Processus électoral : les besoins des personnes handicapées, parent pauvre des programmes
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Processus électoral : les besoins des personnes handicapées, parent pauvre des programmes

Les personnes vivant avec handicap représentent 15% de la population au Mali, selon le dernier Recensement général de la population et de l’habitat (RGPH). Un pourcentage assez élevé pour une couche dont les besoins sont peu pris en compte tout au long du processus électoral.

Entre difficultés d’accès aux bureaux de vote, la non prise en compte des besoins spécifiques entre les lignes des programmes des candidats ou encore leur participation timide au débat électoral notamment dans la presse, les personnes handicapées ne sont pas la couche vedette de la démocratie malienne.

Les élections sont des moments où chaque citoyen doit se sentir concerné. Compte tenu de leur spécificité, il faudrait amener les personnes vivant avec un handicap à déchiffrer les programmes des candidats et à être prises en compte lors des élections. « Cette question est au cœur des préoccupations depuis longtemps, mais personne n’ose en parler. Alors que c’est une triste réalité », déplore Maïga Aminata Traoré, présidente de l’Association malienne des personnes atteintes d’albinisme (AMPA).

« Nous sommes partout au Mali »

A l’AMPA, l’on estime qu’il est temps d’agir : le problème semble mal perçu. « Beaucoup de décideurs pensent que nous avons des représentants, et que nos problèmes doivent être pris en compte par nos représentants lors des élections et des prises de décisions », ajoute Traoré, tout en expliquant que les formes de handicap sont différentes et, par ricochet, les « besoins et [les] difficultés ». « Les besoins sont spécifiques et urgents, car même des lunettes de vue ou les crèmes solaires sont excessivement chères au Mali, et non accessibles sur le marché ».

Il faut considérer les personnes handicapées pour parler de leur situation. « Mais ce n’est pas le cas. Lors des élections, quand il s’agit de mobiliser ou de voter, on vient vers tout le monde. Mais pourquoi pour prendre des décisions, on part à huit clos ? », s’interroge la présidente de l’AMPA. « Il ne suffit pas seulement d’être à Bamako pour être pris en compte ou écouté lors des élections. Nous sommes partout au Mali ».

Entre 2020 et 2021, son association a pu identifier plus de 1700 personnes vivant avec un handicap a Ségou, Sikasso et Bamako, et qui doivent aussi « compter » comme « tous les autres Maliens et toutes les autres personnes vivant avec handicap », selon elle.

Viser loin

Avec une société inclusive où chacun compte, le Mali peut viser loin. L’Union malienne des aveugles (UMAV) est la seule structure qui s’occupe de l’encadrement psychosocial et scolaire des personnes vivant avec handicap visuel au Mali. La structure existe depuis 1972 et a créé son école en 1973. Si l’UMAV s’oriente aujourd’hui à « favoriser » la scolarisation des enfants aveugles, les difficultés sont multiples pour faire face à ses ambitions. « Vous ne verrez dans aucune bibliothèque au Mali des productions en braille. Alors que le pays a opté pour l’éducation pour tous », déplore Hadji Barry, président de l’UMAV, l’un des quatre représentants des personnes handicapées au Conseil national de la transition (CNT).

Pour la documentation de élèves au niveau fondamental ou secondaire, « c’est nous-mêmes qui faisons la production en braille. ». La structure, qui a plus de 50 ans de vocation à promouvoir l’inclusion des personnes aveugles, ambitionne de trouver sur place au Mali les « matériels didactiques de productions qui sont tous importés ». Selon le président de l’UMAV, les élections sont un catalyseur de changement. Mais encore faut-il que les « citoyens qui ont des besoins spécifiques soient compris, écoutés. Nous nous attendons à avoir droit aussi d’être informés, sur les programmes des candidats lors des élections », ajoute-t-il.

Cette attente du président de l’UMAV attire l’attention sur un autre problème : « Par exemple, il y a les malentendants. Le plus souvent, c’est à travers des audios à la radio ou à la télévision que les débats et programmes des candidats sont décortiqués. La spécificité des malentendants et des non-voyants mérite une grande réflexion collective lors des élections. »

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