BVG, OCLEI, PNEF : même combat contre la corruption
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BVG, OCLEI, PNEF : même combat contre la corruption

Face à l’ampleur de la corruption et les différentes malversations, le Mali s’est doté, ces vingt dernières années, de plusieurs structures chargées de contrôler l’usage des fonds publics et de sanctionner les dérives. Si ces institutions produisent des résultats quantitatifs et des rapports de qualité, les condamnations pour corruption restent limitées. « Benbere » fait le point sur trois structures clés.

Le Bureau du vérificateur général : auditer, alerter et ensuite ?  

Créé par la loi n° 03‑030 du 25 août 2003, le Bureau du vérificateur général (BVG) a été institué pour auditer l’usage des deniers publics et évaluer les politiques publiques. Le BVG apparaît dans un contexte où les bailleurs de fonds cherchent à suivre de prêt où va l’argent qu’ils donnent ou prêtent au pays.  Dès ses premiers rapports, l’institution a documenté un manque à gagner de plusieurs milliards de francs CFA dans les comptes publics.

Le Vérificateur général Samba Alhamdou Baby souligne dans son rapport de 2023 que ses recommandations visent d’abord à prévenir les dérives en renforçant les contrôles internes. Le BVG saisit également la Section des comptes de la Cour suprême et le Pôle économique et financier lorsqu’il détecte des irrégularités graves.

Adam Baczko, chercheur au CNRS-Sciences Po Paris, note dans une récente conférence que les rapports du BVG sont « unanimement salués pour leur rigueur par les partenaires techniques et financiers ». Mais, ajoute-t-il, ils se heurtent à la résistance d’une partie de l’administration : « Ils ne dictent pas l’action publique. Ils ne suscitent pas des reformes auprès des administrations vérifiées. Ils aboutissent très rarement à de nouvelles législations ».

L’OCLEI  contre l’enrichissement illicite 

Créée en 2015 et opérationnelle depuis 2017, l’OCLEI enquête sur les patrimoines injustifiés. Lors de la remise de son rapport de fin de mandat à la tête de cette institution, le 30 mai 2025, au remier ministre, Moumouni Guindo a annoncé que l’Office a transmis 42 dossiers à la justice, identifié plus de 550 biens immobiliers litigieux et examiné 32 milliards de francs CFA de fonds suspects.

Le Pôle national économique et financier (PNEF)

Créé en 2023, le PNEF est l’arme judiciaire du dispositif contre la corruption au Mali. Pour 2024, le procureur Ag Houssa Mohamedine annonçait un bilan impressionnant : des centaines de dossiers traités et près de 150 milliards de francs CFA que le Pôle aurait contribué à recouvrer.

La récente réforme du Pôle, annoncée en février 2025, est la mise en place d’une formation collégiale de trois magistrats pour les affaires économiques et financières, remplaçant le juge unique. Cette réforme vise à « renforcer l’objectivité des décisions judiciaires et à minimiser les risques de pressions sur un seul juge », écrit PANA News.

Plus de rapports, moins de condamnations

L’existence de ces institutions montre une volonté affichée de contrôle, tant à l’égard des citoyens que des bailleurs internationaux. D’après certains observateurs, le principal point faible de ces mécanismes est que peu de personnes sont condamnées pour des affaires de corruption et captation de fonds publics.

D’après Adam Baczko, les rapports de ces différentes institutions « vont se heurter, chaque fois qu’ils dénoncent quelque chose qu’ils ont réussi à substantiver, à la résistance de l’appareil judiciaire qui essentiellement refuse ou évite de poursuivre des individus dont les éléments montrent un manquement ou une fraude. Les juges rechignent à prononcer des condamnations dans les affaires de corruption, ils classent souvent les dossiers au motif que l’intention n’est pas prouvée même si les faits sont là ».

Certains observateurs pensent aussi que l’existence de plusieurs institutions destinées à la lutte contre la corruption risque de les rendre inefficace. « Quand il y a plusieurs institutions de contrôle qui ont tendance à jouer le même rôle, il y a un risque de conflits de compétences », estime Abdoul Sogodogo, enseignant-chercheur en droit, cité par Studio Tamani.

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