Virginité : « On peut ne pas saigner la première fois »
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Virginité : « On peut ne pas saigner la première fois »

Maimouna Tounkara s’est mariée à l’âge de 20 ans. Issue d’une communauté conservatrice, elle a décidé de garder sa virginité jusqu’au mariage pour honorer sa famille, mais sa nuit de noces fut tout le contraire de ce dont elle rêvait. 

Au Mali, le lendemain de la première nuit de noces est un jour d’épreuve pour la nouvelle mariée. Une fois que l’union est consommée, la tradition impose la divulgation d’une nouvelle : la mariée a-t-elle déjà connu un homme avant son mariage ou pas ? La conseillère conjugale (« magnamaga ») est chargée de constater ce fait en inspectant le drap sur lequel les mariés ont passé la nuit. Il faut du sang pour attester la pureté de la mariée. Le contraire est synonyme de débauche. Cela voudrait dire que la mariée n’était pas vierge.

Pour vérifier cette information, les mamans de la mariée se rendent dans la chambre nuptiale, dans la belle famille, où elles sont accueillies avec une noix de cola blanche qui symbolise, selon la coutume, la pureté. Dans le cas contraire, si l’épouse n’était pas vierge, la noix offerte sera de couleur rouge. 

C’est cela qui est arrivé à Maïmouna Tounkara. Avant son mariage, elle affirme n’avoir jamais eu de rapport sexuel. « Je voulais honorer mon mari,  rendre fière ma famille et surtout ma mère, et pouvoir garder la tête haute dans une famille où être une bonne femme se résume à conserver sa virginité jusqu’au mariage. », raconte-t-elle.  Malgré tout, Maïmouna n’a pas échappé à la vindicte publique. Pour cause : elle n’a pas perdu de sang lors de son premier rapport dans la chambre nuptiale. « Oui, je n’ai pas saigné cette nuit et cela m’a coûté mon mariage. Après la nuit de noces, mon mari ne m’a plus touché, et au final, il m’a ramenée chez nous avant de mettre fin à notre union. », dit-elle. 

Déshonneur

C’était un lundi. Ce jour restera gravé à jamais dans l’esprit de Maïmouna. Mes mamans étaient venues avec leur griotte et le batteur de « tamani », immobilisées au beau milieu de la cour.  « Tu nous as mis la honte, tu as déshonoré notre famille, c’est une première chez nous. », m’ont-elles rabroué.

« Ce fut une grande déception pour moi, car ni mon mari ni mes mamans ne m’ont accordé le bénéfice du doute », déplore Maïmouna.  Et sa mère, qui a vécu la scène comme une humiliation de la vie ne lui a pas fait de cadeau : « Tu t’es bien foutue de mon intelligence. Tu te croyais plus maligne, n’est-ce pas ? Eh bien, sache que la vérité finit toujours par triompher ! ». Ce sont les mots que sa mère lui’a lancés à la figure. Elle a tenté de convaincre ses parents que c’était bien sa première fois de coucher avec un homme, mais sans succès. « J’ai beau jurer que cet homme a été le premier que j’ai connu, personne ne m’a cru. », raconte-t-elle.

Il y a des femmes qui ne saignent pas lors du premier rapport

Le saignement lors du premier rapport sexuel est lié à la rupture d’un vaisseau appelé hymen. L’hymen a différents types d’ouverture, et ils réagissent différemment lors des rapports sexuels. Certaines femmes ressentent de la douleur, d’autres non. Certaines saignent beaucoup, et d’autres ne saignent pas du tout.

« L’hymen n’a pas de fonction biologique, et certaines femmes naissent sans hymen. On peut perdre l’hymen sans avoir de rapport sexuel, en faisant du sport ou suite à un accident de circulation, entre autres », explique Dr. Lalla Traoré, spécialiste en santé sexuelle et reproductive (SSR).

Une demoiselle du nom de Djamila soutient ses propos : « J’ai accepté de coucher avec mon copain après l’avoir fait attendre pendant 3 ans. À l’époque, j’avais 22ans, mais la nuit de cette première fois je n’ai pas saigné. Il était donc étonné et déçu. Pour lui, je l’avais mené en bateau. On a dû se rendre à l’hôpital pour avoir des explications. Grâce au gynécologue, on a compris que toutes les femmes ne saignent pas lors de la première fois ». 

Un homme mâture doit être capable de savoir si une femme est à son premier acte sexuel ou non. Et cela, même si elle ne saigne pas. Il y aurait alors moins de victimes innocentes de la vindicte sociale. La société maintient encore ce type de norme. À chacun d’apprécier par soi-même son adhésion. 

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