Mali : comment les médias sociaux ont imprégné la crise politique
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Mali : comment les médias sociaux ont imprégné la crise politique

Les médias sociaux sont au cœur des événements socio-politiques qui rythment le quotidien au Mali depuis près d’une décennie. À travers les « live » des milliers de maliens ont suivi de façon instantanée les récents développements de la situation politique.

L’engouement des Maliens pour les réseaux sociaux remonte à la crise multiforme de 2012, qui a vu des groupuscules rebelles et djihadistes prendre le contrôle des régions du Nord. Dès lors, l’intérêt pour ces nouveaux canaux d’informations va grandissant.

« À tout moment, nous pouvons nous adresser aux Maliens, sans difficulté, grâce à vous », s’est réjoui Me Demba Traoré, secrétaire à la Communication de l’Union pour la République et la démocratie (URD), le principal parti de l’opposition au Mali au cours d’une rencontre de la Coordination des mouvements, associations et sympathisants de l’imam Mahmoud Dicko (CMAS), tard dans la nuit du 14 août.

Dans un appel publié sur Benbere, il y a quelques mois, un groupe de chercheurs et de journalistes écrivaient que « le progrès des technologies de l’information et de la communication a contribué à élargir progressivement (l’)espace médiatique, brisant le monopole étatique sur les médias et celui des élites sur les discours ». Avant d’ajouter : « Ainsi, les blogs, les groupes WhatsApp, Facebook, Twitter et différents médias en ligne sont venus élargir l’offre médiatique et sont devenus des espaces où se construit par tuilage la formulation du dissentiment à l’égard des pouvoirs dominants.»

Relais d’information

La crise politique et sociale que vit le Mali avait aussi migré sur les médias sociaux. Elle se traduisait souvent par une guerre de communication entre pro et anti-régime. À travers des pages et profils interposés, les protagonistes se sont livrés à une rude bataille « virtuelle ». Chaque cherchant à ranger l’opinion publique de son côté.

Les animateurs de ces « médias instantanés » sont traités comme des petits princes. Ils sont privilégiés lors des conférences de presse, meetings et manifestions. Grâce à ces relais d’informations, les Maliens ont pu suivre de façon instantanée les négociations de la mission de la Communauté économique des États de l’Afrique de l’Ouest (CEDEAO). Et, récemment, le coup de force militaire qui a renversé le régime du président Ibrahim Boubacar Kéïta.

Une concurrence déloyale

Pour des télévisions, les plateformes d’informations en ligne comme les pages Facebook relayant l’information brute, en temps réel, font une concurrence déloyale. Elles donnent au public en direct ce que les télévisions proposent le soir dans leurs éditions.

« Pendant que tu prépares ton élément pour l’édition du soir, tout est déjà sur Facebook. Cette difficulté n’est pas nouvelle. Plusieurs personnalités publiques viennent désormais dans les rencontres avec le gestionnaire de leur page Facebook. Dès que vous commencez une interview, ils en font un direct. C’est clairement une concurrence déloyale », dénonce Hamza Coulibaly, reporter d’images pour une télévision de la place. « Nous sommes invités aux manifestations par les organisateurs. Parfois, on s’y invite », explique Alassane Coulibaly, responsable d’une page Facebook.

Evolution inéluctable

Mais ce qu’il faut savoir, c’est que cette évolution est inéluctable. Et elle n’est pas propre qu’au Mali. C’est aux télévisions et, par ricochet, à toute la presse classique de s’adapter et d’innover. On se souvient du direct de France 24 lors de la conférence de Carlos Ghosn après sa fuite du Japon, le 8 janvier dernier, au Liban.  C’est à nos télévisions de s’adapter. Elles en ont le moyens. La preuve, pendant les festivités du cinquantenaire de l’indépendance du Mali en 2010, l’ Office radiodiffusion télévision du Mali (ORTM) avait assuré des directs avec plusieurs plateaux parfois.

Il est indéniable, au Mali les médias sociaux ont beaucoup contribué à la diffusion de l’information. Mais la course à l’information fait que la plupart partage des informations non vérifiées, alimentant le débat sur leur crédibilité. Autant la presse classique doit s’adapter au nouveau contexte, autant les médias sociaux doivent s’inspirer des fondamentaux du travail d’informations, s’ils veulent être pérennes. Aussi, la presse classique, dans sa « mutation », ne doit pas privilégier audience au détriment de la qualité.

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