#SiraKura : opérationnaliser le système d’assistance judiciaire auprès des tribunaux
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#SiraKura : opérationnaliser le système d’assistance judiciaire auprès des tribunaux

Au Mali, l’accès à la justice constitue un véritable défi à relever pour les pouvoirs publics. Pour assurer la crédibilité de notre État et préserver la paix sociale, les Assises nationales de la refondation (ANR) ont recommandé l’opérationnalisation du « Bureau d’aide juridique auprès des tribunaux pour les personnes démunies. »

Pour rendre la justice accessible à ceux dont les moyens financiers ne leur permettent pas de supporter les coûts, l’État Malien a instauré le système d’assistance judiciaire à travers une loi en 2001 et son décret d’application datant d’octobre 2006. Cette loi consacrait ainsi la mise en place effective de bureaux d’assistance judiciaire (BAJ), qui devaient être établis auprès de chaque tribunal de première instance et de justice de paix à compétence étendue.

Selon Me Samba Baba N’Diaye, avocat inscrit au barreau du Mali, le Bureau d’aide juridique est « un service institué auprès des tribunaux pour aider les citoyens pour le paiement ou la dispense des frais de justice. En d’autres termes, c’est un service mis en place pour aider les plus démunis qui n’ont pas les moyens de payer les frais d’une procédure judiciaire et leur offrir un cadre où ils pourront réclamer et avoir justice ».

Seulement, plus de deux décennies après, ces bureaux n’existent toujours pas de manière effective et opérationnelle au Mali. C’est tout le sens de cette recommandation formulée lors des Assises nationales de la refondation (ANR), demandant à « créer et/ou multiplier de manière effective et rendre fonctionnel le bureau d’aide juridique auprès des tribunaux pour les personnes démunies ».

Aider les plus démunis

Ces personnes peuvent ainsi bénéficier des services d’un(e) avocat(e), d’un(e) notaire, d’un(e) huissier de justice, d’un(e) commissaire – priseur ou d’un expert(e), devant toutes les juridictions et quelle que soit la nature de l’affaire en cause : civile, administrative, commerciale, pénale, etc.

Toujours selon Me N’Diaye, l’existence de bureaux d’aide juridique est une bonne chose non seulement pour les citoyens, mais aussi pour les professionnels qu’ils sont. En effet, il arrive souvent que nous soyons confrontés à des justiciables qui n’ont absolument aucun moyen de payer les frais de justice et parfois nous nous acquittons nous-mêmes de ces frais dans le cadre des dossiers pro bono que nous prenons » explique-t-il. Avant d’ajouter : « Les citoyens verront, par le fonctionnement effectif de ce bureau, la prise en charge de leur droit fondamental d’accès à une justice équitable et qui ne soit qu’à la portée des plus nantis. »

Conditions préalables

Malgré toute leur importance, les bureaux d’aide juridique n’arrivent pas à s’opérationnaliser. Cela, parce que des problèmes majeurs se dressent sur leur chemin : la lourdeur de la procédure [pour bénéficier de l’assistance judiciaire], le faible budget alloué par l’État à l’assistance judicaire dans son ensemble, l’ignorance de cette loi par les justiciables, la faible rémunération des avocat.e.s prenant en charge ces dossiers et l’inexistence d’un barème clair permettant d’évaluer les ressources financières d’une personne requérante et déterminer ainsi si elle est éligible ou pas (Extrait du document d’Avocats sans frontières Canada, intitulé « Vers un accès à la justice au Mali ? Avancées et défis », Bamako, 2020.)

Me Oumar Niaré, également avocat inscrit au barreau du Mali, reconnaît tout comme Me N’Diaye, l’utilité de l’aide juridique par sa capacité à offrir « l’assistance gratuite d’un avocat et l’exonération de frais de justice qui peuvent être insupportables pour un justiciable et l’amener à renoncer à son droit ». Mais, selon lui, l’aide juridique en soi n’apporte aucune garantie de meilleure justice. « La meilleure justice, c’est lorsque le juge rend sa décision en appliquant la loi sans être enclin à aucune autre considération. Or, cette fonction de juger n’est pas subordonnée à l’existence ou pas de l’aide juridique », fait-il observer.

Ils pensent tous les deux que l’accès à la justice ne garantit pas une meilleure justice. C’est pourquoi Me N’Diaye exhorte les autorités maliennes à « prendre toutes les dispositions nécessaires pour rendre notre justice encore meilleure et plus performante ».

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