Mali : les médias, vecteurs de paix ?
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Mali : les médias, vecteurs de paix ?

La promotion de la paix et de la cohésion sociale est un enjeu majeur dans notre société actuelle. Les médias jouent un rôle crucial dans la construction de l’opinion publique. Véhiculer des messages de paix et de réconciliation s’impose pour promouvoir le vivre-ensemble.

« En réalité, je ne pense pas que le sujet soit suffisamment abordé. Les médias préfèrent surtout mettre l’accent sur la sécurisation, alors que cela doit aller de pai r avec la promotion de la paix». Ces propos de Massiré Diop, journaliste politique au quotidien L’indépendant, semble mieux décrire le traitement des informations liées aux questions de paix et de sécurité dans les médias au Mali. Si les sujets sécuritaires nourrissent les plateaux de débats, télévisés et radiophoniques, c’est tout à fait le contraire avec ceux traitant de paix.

Selon Massiré Diop, les médias n’interrogent pas assez les communautés « locales », qui sont les plus touchées par les problèmes sécuritaires. « Les médias sont trop orientés sur les sujets politique, sécuritaire, socio-économique, qui font vendre », a-t-il ajouté.

L’éducation, l’information, le divertissement et la sensibilisation sont des rôles joués par les médias, selon les spécialistes du domaine. Pour Harouna Flake Bah, journaliste dans une radio privée bamakoise, les médias maliens accomplissent leur mission dans la promotion de la paix et de la cohésion sociale. Ils le font à travers des genres journalistiques tels que le reportage, les magazines, des annonces publicitaires et microprogrammes de sensibilisation, sponsorisés qui plus est par des organisations non gouvernementales.

Discours de haine et de division

Dans un contexte marqué par la montée des discours de haine et de division, il est primordial que les médias agissent en faveur de la paix et de la cohésion sociale. Ils doivent être des acteurs du changement en promouvant des valeurs de tolérance, de respect et d’ouverture d’esprit. Cela passe par une couverture équilibrée et objective des événements, en mettant en avant les initiatives positives et les actions de solidarité qui contribuent à renforcer les liens entre les individus.

Des interlocuteurs estiment que les médias n’ont qu’une mission : Informer le public, et ainsi ont-ils un pouvoir énorme pour contribuer à pacifier les conflits. Depuis 2012, des organisations non gouvernementales ont procédé à la formation des hommes de médias concernant leur rôle dans la promotion de la paix. Comme ce fut le cas en mai 2016 à Gao, avec la formation des journalistes de la localité afin de « soutenir la reconstruction du Mali ».

Propositions de solutions

Pour confirmer l’importance des médias dans la restauration de la paix, de nouveaux concepts ont vu le jour, à l’image du SOJO (journalisme de solutions) ou encore journalisme de paix. Cette notion a vu le jour dans les années 1998 aux États-Unis. En 2007, les grandes rédactions comme New York Times et le quotidien français Libération font leurs premiers articles consacrés au journalisme de solutions, qui met l’accent sur des propositions de solutions aux problèmes plutôt que de juste informer les lecteurs. « Ce sont des concepts permettant aux journalistes de s’intéresser davantage à la paix, au vivre-ensemble et à la cohésion sociale », soutient Massiré Diop.

Pour une meilleure contribution des médias, il pense qu’il faut plus s’intéresser à ces nouvelles notions, faisant intervenir davantage les communautés « locales » et en traitant des sujets qui appellent à la paix et éviter de rapporter tout ce qui est discours de haine, discriminations basées sur le genre ou les « ethnies ». Une mission que s’était fixé Mikado FM, « La radio de la paix » qui a cessé d’émettre en novembre 2023 en lien avec le retrait de la mission de l’ONU (Minusma) au Mali. « Notre traitement était orienté vers tout ce qui peut amener la paix et renforcer la cohésion sociale et la sécurité. C’était la ligne éditoriale. », rappelle Aboubacar Dicko, journaliste ayant officié sur Mikado FM.

En plus de Mikado FM, la Fondation Hirondelle, une organisation suisse ayant vu le jour en 1995, s’est donné comme mission la création des radios « au service de la population ». Implantées dans plusieurs pays d’Afrique, les radios au Sahel – Studio Yafa du Burkina Faso, Studio Tamani du Mali, Studio Kalangou du Niger – ont un défi commun à relever. Ce qui a poussé l’organisation, en 2013, à la réflexion sur le thème « L’information au Sahel : un enjeu de paix ? »

Débat démocratique et participation citoyenne

A Mikado FM, des émissions radiophoniques étaient animées sur les thématiques de paix, de cohésion sociale mais aussi de reconstruction du tissu social à travers les médias. Par exemple, il y avait « L’Accord de A à Z ». « Cette émission consistait à relayer le contenu de l’Accord pour la paix et la réconciliation, issu du processus d’Alger, explique Aboubacar Dicko. Pour ce programme, on donnait la parole au gouvernement, aux groupes signataires et à la médiation internationale afin de mieux informer la population malienne sur le contenu de cet accord. »

Il est également important, pour les médias, de donner la parole à tous les acteurs de la société, en veillant à représenter la diversité des opinions et des points de vue. C’est partant de ce postulat que Mikado FM avait une des programmes qui prônait l’inclusion à travers des émissions en langues nationales.

En favorisant le débat démocratique et en encourageant la participation citoyenne, les médias peuvent contribuer à renforcer la cohésion sociale et à créer un sentiment d’appartenance commun.

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