Bien qu’elles ont le droit et le devoir de participer à la vie politique du pays, au Mali, les aide-ménagères demeurent une couche qui est aux abonnés absents lors des scrutins.
Elles sont des milliers dans le District de Bamako et les autres régions du pays. Au Mali, les aide-ménagères sont un pilier important des foyers dans les zones urbaines malgré des salaires dérisoires et une charge de travail inhumaine. Qu’elles soient dans leurs localités d’origine ou d’accueil, elles sont quasiment des citoyens « neutres » dans leur patrie, n’étant même pas en mesure d’exercer leur droit de vote.
A tout le moins, selon des témoignages, elles ne sont sollicitées que quand il s’agit de participer à une mobilisation d’envergure pendant les campagnes électorales. C’est le cas d’Aminata Traoré, 21 qui déclare n’avoir jamais participé à une opération de vote dans le pays. Même étant ancienne élève ayant abandonné les bancs de l’école en classe de 9eme année, il n’y a rien de plus normal pour elle. « Une fois qu’on arrive en ville pour le travail, on ne dépend plus de soi-même, affirme-t-elle. En tout cas, je n’ai jamais demandé à mes patrons la permission d’aller voter. Je n’ai même pas de document pour ce faire.»
Triste constat
Souvent, la période d’enrôlement et de distribution des cartes d’électeur trouve qu’elles ne sont plus dans leurs villages. Mais plutôt en zone urbaine où tout leur est étranger. « Et évidemment, cette situation joue contre elles. Pour cette raison, elles n’arrivent donc pas à faire valoir leurs droits au vote », estime Moussa Souleymane Guindo, président de l’Association pour la Protection des Travailleurs Domestiques au Mali (APTDM). Avant d’ajouter : « Les patrons chez qui elles travaillent ont pour la plupart du mal à se faire à l’idée qu’elles ont les mêmes droits que nous tous. » Il est donc quasiment impossible que ceux-ci leur accordent du temps pour effectuer toutes les démarches afin de pouvoir participer aux différents scrutins électoraux.
Bétail électoral
Pourtant, quand il s’agit de grossir le rang des mobilisations lors des campagnes électorales, elles sont souvent au rendez-vous surtout un milieu rural. « Le vote au village est mieux que celui à Bamako » pense Kadia, également aide-ménagère. Au village, beaucoup de festivités sont organisées lors du vote au cours desquelles on distribue de nombreux articles comme les tee-shirts, du thé, etc. Ma grande sœur a même une fois gagné un vélo. »
Une technique classique des hommes politiques bien connue des nombreux analystes : « Les candidats aux différentes élections s’arrangent à inviter du grand monde pour impressionner leurs adversaires. Dans la foule, peu sont en droit de voter ou sinon peu se présenteront réellement au bureau de vote le jour du scrutin » constate Modibo Konaté, observateur de la scène politique malienne.
Pourtant, la démocratie, la véritable, ne marchera qu’avec des citoyens éclairés, informés de leurs droits et devoirs dans la cité. Les aide-ménagères constituent une couche des « moins éclairées » dans notre pays. A défaut de faire face aux bonnes informations citoyennes sur leurs apports pour le pays, elles ne connaissent du vote que les festivités divertissantes et les menus fretins qu’elles y gagnent.
Il est nécessaire de mener des campagnes de sensibilisation à leur endroit afin qu’elles comprennent qu’elles représentent un plus dans la société. Ceci marquera un début de prise de conscience qui pourrait éventuellement contribuer à améliorer leurs droits à des salaires et des conditions de vie décente. L’Association pour la Protection des Travailleurs Domestiques au Mali (APTDM) organise régulièrement des journées de sensibilisation pour expliquer à ces nombreuses jeunes filles leur droit en général incluant le droit au vote et plaider pour la ratification de la convention n°189 de l’OIT qui consacre un travail décent pour les travailleurs domestiques.