Mali : Salif Keita, un héros africain, une icône mondiale
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Mali : Salif Keita, un héros africain, une icône mondiale

Salif Keita est un héros et une icône qui a porté haut le flambeau de l’Afrique sur les plus grands stades de la planète.

Le vendredi le 25 juin 2021, l’Amicale des anciens footballeurs du Réal club de Bamako a accompli un geste hautement symbolique, en organisant au stade d’entraînement dudit club, sis à Djicoroni-Para, une cérémonie autour de la statue qu’elle a érigée en hommage à Salif Keita, dit « Domingo », qui a joué un rôle incomparable dans l’histoire de ce club.

Salif Keita figure au nombre des Keita les plus célèbres de l’histoire du Mali. Il se situe après les quatre Keita qui ont laissé une empreinte indélébile dans l’histoire du Mali et de l’Afrique :

  • Soundiata Keita, le fondateur de l’Empire du Mali qui a rayonné sur toute l’Afrique de l’Ouest et qui a laissé au Monde la Charte de Kurugan Fouga, l’une des premières Constitutions de l’histoire de l’Humanité ;
  • Abubakari II, le roi visionnaire, le navigateur qui a voulu savoir ce qu’il y avait au-delà des « grandes eaux » en se rendant en Amérique bien avant Christophe Colomb ;
  • Kankou Moussa, le Magnifique, qui a étendu la renommée du Mali à tout le monde connu à la suite de son fameux pèlerinage à La Mecque. Sa richesse fabuleuse en a fait « l’homme le plus riche de tous les temps » ;
  • Modibo Keita, le fondateur de la République du Mali en 1960 : un visionnaire, un panafricaniste totalement dédié à la réhabilitation de la dignité l’homme noir et de l’affirmation de la personnalité de l’Africain.

Quant à Salif Keita, dit « Domingo », il figure au rang des plus grands footballeurs de la planète, par sa maîtrise incomparable du ballon rond, ses qualités et prouesses techniques, sa grâce dans ses relations avec ses coéquipiers.

Un héros africain aux talents exceptionnels

Par son génie incomparable, Salif Keita a brillé en superstar sur tous les terrains de football en Afrique : Abidjan, Conakry, Dakar, Brazzaville, Yaoundé, Douala Au Sénégal, Salif Keita fait l’objet d’une adoration sans borne, car les Sénégalais chérissent tout particulièrement les « artistes du ballon rond ». Quant aux Camerounais, ils furent stupéfiants par la dextérité de Salif, qui foudroya littéralement l’Oryx Club, l’équipe emblématique de Douala, en marquant six buts dont deux furent refusés ! Émerveillé par les qualités exceptionnelles de Salif, Jean Manga Onguené, la superstar du Cameroun des années 1970, adopta au même titre que Salif le surnom « Domingo ».

En Europe, Salif Keita mena une carrière professionnelle captivante. A Saint-Étienne, où il fit ses débuts, Salif a incontestablement ébloui le public stéphanois. Il demeure jusqu’à présent la « star » la plus célèbre du Stade Geoffroy-Guichard, devant Michel Platini, l’icône des Français. À Marseille, il joua sur la Cannebière. A Paris, au Parc des Princes, il se distingua particulièrement lors du fameux match de gala qui opposa une sélection composée de Saint-Etienne et Marseille à l’équipe de Santos où évoluait le « roi Pelé ». Le coup d’envoi de ce match fut donné par Brigitte Bardot. Face au « roi Pelé », Salif a été l’homme du match ! Et après la rencontre, l’hebdomadaire Jeune Afrique titra à l’époque : « Kéïta étonne Pelé ».

Partout où il a joué, Salif Keita s’est révélé un joueur talentueux, qui a émerveillé les spectateurs des stades du monde entier. Dans tous ces stades, « Domingo » -son surnom emblématique- a été reconnu comme la « Panthère noire ».

Aux États-Unis, il figura en 1978 aux côtés d’une pléiade de gloires internationales– tels Pelé « le roi brésilien », Johann Cruyff « le Hollandais volant », Franz Beckenbauer le « Kaiser Allemand » -– au nombre de ceux qui furent chargés du lancement de la première ligue professionnelle de football, appelée Soccer par les Yankees. Pelé jouait à l’époque au Cosmos de New York City, Johann Cruyff à Philadelphia tandis que Salif Keita opérait à Boston City.

