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L’excision : une pratique encore trop répandue

Pratiquée depuis fort longtemps, même si elle n’est mentionnée dans aucun texte religieux, l’excision est l’ablation de la partie externe prépondérante du clitoris et de son capuchon. Elle est parfois accompagnée de l’ablation des petites et des grandes lèvres. C’est un des types de mutilations génitales féminines les plus répandus. D’après l’UNICEF en 2016, plus de 200 millions de femmes ont subi des mutilations génitales féminines dans le monde. 

L’excision est une pratique répandue en Afrique subsaharienne – environ six filles par minute subissent ces pratiques – et plus précisément au Mali, où elle est profondément ancrée dans la société. Selon la dernière enquête démographique et de santé réalisée dans le pays en 2013, 91% des femmes âgées de 15 à 40 ans étaient victimes de l’excision. La plupart des jeunes filles dans les villages et même dans les villes sont amenées chez l’exciseuse appelée « dame forgeron » pour l’ablation de leur clitoris, organe jouant un rôle prépondérant chez la femme au cours des rapports sexuels. Une grande partie des jeunes filles victimes de ces pratiques sont confrontées à beaucoup de problèmes.

Djeneba une victime nous fait part de son expérience : « Au cours de mon excision j’ai fait une hémorragie. Pour être stoppée, j’ai dû urgemment subir une intervention chirurgicale, et après je me suis retrouvée dans l’incapacité d’accoucher par voie basse parce que tout simplement, l’orifice n’a plus sa taille normale. » Une excision qui lui vaut des complication dans sa vie de femme : « J’ai une vie sexuelle non active à cause des douleurs au cours des rapports sexuels. » Et elle ajoute : « C’est le genre d’expérience qu’on ne surmonte pas vraiment, on apprend juste à vivre avec. »

« L’excision est une obligation pour les parents » ?

Sur le plan religieux aucun hadit et aucun texte du Coran ne parle de l’excision, elle n’est stipulée nulle part. L’une des causes principales de l’excision est la tradition, qui a un poids énorme dans la société Malienne. D’après la tradition, pour qu’une jeune fille soit pure et totalement féminine, il faut obligatoirement qu’elle passe par le rituel de l’excision.

Ce qui la rend acceptable par son mari et les autres gens de la société. Une exciseuse de Bamako nous explique pourquoi il est important d’exciser les filles : « L’excision est une obligation pour les parents vis-à-vis de la fille, par ce que c‘est seulement ainsi que la jeune fille peut contrôler sa libido et par la même occasion devenir  pure et complète. » Elle ajoute : « Les petits bouts du clitoris et des lèvres supérieures et inférieures qui sont enlevés au cours de l’excision ont la même réactivité qu’un pénis lorsqu’un homme a envie. De plus, plus la jeune fille grandit, plus ces bouts grossissent, et dans certains cas, peuvent avoir une grosse taille. Ce qui esthétiquement parlant n’est pas beau à voir. »

Tout comme l’exciseuse, les pro-excisions pensent que cette pratique est un moyen sûr pour la jeune fille de s’abstenir avant le mariage. Pour eux, une fille non excisée est incapable de contrôler sa libido. Une mère nous donne les raisons pour lesquelles elle a fait exciser ses filles. « Toutes les femmes de notre famille ont été excisées, et vu que la religion n’interdit pas la pratique il était de mon devoir d’exciser mes filles. Aucune des femmes de notre famille n’a été confrontée aux dangers souvent cités de l’excision, c’est pourquoi je ne crois pas d’ailleurs à ces prétendus dangers. C’est juste là des concepts que les blancs veulent nous faire gober », explique-t-elle.

 

Une pratique dangereuse

La plupart du temps, les filles sont amenées chez l’exciseuse sans qu’elles n’aient eu aucune discussion au préalable avec leur famille concernant cette pratique. Les parents sont toujours dans l’idée de bien faire et de bien suivre la tradition. « Une tradition et une culture avec un coté mystique difficilement compréhensible par les étrangers », nous dit l’exciseuse.

Une pratique qui n’est pas sans risque. Très peu de données existent sur le sujet. Mais cette pratique entraîne souvent des complications médicales qui conduisent parfois au décès de la jeune fille. Mais l’exciseuse ne reconnaît pas le danger de la pratique. Elle l’explique par l’incompétence de ces consoeurs : « A vrai dire toutes les  exciseuses ne sont  pas douées, certaines ne connaissent pas bien le métier, et quand ces dernières excisent cela engendre une catastrophe. »

Elle met un accent particulier sur cet aspect et ajoute : « L’excision requiert une certaine connaissance de la morphologie féminine et des savoirs mystiques. Il faut des jours spécifiques pour exciser, pour moi ce sont les lundis et les jeudis. Je ne fais l’excision que ces deux jours. L’excision est l’ablation totale du clitoris, et souvent des petites et grandes lèvres. Mais moi quand j’excise je n’enlève que certains bouts du clitoris et des lèvres. »

Des difficultés au quotidien

L’un des défis majeurs dans le combat contre l’excision au Mali est l’ignorance des conséquences de la pratique. Ses conséquences sont entre autre : l’infertilité, la fistule obstétricale, les douleurs pendant les rapports sexuels, les infections, les douleurs urinaires, les complications lors des grossesses et accouchements… Et même le risque de mort.

Une autre jeune fille victime nous parle des répercussions de l’excision : « L’une des répercussions est qu’il me faut un partenaire attentionné et patient pour ne pas me retrouver avec des douleurs atroces, ce qui rend la vie de couple compliquée par moment. »

Eradiquer le fléau qu’est l’excision au Mali est une besogne très difficile, puisque la majorité des Maliens est favorable à son maintien : 73% des femmes et des jeunes filles âgées de 15 à 49 ans et 70% des hommes et garcons âgés de 15 à 49 ans d’après le rapport de l’UNICEF du 22 juillet 2013.

Vous pouvez relire sur Benbere : Lettre à mon clitoris disparu, que je ne retrouverai jamais

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