites, situées dans la médina, « ancienne ville de Tombouctou ». Ce patrimoine historique témoigne de l’apogée de la ville depuis le Moyen-Âge. En effet, certains biens inscrits sur la liste du patrimoine mondial sont en terre : les trois mosquées que sont Djingareyber, Sidi Yahia et Sankore. Aujourd’hui, les constructions en ciment abondent autours de cet héritage culturel et menacent le caractère authentique de ces maisons en terre.  Le blogueur Abdoulahi Baba Darfa tire la sonnette d’alarme.

Les maisons en terre de Tombouctou constituent le relais irremplaçable dans la connaissance de l’histoire de cette ville. « A travers les âges, Tombouctou dispose d’un type très riche et apporte une touche originale au style architectural soudano-sahélien propre à notre pays », déclare un doyen de la ville.

Les maisons en terre ont émerveillé et attiré l’attention de tous ceux qui ont parcouru la ville. Ces maisons sont construites à base de matériaux locaux : banco, bois de rônier, bois de galette et des pierres « d’alhor ». Elles prennent une forme rectangulaire et ornée de la même pierre. La combinaison de ces matériaux donne à la ville l’originalité de son architecture traditionnelle et devient le symbole vivant de la créativité soudano-maghrébine, qui influence toute l’architecture de la région. Les maçons locaux ont inventé un modèle de construction très réfléchi, qui prend en compte les exigences des milieux sahariens.

Ces maisons en terre sont construites dans un souci d’adaptation au climat saharien. Elles résistent au soleil, à l’Harmattan et autres intempéries qui peuvent survenir. C’est pourquoi, d’ailleurs, leur épaisseur varie entre 75 et 80 cm. Elles secrètent des vertus culturelles car chacune d’elles correspond à un corpus d’informations historiques qui fonde la mysticité de la ville. Certaines de ces maisons sont classées sur la liste du patrimoine national du Mali

Quand les Tombouctiens boudent leur héritage culturel

A la faveur de la libération des régions du nord du Mali comme Tombouctou, beaucoup d’infrastructures étatiques, autrefois construites en terre, sont démolies pour être remplacées par du ciment à l’intérieur de la ville. Un acte encouragé par bon nombre de Tombouctiens malheureusement. « Je crois que c’est dangereux, car cela risque de porter atteinte à la valeur et à la portée historique de ces maisons en terre qui sont un maillon fondamental dans la préservation et la valorisation de notre héritage culturel », affirme Mahamane Maiga, un fonctionnaire habitant la « cité aux 333 saints ».

Certains jeunes de Tombouctou, soucieux du devenir de la ville, créent des associations de lutte contre ces pratiques avilissantes, qui mettent en péril le patrimoine de la ville.

Sidéré devant la dégradation de ce symbole de notre identité commune, j’ai alerté les spécialistes des maisons en terre pour qu’ils mettent en œuvre des stratégies de communication et de sensibilisation afin que ceux non avertis de l’importance du patrimoine culturel soient informés de leur importance.

« La mission culturelle de Tombouctou » est très investie face à la démolition des maisons en terre et songe à traduire en justice tous ceux qui bradent son patrimoine culturel comme elle l’a fait avec Ahmad Al Faqi, accusé d’avoir participé à la destruction des mausolées et traduit devant la Cour pénale internationale en 2016 où il fut condamné à 9 ans de prison.

Je pense que la démolition des maisons en terre constitue un manque et un handicap très grave pour notre patrimoine matériel. Des actions dissuasives en amont doivent être prises pour le rayonnement durable de la culture en général et permettre une meilleure diffusion de l’apport de la culture dans l’évolution des mentalités dominées par les progrès scientifiques.

 

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