Comme à chaque édition, les cours familiales, les rues, les toits de maison et tous les endroits singuliers de Bamako-Coura se sont ouverts et prêtés au jeu de la 5e édition du Festival Les Praticables, du 8 au 17 décembre 2023.
La conférence de lancement, le vendredi 8 décembre, annonçait déjà les couleurs d’un événement qui se veut la « Fabrique citoyenne d’un nouveau théâtre d’art populaire ». Une phrase, sur les visuels, qui porte en elle tout le sens de ce festival. L’objectif étant de réunir la population pour une grande fête populaire culturelle, l’événement est devenu, au fil du temps, une co-production des organisateurs et des populations de Bamako-Coura. Tout au long de la période, le quartier devint ce que le journaliste culturel Issouf Koné appellera « un laboratoire artistique » où tout est objet de création.
Créé en 2017, l’événement qui se tenait chaque année est « passé de festival en biennale » à Bamako-Coura et dans d’autres espaces culturels du Mali. Ils étaient de la République démocratique du Congo, de la République du Congo, de la Centrafrique, du Sénégal, de la France, du Nigéria, pour ne citer que ceux-ci, comme artistes internationaux, en plus d’une trentaine d’artistes nationaux.
Un programme riche
Pendant plus d’une semaine, plusieurs projets ont été présentés par les artistes. Les artistes semblaient avoir pour mission « de rencontrer la population, discuter avec elle », a expliqué Lamine Diarra, directeur de Kuma Sô Théâtre, la structure organisatrice, lors la conférence de lancement. Il s’agit, en effet, d’une immersion afin de produire ou créer des contenus qui ressemblent aux populations. Des créations inspirées de leurs aspirations, qui s’exprimeraient de mille manières dans le langage de l’art. C’est aussi cela le slogan du festival « Faire de rien quelque chose ».
Des spectacles de danse, de poésie, des parades dans la rue, des installations d’artistes visuels, des concerts, des expositions photos et des ateliers de peintures, etc. En plus du théâtre, le festival accueillait plusieurs autres activités permettant de raconter une histoire. « Un événement pluridisciplinaire », Mme Djiré Mariam Diallo, maire de la Commune III.
L’ambiance débute par la parade des bouchers : Abarbarba, une traditionnelle manifestation des bouchers qui a lieu chaque année à Mopti au mois de février. Une grande première cette année, précise Lamine Diarra, qui a grandi dans la région et a eu l’idée de l’inclure dans le programme de cette édition. « On invite de plus en plus les régions à venir à Bamako », confia-t-il. Les régions étaient à l’honneur : notamment Mopti avec des projets participatifs comme l’exposition des œuvres d’art des femmes de Mopti conduite par l’artiste Amadou Sanogo ou encore Et on se raconte, dirigé par Jeanne Diama, une pièce de théâtre des lycéennes de Mopti racontant leurs combats, leurs aspirations et leurs perspectives. En tant que festival qui promeut le théâtre populaire au Mali, d’autres projets participatifs étaient également au programme comme Génération B, le spectacle vivant qui questionnait ou sinon faisait réfléchir sur le rôle du théâtre dans la société ; Le projet Ado qui, sous la conduite de l’artiste français Pascal Colin, mettait en scène des adolescents de Bamako, pour parler de leurs préoccupations et aspirations.
Promotion du vivre-ensemble
Devenu « désormais une coproduction entre le quartier et Kuma sô Théâtre », Les Praticables est une fête populaire culturelle qui mobilise désormais. De sa jeunesse, aux femmes, toutes les familles se le sont finalement approprié. « Certes, avant le festival, il y avait la cohésion et l’harmonie dans le quartier mais il est venu renforcer ce lien davantage », témoigne Mme Coulibaly dont le domicile servait de cadre pour la conférence de lancement. « L’utilité de ce festival est grande. Il a un impact énorme sur l’éducation des enfants, des jeunes et même des adultes qui apprennent des choses tout en s’amusant (…). Notre souhait est de faire atteindre Les praticables partout où il est possible », confie Bakary Diarra dit « Abel », un ancien député de la commune III qui accompagne l’événement depuis ses débuts.
En plus de célébrer la culture, Les Praticables dépasse les frontières. Il est donc et maintenant une fête panafricaine. « L’une de nos politiques aussi est de faire le pont entre l’Afrique francophone et anglophone », souhaite Lamine Diarra. Le moins que l’on puisse dire est que le festival Les Praticables 2023 a tenu la promesse d’être cette plateforme de dialogues qui réunit les idées de tout horizon où le « local » exprime l’universel.