Depuis janvier 2014, date de leur entrée en fonction, les députés du cercle de Gao n’ont fait ni interpellation à l’Assemblée nationale, ni restitution aux populations, selon le blogueur Abdoul Majid Maïga. Les élections législatives à venir sont vues par certains comme une occasion de les sanctionner.
Le cercle de Gao compte trois députés à Assemblée nationale du Mali : Aguissa Seydou Touré, Alhousna Malick Touré et Ibrahim Ahamadou Dicko. En 2013, ils ont tous été élus sous la bannière du Rassemblement pour le Mali (RPM, parti au pouvoir). Mais, comme beaucoup de personnes dans le cercle de Gao, je me demande pourquoi ces derniers ne sont jamais retournés à Gao pour la moindre restitution. Pourtant, cet exercice est plus qu’une nécessité pour permettre aux populations de savoir ce qui se passe à l’hémicycle.
L’interpellation et la restitution sont deux exercices démocratiques auxquels tout député ou sénateur doit s’atteler. L’interpellation est définie, en droit constitutionnel, comme une demande faite par un député ou un sénateur au gouvernement pour qu’il s’explique sur ses actions ou sur sa politique lors d’une séance publique de l’Assemblée nationale ou du Sénat. Elle engage un débat auquel d’autres parlementaires peuvent prendre part et peut, à l’issue d’un vote, engager la responsabilité du gouvernement. La restitution est l’occasion pour le député de rendre compte à ses populations des lois votées à l’Assemblée et de recenser leurs préoccupations.
Convocation du collège électoral
De 2014 à ce jour, les populations du cercle de Gao n’ont pas bénéficié de ces deux exercices démocratiques de la part de leurs députés. Pis, ils ont brillé par leur silence sur les problèmes réels auxquels les populations du cercle sont confrontées. A titre d’exemple, sur le conflit impliquant Peuls et Touareg dans la zone de N’Tillit, qui a provoqué des déplacements de populations, je n’ai pas souvenance d’une quelconque action posée par ces députés. L’insécurité grandissante à travers les braquages, les assassinats, les vols à mains armées est un sujet sur lequel ils auraient pu faire ne serait-ce qu’une interpellation. Il n’en a rien été.
Le 22 Janvier 2020, le Conseil des ministres a annoncé la convocation du collège électoral pour les élections législatives prévues ce 29 mars. Dans le cercle de Gao, des voix s’élèvent pour appeler à une sanction. A. Ag O, agent d’une ONG humanitaire, estime que cette attitude des députés traduit « un véritable mépris qui ne peut être pardonné ». « Ils n’ont aucun respect pour ceux qui les ont élus. C’est pourquoi nous n’attendons plus que les législatives pour sévèrement les sanctionner », ajoute-t-il. « Leur mandat ne sera pas renouvelé. Nous allons nous faire respecter lors des législatives prochaines. », renchérit cet autre habitant de Gao, fonctionnaire d’une organisation basée à Gao. Selon nos informations, seul Ibrahim Ahmadou Dicko, qui a quitté le RPM en 2018 pour le principal parti d’opposition Union pour la république et la démocratie (URD), pourrait être candidat.
La faute aux électeurs
Dans le cercle de Gao, certains pointent également un doigt accusateur à l’encontre des électeurs qui, pour la plupart, ne votent pas pour les programmes mais pour les petits cadeaux qu’ils reçoivent lors des campagnes électorales. Pour l’enseignant Amadou Idrissa Maïga, la faute en revient aussi aux électeurs qui ne demandent pas de compte à rendre à leurs élus. « C’est un droit, les populations doivent exiger des explications et des rapports à leurs députés après chaque session », a-t-il indiqué.
Comment en est-on arrivé là ? L’enseignant ajoute que cette situation, en général, peut s’expliquer partout dans le pays par le fait que les élus sont obligés de mettre la main à la poche pour avoir le vote des populations. « Quelqu’un qui a en tête qu’il déboursé son argent pour avoir un vote va toujours se dire qu’il n’a de compte à rendre à personne », conclut-il.