Un exemple éloquent du « Mali de Modibo Keita »

Salif Keita, ce génie du ballon rond, est le fruit de la grande époque du « Grand Mali » de Modibo Keita. En effet, « Domingo » a été formé au sein du mouvement pionnier. Ainsi, bénéficia-t-il, très tôt, d’un encadrement hors-pair qui lui inculqua le sens de la patrie, l’amour de l’Afrique, l’esprit de discipline sans lequel aucune grande œuvre n’est possible. En septembre 1961, il séjourna à Moscou (ex-URSS). L’encadrement patriotique et politique dispensé au sein du mouvement pionnier a façonné notre « Domingo national » dont le patriotisme était sourcilleux au point qu’il refusa, à l’époque, la nationalité française. Cet acte, inédit à l’époque, était la manifestation éclatante de l’ambiance patriotique dans lequel baignait le Mali de Modibo Keita.

Salif Keita m’a confié qu’il garde un souvenir inoubliable du président Modibo, qui était dans les tribunes du Stade Mamadou Konaté de Bamako lors de la finale du match inter-pionniers. Satisfait de sa prestation, le président Modibo lui enfila le foulard de pionnier que lui-même portait à son cou. Ce geste hautement symbolique marqua à jamais le petit pionnier qu’il était à l’époque.

Aux débuts des indépendances, le Mali figurait parmi l’élite sportive africaine, ce qui l’amena à jouer trois finales africaines, même si celles-ci furent perdues. Lors de la Coupe d’Afrique des Nations de Yaoundé 1972, qui demeure la grande référence de notre football, l’équipe malienne était animée par la jeunesse ayant été formée par les pères de l’indépendance. Ainsi, on peut dire que la bonne santé politique irradiait tous les pans de la société.

Après la Gloire, une retraite active au service de sa terre natale

En Décembre 1979, au moment de prendre sa retraite sportive, Salif Keita organisa un jubilé ambulant successivement à Bamako, Dakar, Conakry et Abidjan pour dire adieux aux différents publics africains. Il s’agissait-là également de la manifestation d’un geste hautement généreux traduisant l’engagement africain de notre icône du ballon rond. Partout, ce fut la fête. Surtout lors de l’étape de Conakry, où le président Ahmed Sékou Touré– le grand Sily – loua, à la fois, les qualités sportives de l’homme ainsi que son amour envers sa terre nationale après avoir démontré que le talent n’était l’apanage d’aucun peuple. Salif a été un don du ciel aux peuples africains.

Avant la statue de Bamako, Salif avait déjà été immortalisé, à Cergy-Pontoise (dans la banlieue de Paris) où un stade a été baptisé à son nom. Il en fut de même à Saint-Étienne où il avait été élu meilleur joueur. L’AS Real a accompli son acte. Remercions tous ceux qui, de près ou de loin, ont initié et contribué à la matérialisation de cette stèle à l’effigie de Salif Keita.

En cette période d’hommage, permettez-moi de suggérer aux plus hauts responsables maliens d’entreprendre une initiative panafricaine pour suggérer à la Confédération africaine de football (CAF) de baptiser le Ballon d’or africain–récompensant chaque année le meilleur joueur africain–« Trophée Salif Keita ». Tout simplement parce que Salif fut le premier Ballon d’or africain. De plus, il devait être également le deuxième Ballon d’or, mais il désista afin qu’on honore un autre fils du continent.

Il existe déjà une pétition en faveur de la matérialisation d’un tel projet. Aux autorités maliennes de saisir la balle au bond. Pour l’honneur et la gloire du Mali. Pour la reconnaissance éternelle à un homme qui a porté haut le flambeau de l’Afrique sur les plus grands stades de la planète.


  • Moussa Sow est basé à Washington D.C. (États-Unis).

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Les commentaires récents (5)

  1. Robert Herbin l’ancien capitaine des verts des années 67-70 a dit: il y’a Pelé, Gruyff et autres,
    Salif reste le seul footballeur à m’avoir impressionné. Il est le globe trotteur du ballon rond. Dois je rappeler aux maliens qu’en 1996, Salif , et avant lui Di Stéfano, Puskas et Eusebio
    reste le seul joueur africain à avoir reçu la plus haute distinction de le FIFA : L’ordre du mérite.
    Il reste pour moi le footballeur le plus doué et le plus spectaculaire de sa génération. Il fut l’écho Sonore de son temps. Que la CAF, rebaptise le ballon d’or africain « trophée Salif Keita » serait juste une reconnaissance de son mérite au même titre que la FIFA. Rendons à César ce qui appartient à César