« En raison de la polémique en cours autour de l’adoption d’un manuel sur l’éducation sexuelle au Mali, nous avons décidé de renoncer à son élaboration ». Ce tweet du Premier ministre, Soumeylou Boubeye Maïga, met fin à la polémique née de la sortie du président du Haut conseil islamique, qui a dénoncé un enseignement de l’homosexualité. Ce tweet est la énième capitulation du politique malien face au religieux, estime le blogueur Abdoulaye Guindo. Dans ce billet, il tente d’expliquer comment et pourquoi le religieux a réussi à dicter sa loi au politique en rappelant quelques faits saillants.
A mon humble avis, tout part du président Amadou Toumani Touré, qui avait mis en place un consensus politique autour de sa gestion des affaires publiques. Ainsi, la classe politique et la société civile, dans leur grande majorité, ont adhéré à ce qui a été appelé le « consensus à la malienne ». Chacun prenant part à la gestion du pays, il n’y avait alors personne pour jouer les contre-pouvoirs.
Ce consensus a ouvert la porte à une gouvernance dégradante, minée par la corruption et la délinquance financière. La plus grande victime de cet état de fait a été le peuple, laissé à lui-même et impuissant devant cette minorité qui s’enrichissait. Ce peuple, alors, s’est tourné vers les mosquées à la recherche de consolation, favorisant ainsi les mouvements religieux. En réalité, le débat politique est occulté, l’espace politique, qui aurait dû être occupé par des partis politiques structurés et responsables, est libéré et abandonné, créant ainsi une vacuité politique.
La nature ayant horreur du vide
Nous avons assisté à l’occupation de l’espace politique par les associations islamiques, notamment le Haut conseil islamique. L’emprise de cette organisation est devenue évidente le jour où, le 22 août 2009, il est arrivé à réunir environ 50 000 personnes pour protester contre le nouveau Code de la famille. À la suite de cette mobilisation, le nouveau Code de la famille, adopté par l’Assemblée nationale pourtant, a été nettement moins favorable aux Maliennes que la première version élaborée en 2009. C’est désormais le chef de famille qui règle toutes les questions d’héritage et de succession, la femme lui doit obéissance.
L’âge du mariage légal est passé, pour les femmes à 16 ans, contre 18 ans dans l’ancien texte. Le mariage religieux a la même valeur que le mariage civil. Le Haut conseil islamique ne s’arrête pas là. Il arrive à obtenir la présidence de la Commission électorale nationale indépendante (Ceni), l’institution chargée de veiller au bon déroulement des élections législatives et présidentielles de 2012.
Capitulation du politique
Après le coup d’Etat de 2012, il prend part aux concertations inter-maliennes tenues à Ouagadougou, capitale du Burkina Faso. Au cours de ces rencontres, le président Mahmoud Dicko réclame au nom des religieux un ministère des Cultes et l’obtient. On voit donc que le recul du Premier ministre, Soumeylou Boubeye Maïga, n’est pas la première capitulation du politique devant le religieux.
En outre, depuis 2013, les politiciens font la cour aux leaders et groupes religieux, qui constituent un vivier d’électeurs. Ils se rendent de mosquée en mosquée pour prier et solliciter les voix des fidèles. Par sa faute, le politicien malien est aujourd’hui moins influent que le leader religieux. Cette influence de la religion dans les affaires publiques suscite la polémique dans un pays constitutionnellement laïc, mais très majoritairement musulman. On assiste aujourd’hui à Bamako à des manipulations et des intimidations de la part d’acteurs religieux devenus incontournables dans la gestion des affaires publiques.
La laïcité est-elle en danger au Mali ? Le débat est ouvert.
C’est loin d’être une capitulation !
C’est plutôt une façon pour le pouvoir de prendre en compte les aspirations profondes du peuple.
Prenez exemple de part le monde et vous vous rendrez compte que les politiques reculent très souvent face aux religieux.
Cordialement à vous.
Je suis d’accord avec vous. Son analyse est dangereuse pour la dignité nationale du Mali.
Tout à fait,je me demande sans quel pays nous vivons ce pour n’est pas dire que le Mali n’a pas d’aveni
Mais c’est ahurissant de vous lire.
Mais le peuple malien n’a jamais tourné le dos à la mosquée et ou l’église à un seul moment de son histoire. Citez nous une seule période où les maliens ont rompu avec les institutions cultuelles après leur pénétration dans notre société?
On peut plutôt parler de forte accolade entre le peuple et ces lieux cultuels avec l’incapacité des autorités politiques à bâtir une nation tirant ses fondements de son histoire. Cette accolade s’est renforcée lorsque l’homme politique chercha l’onction auprès des religieux pour briguer la présidence de la république. Une fonction qu’ils doivent obtenir de leur capacité à convaincre le peuple à adhérer à leur conviction politique.
Votre analyse critique semble très orientée et dangereuse au regard du texte en main. Votre laïcité est un poison mortel pour la dignité nationale du Mali. Ici, on ne doit pas parler de laïcité mais de dignité nationale, de l’intégrité des valeurs culturelles et historiques de notre patrie. Votre texte me semble très honté vu la confusion de la problématique en débat et votre analyse.