Les citoyens doivent occuper leur place au cœur de l’action publique. Ils sont la source et doivent être la finalité de tout pouvoir. Une recommandation, formulée à l’issue des Assises nationales de la refondation (ANR), demande d’institutionnaliser la redevabilité aux responsables dans la gestion publique
Au Mali, les personnes nommées aux charges publiques se sentent plus redevables envers le président de la République, les autorités nominatives qu’envers le peuple duquel pourtant ces derniers tiennent tous leurs pouvoirs.
Le jeu institutionnel, censé fonctionner de sorte à assurer un droit de regard aux citoyens dans la gestion des affaires publiques, a été biaisé. Ceux qui sont censés préserver les intérêts du peuple ont été corrompus, « absorbés » par la machine d’État. C’est dire qu’à aucun niveau, les citoyens n’arrivent désormais à contrôler l’action publique.
Face à une telle situation, de nombreuses voix réclament désormais une réinvention de l’État au Mali. Les Maliens réclament un nouveau type d’État où les responsables publics se sentent redevables envers les citoyens dans la gestion de la chose publique.
Un esprit nouveau dans la gouvernance publique
Le blogueur Issouf Koné écrivait ceci dans un article publié sur Benbere : « On vient au pouvoir pour avoir des résultats à présenter aux citoyens […] Le peuple malien doit savoir que même dans la position du gouverné, il a un pouvoir absolu sur celui qui gouverne. Il ne doit point avoir peur de demander des comptes. C’est son droit ! »
Le principe de la redevabilité dans la gestion des affaires publiques est déjà acté dans le système de la décentralisation. Les élus des collectivités territoriales sont tenus de tenir des séances publiques de restitution aux habitants de leurs localités. Ils rendent ainsi compte des activités qu’ils ont menées pour la collectivité avec les fonds générés. Il est vrai que ces séances mobilisent peu de monde. C’est bien là également que se situe l’autre problème.
Quand bien même on leur crée le cadre nécessaire pour s’impliquer dans la conduite de la vie publique, les citoyens eux-mêmes se mettent à l’écart du processus. Ce qui fait que les exercices de restitution publique servent pour la forme, dans la plupart de nos collectivités territoriales. La transparence dans la gestion des ressources publiques, l’esprit de redevabilité envers les mandants (citoyens) ne se retrouvent pas améliorés.
Mécanisme de redevabilité
L’État doit certes impérativement institutionnaliser la redevabilité dans la gestion des affaires publiques, de la haute sphère de l’État aux responsables des services centraux et déconcentrés de l’administration publique. Les citoyens aussi doivent avoir cette culture politique qui les amènera à jouer leur rôle dans le contrôle de l’action publique. S’il sera difficile d’organiser régulièrement des élections pour donner l’occasion à des votes sanctions, les responsables publics nommés en particulier peuvent être sanctionnés à travers des mécanismes de pétition, de vote en ligne, en les faisant démettre de leurs fonctions pour insuffisance de résultats, corruption etc.
Pour les responsables élus, ils devront recevoir les sanctions exprimées par leurs concitoyens comme des avertissements. Et le mécanisme de redevabilité doit s’accompagner d’un autre mécanisme qui permet aux citoyens de destituer –institutionnellement – les autorités élues avant d’arriver au terme de leurs mandats.
Les responsables publics doivent désormais pouvoir se présenter directement face aux citoyens pour rendre compte de leurs actions. Les médias peuvent servir de médium pour permettre au plus grand nombre de Maliens de suivre l’exercice et de mieux évaluer ensuite.