Mopti : champs de riz cherchent désespérément moissonneurs
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Mopti : champs de riz cherchent désespérément moissonneurs

Les conséquences de la crise au centre du Mali s’illustrent de plusieurs manières. A Dialloubé, en zone inondée, le riz prêt n’est pas moissonné faute de main-d’œuvre.

Dans la région de Mopti, les populations locales sont liées surtout par leurs activités socio-économiques. A Dialloubé, en zone inondée, dont il question dans ce billet, éleveurs et cultivateurs de riz voyageaient souvent vers le cercle de Douentza à la quête du mil.

Cette céréale ne pousse pas sur leurs terres. Tout était organisé de telle sorte que les champs de mil arrivaient à terme deux mois avant ceux du riz cultivé dans la zone inondée, explique cet habitant de la commune de Dialloubé avec qui j’ai échangé. Ainsi, les populations s’entraidaient dans la moisson des différentes cultures. Mais, cela a changé.

Bouleversements

Depuis l’embrasement de la région, avec la prolifération des groupes extrémistes violents et le conflit impliquant les communautés, des centaines de civils ont trouvé la mort. Cette situation a fortement mis à mal les relations entre les communautés. Un climat de méfiance s’est installé et un repli s’est opéré. C’est ainsi que les mouvements cycliques des populations ont fortement diminué.

Par peur, chacun reste chez-soi. « On a peur des brigands sur la route et des amalgames, explique Ahmadou Bah, éleveur. Désormais, nous vendons du bétail pour acheter le mil au grand marché de Mopti ou Konna. Alors qu’Il nous suffisait de deux mois pour amasser d’importantes quantités de mil troquées contre le lait  de nos vaches ».

Pour certains habitants du cercle de Douentza, la réalité semble être la même. « Nos jeunes ne descendent plus, ils ont peur », affirme Koundia ce ressortissant de Douentza, rencontré à Moulountakou, un village à 70 km de Konna.

Se déplacer dans la région est devenu un véritable casse-tête. Partout, des individus armés circulent. On croise également le chemin des militaires, ce qui peut s’avérer difficile si on n’a pas de carte d’identité, un document rare dans la région. Aujourd’hui, à Dialloubé, les rizières sont prêtes pour la récolte, mais la main-d’œuvre manque. « Depuis quelques années, nous manquons de bras valides qui venaient de la zone exondée pour nous aider à faire la moisson », fait savoir Ousmane Diallo.

Arrivée des propriétaires de terres

C’est une tradition durant la transhumance : chaque année, en période de crue, les troupeaux transhumants des zones inondées remontent vers les zones sèches, et entament leur retour des prairies quand les eaux commencent à se retirer de la zone submersible, notamment dans la commune de Dialloubé.

Ces troupeaux appartiennent, pour la plupart, aux grandes familles, qui assurent la gestion des terres. Un pouvoir dont l’acquisition et la réglementation sont antérieures à  l’empire théocratique de Sékou Amadou au XIX e siècle. « Nous devons faire vite. Si les éleveurs arrivent sur leurs terres, ils laissent leurs animaux en divagation», explique Bayilal, cultivateur à Dhaka Barra, un hameau à environ 70 km de la ville de Mopti, vers Nantaka.

Cette situation est à la fois regrettable et source de tensions. Le Bureau de la coordination des affaires humanitaires des Nations unies (OCHA) estime, dans son dernier rapport publié ce mardi 27 janvier, à plus de 4 millions le nombre de personnes en attente d’une assistance humanitaire en 2020. De ce point de vue, ce serait un immense gâchis que de perdre autant de céréales dans la région.

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