imam quartier radicalise
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Au secours, l’imam de mon quartier se radicalise !

Beaucoup d’imams deviennent de plus en plus méfiants face à certaines pratiques jusqu’ici tolérées. A travers ce billet, le blogueur Haya parle du cas de l’imam de son quartier qui, dans son échelle, en est à « Rad-1 ».

Des cérémonies assurées contre la fréquentation de la mosquée ? Dans mon quartier, pour inciter encore davantage les gens à venir prier, l’imam a décidé d’imposer certaines règles. Comme toutes les cérémonies sociales (baptêmes, mariages, funérailles) comportent une dimension religieuse, il a donc tout bonnement décidé de ne plus officier celles de personnes qui ne fréquenteraient pas régulièrement la mosquée.

Si pour certains, cette décision est bonne et permettra d’encourager à une fréquentation assidue de la mosquée, d’autres y voient un signe de radicalisation. Quant à moi, je me range dans le camp de ces derniers. Selon moi, sur mon échelle de la radicalisation, l’imam en est à « Rad – 1 ».

Soirées annulées

La preuve est facile à faire : depuis l’annonce de cette décision, certains fidèles de la mosquée l’ont suivi à la lettre en refusant d’aller au mariage de ceux qui, à la veille, ont organisé une soirée dansante. Des soirées comme le « Balani Show » (soirée à ciel ouvert animée par un DJ) ont aussi été annulées.

Curieux de mieux connaître les raisons qui ont motivé sa décision, j’ai rencontré l’imam qui m’a fait savoir qu’il ne faisait qu’appliquer les prescriptions islamiques. Pour lui, les soirées de « Balani Show », compte tenu de tout le bruit qu’elles génèrent dans le quartier, pourraient nuire au bon voisinage qu’il est pourtant recommandé de préserver dans la religion. Fermement, il m’a confirmé qu’il interdisait de célébrer les cérémonies de ceux qui ne fréquenteraient pas la mosquée.

Exagération

Mon opinion est que la posture de l’imam s’inscrit dans un contexte où on assiste à la montée d’un islam très regardant sur les questions d’ordre sociétal. Comme nous l’ont montré les dernières mobilisations d’associations musulmanes, à l’appel de l’influent imam Mahmoud Dicko (ancien président du Haut-conseil islamique) et du Chérif de Nioro, contre l’éducation sexuelle complète et l’homosexualité.

« Le père de l’imam a vécu avec nous ici, et, jamais il n’a pris une telle décision. Pourquoi c’est son fils qui nous impose ces restrictions ? Ce n’est pas islamique, je pense », s’indigne   Siriki, un septuagénaire qui fréquente souvent la mosquée. Le discours de Siriki est partagé par nombre de jeunes qui pensent que l’imam exagère. « Il peut nous empêcher d’organiser des soirées dansantes dans le quartier, mais de quel moyen dispose-t-il pour savoir qu’un fidèle a passé la nuit en boîte de nuit  ou pas ? », s’interroge Amadou, un jeune du quartier, qui estime qu’« il encourage de cette façon la délinquance juvénile. »

Je partage amplement cet avis, car si les jeunes ne peuvent pas s’amuser dans le quartier, comme cela a toujours été le cas, il ne faut pas s’étonner de les voir devenir les piliers de bar et de boîtes de nuit, où il n’existe aucun regard et aucune limite.

Une question d’argent

Il est toujours moins coûteux d’organiser le baptême de son fils à la mosquée qu’en famille. Parce que, évidemment, si avec la famille il faut préparer du haricot, accompagné du café, les dattes suffisent dans la mosquée. Dans le quartier, il est mal vu que votre cérémonie sociale soit boudée par l’imam, ou encore qu’on refuse de prier sur votre parent défunt.

Pour l’imam, il n’est pas possible de bénéficier des avantages de la mosquée si l’on n’est pas un fidèle. Va-t-il pour autant basculer vers le « Rad 0 », le dernier degré de mon échelle de radicalisation ? Il y a peu de chance. Ils sont nombreux ceux qui pensent en effet que tout est une question d’argent. On ne pose jamais en effet la question aux parent d’un nanti si le défunt fréquentait ou pas la mosquée.

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